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Politique

Après l'attentat de Nice, Taubira fustige "ceux qui font commerce de la peur"

Christiane Taubira, le 29 janvier 2016.

Christiane Taubira, le 29 janvier 2016. - Jewel Samad - AFP

Dans une longue tribune publiée sur Facebook, Christiane Taubira dénonce "ceux qui vocifèrent sans respect des larmes", en privilégiant "leurs intérêts partisans ou leur impatience à s'emparer du pouvoir d'État".

Christiane Taubira sort de son silence. L'ancienne ministre de la Justice, qui s'exprime peu publiquement depuis sa démission fin janvier, a fustigé samedi "ceux qui font commerce de la peur", dans une longue tribune sur les attentats, où elle appelle à relever le défi d'en "assécher le terreau".

Dans un long texte publié sur sa page Facebook, l'ex-garde des Sceaux dénonce "ceux qui font commerce de la peur, de l'angoisse, de la douleur d'autrui et vocifèrent sans respect des larmes", en privilégiant "leurs intérêts partisans ou leur impatience à s'emparer du pouvoir d'État", en allusion aux déclarations de plusieurs élus de droite.

"Ressasser des poncifs sur les décisions de justice, prises en indépendance par des magistrats dans notre État de droit; gloser sur les effets de la prison lorsqu'aucun des tueurs du 13 novembre, ni celui du 14 juillet, n'avait d'antécédents carcéraux; rabâcher les sempiternelles récriminations fondées sur de seules motivations partisanes, c'est s'obstiner à déguiser la réalité, se réfugier derrière des incongruités confortables, se satisfaire de facilités aberrantes, se situer en deçà des nécessités régaliennes, et finalement nous exposer durablement au danger", écrit Christiane Taubira.

"Il faudrait voir de haut et voir loin"

"Quand il faudrait voir de haut et voir loin", tacle-t-elle.

L'ex-ministre plaide que le "besoin de sûreté, ce droit imprescriptible", inclut la "préservation de nos libertés individuelles et publiques". "Il convient de les organiser, pas de les opposer. Il revient à la puissance publique de trouver, et ce n'est pas simple, la souplesse qui permette d'ajuster le dispositif de sécurité aux multiples formes des attaques, dans la proportionnalité qu'exige l'État de droit, campé sur ses institutions solides", poursuit-elle.

Elle en appelle aussi à "gagner la bataille du recrutement".

Cette bataille "n'est pas exclusive de l'action militaire ciblée sur les arsenaux et logistiques; de l'action diplomatique opérant sur les rapports de force; de l'asphyxie financière. Mais face à cette armée innombrable qui se lève de partout, assécher le terreau où germe, pousse, jaillit cette monstruosité si froide qu'elle paraît intoxiquée, tel est le défi", selon elle.

Sa "première intervention depuis des mois"

La "rhétorique djihadiste, simple, brute (...) parvient ainsi à capter des individus en marge, au rapport parfois distendu avec la religion", ajoute Christiane Taubira, "le terrain est celui des esprits, où frustrations, humiliations, ignorance et fêlures pourvoient en énergie destructrice".

Cette tribune est présentée par l'entourage de Christiane Taubira comme la "première intervention politique directe sur l'actualité depuis des mois" de l'ex-ministre. 

Christiane Taubira avait quitté le gouvernement en janvier pour protester contre le projet de révision constitutionnelle permettant la déchéance de nationalité pour les personnes condamnées pour terrorisme, finalement abandonné par l'exécutif.

V.R. avec AFP