Départementales: ces quelques candidats LR qui ont également obtenu l'investiture du RN

Le siège du parti Les Républicains, rue de Vaugirard à Paris (illustration) - bertrand GUAY © 2019 AFP
"C'est l'effet Moissac", claironne Gilles Pennelle. Chargé des fédérations au sein du Rassemblement national, et tête de liste du parti pour les élections régionales en Bretagne, cet expert de la carte électorale évoque le discret rapprochement qui s'est effectué dans certains cantons entre le RN et Les Républicains. Cantons, car il est question en l'espèce des élections départementales, également prévues les 20 et 27 juin.
Dans le Tarn-et-Garonne, notamment, les cantons de Beaumont-de-Lomagne et de Castelsarrasin sont le théâtre d'une alliance de fait entre LR et le RN. Plutôt que de présenter son propre binôme, le parti de Marine Le Pen a choisi d'accorder son investiture à celui de LR. Il y a d'abord le duo divers droite (DVD) formé par Jacqueline Tonin et Michel Cornille, le maire d'Escatalens.
"Nous ne sommes encartés nulle part. Mais nous sommes soutenus par Les Républicains, le Mouvement de la Ruralité et le RN, autant dire toutes les composantes de la droite", a assumé Jacqueline Tonin auprès de France 3 Occitanie.
"Totalement inacceptable"
Le délégué départemental RN, Thierry Viallon, a reconnu de son côté qu'il n'y avait pas eu d'accord d'appareil. Pas de logo du parti à la flamme sur la bannière du binôme DVD, donc. Agricultrice, Jacqueline Tonin et son colistier affrontent le maire PRG de Beaumont-de-Lomagne, Jean-Luc Delprince, proche du baron local Jean-Michel Baylet.
Lors des dernières municipales, Jacqueline Tonin s'était présentée avec des RN sur sa liste. Il y a donc une certaine logique à ce qu'elle et Michel Cornille acceptent le soutien du RN. D'autant plus qu'à quelques encablures, la commune de Moissac a été conquise en 2020 par le lepéniste Romain Lopez.
À Castelsarrasin, le dispositif est légèrement différent. Ce sont bien les candidats estampillés LR (et non DVD), André Aigles et Sabine Beorchia, qui ont obtenu le soutien du parti à la flamme. Dans les colonnes de La Dépêche du Midi, André Aigles l'assume. Pour le conseiller sortant Jean-Philippe Bésiers, qui a pris l'étiquette divers centre (DVC), ce soutien du RN au binôme Aigles-Beorchia complique la donne.
La patronne de la fédération LR du Tarn-et-Garonne, Brigitte Barèges, ex-maire de Montauban appartenant à la ligne dure du parti, n'est pas gênée par ces soutiens. Ce n'est "pas un problème pour les électeurs", a-t-elle déclaré auprès du Parisien.
À Paris, les cadres de LR ne produisent pas le même son de cloche. "Je suis totalement opposé à ça bien entendu. C'est totalement inacceptable", peste Damien Abad, président du groupe LR à l'Assemblée nationale, qui n'est toutefois pas étonné que Brigitte Barèges ait adopté cette posture.
"Soutien sans participation" dans le Vaucluse?
Dans le Vaucluse, où le RN est en position de force, une inconnue pèse sur le canton d'Apt, dans la circonscription du député LR Julien Aubert. L'un des candidats RN, Eric Dell'Ajuto, a contracté "un Covid sévère" qui l'a amené à être admis en réanimation et d'y rester pendant plusieurs semaines. Sa binôme ne souhaitant pas faire campagne avec quelqu'un d'autre, le duo est désormais hors course.
Or, il y a dans ce canton actuellement deux binômes de droite en lice pour les départementales. Le premier est soutenu par Julien Aubert. Il est composé de la maire LR d'Apt, Dominique Santoni, et de Patrick Merle, qui est passé à l'UDI après avoir cherché à obtenir l'investiture de La République en marche aux législatives de 2017.
Il y a par ailleurs un binôme DVD, qui fait campagne sous la bannière du "rassemblement pour l'avenir du Lubéron" et qui inclut le maire de Gordes, Richard Kitaeff. Sa colistière Peggy Rayne avait également demandé l'investiture LaREM en 2017. Au RN, Gilles Pennelle nous a laissé entendre qu'un soutien à ce binôme serait envisageable. Que nenni, nous répond Richard Kitaeff.
"Pour nous, il y a une ligne rouge très claire à ne pas franchir. On ne correspond pas au RN et on ne peut pas se présenter sous les couleurs du RN. Si des électeurs du RN votent pour nous, ça ne peut être que positif", fait-il observer auprès de BFMTV.com.
"Si c'est une investiture ou un soutien public, c'est non", poursuit-il. "Si demain, le RN publie un communiqué en disant qu'on est les meilleurs candidats, je ne peux pas le savoir. En tout cas je n'ai eu aucun contact ou aucune information à ce sujet", assure le maire de Gordes. Le délégué départemental RN du Vaucluse, Thierry d'Aigremont, abonde dans ce sens en affirmant ne pas avoir encore fait son choix de binôme à soutenir.
Julien Aubert, lui, entend maintenir une frontière étanche entre ses candidats et le RN, dont il sait qu'il pourrait faire un score important à la fois aux départementales et aux régionales dans le Vaucluse. Mais si la fédération locale du parti de Marine Le Pen soutenait son binôme à Apt? "On les remerciera pour ce soutien sans participation", répond-il avec ironie.
"Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise, vous ne pouvez pas empêcher les gens de vous aider...", ajoute le député LR.