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Visite de Charles III en France: le renseignement avait alerté de "forts risques de troubles"

Le roi Charles III salue les membres du public dans la foule à son arrivée au palais de Buckingham à Londres, le 9 septembre 2022 (Photo d'illustration)

Le roi Charles III salue les membres du public dans la foule à son arrivée au palais de Buckingham à Londres, le 9 septembre 2022 (Photo d'illustration) - DANIEL LEAL

Une note du renseignement territorial, rédigée peu avant avant le report de l'événement, s'inquiétait des "forts risques de troubles" liées à la visite d'État du roi Charles à Paris et Bordeaux ce week-end dans "un contexte social explosif".

Quelques heures après l'annonce du report de la visite du roi Charles III en France, les raisons de cette annulation se précisent. Une note du renseignement, que BFMTV a pu se procurer, met en avant "les forts risques de troubles" qui planaient au-dessus de cette visite d'État, initialement prévue à Paris puis Bordeaux du 26 au 29 mars.

Ce report, qui s'est fait à la demande d'Emmanuel Macron, est lié au contexte extrêmement tendu lié à l'adoption de la réforme des retraites. "Ce qui eut été détestable, c'est au contraire que nous essayions de maintenir cette visite comme si de rien n'était, avec des incidents à la clé", a déclaré le président français ce vendredi, ajoutant qu'une nouvelle date "au début de l'été" était envisagée.

"Un très bon tremplin médiatique"?

Cette note du renseignement indique qu'une déambulation du roi d'Angleterre et du chef de l'État était prévue sur la place Pey Berland à Bordeaux, et que Charles III devait se rendre à une réception à l'hôtel de Ville, dont la porte a été calcinée en marge des manifestations jeudi.

Dans ce document, les services de renseignement indiquent qu'"aucun appel concret à mobilisation n'a été détecté sur les thématiques sociales dans le cadre de cet événement". Néanmoins, ils considèrent que "cette visite présente dès lors de forts risques de troubles" et s'inquiètent du fait que cette visite d'État puisse représenter "un très bon tremplin pour médiatiser certains mécontentements, notamment des conflits ou problématiques en cours (retraites, détresse des viticulteurs par exemple...)".

Ainsi, l'évaluation du risque social est passée à "un niveau très élevé" en Gironde, à l'issue de l'interview du président de la République au cours de laquelle il a défendu l'usage du 49.3.

"Un contexte social explosif"

"Le contexte social est explosif avec des actions en opposition à la réforme des retraites quasi quotidiennes et des syndicats qui, via les médias locaux, se disent désormais prêts à se mobiliser à l'occasion de cette visite", peut-on lire dans cette note du renseignement, qui redoute des "blocages d'axes routiers ou ferroviaires, manifestations intersyndicales sur le parcours" ou encore "des coupures sauvages d'électricité".

L'idée que des banderoles de contestation puissent être déployées par des manifestants sur le parcours du souverain britannique avait aussi été envisagée, d'autant que cet événement "fera l'objet d'une couverture médiatique exceptionnelle". "Surtout si le roi est accompagné de ministres français voir du président de la République", précise la note, qui redoutait notamment la mobilisation de viticulteurs ou de militants anti-pesticides.

Pour les services du renseignement, le risque n'était pas que la personne même du roi soit visée par cette mobilisation spécifique mais plutôt que la vaste fenêtre médiatique ouverte par sa venue en Gironde soit l'occasion de manifester contre la réforme des retraites.

"Une logistique très lourde" et "trop compliquée"

"Des craintes importantes étaient évoquées au niveau de la gare, du TGV et du tramway" que le roi Charles devait prendre à Bordeaux, ajoute le document, qui souligne que "la grève surprise des contrôleurs aériens de ce jour et les coupures électriques ayant aussi frappé l'aéroport ajoutent un risque nouveau sur une éventuelle hypothèse d'arrivée par voie aérienne".

Concernant le tramway, les propos d'un délégué de la CFTC dans la presse laissaient présager que les syndicats entendaient se mobiliser lors de cette visite d'État de façon à ce que Charles III ne puisse pas prendre ce moyen de transport. Dans un tel contexte, il aurait fallu "le protéger avec des véhicules à l'avant et à l'arrière", ce qui représente "une logistique très lourde" et "beaucoup trop compliquée", "sans compter les risques de projectiles".

Par ailleurs, le Quai d'Orsay indique à BFMTV que Buckingham Palace refusait catégoriquement que le souverain britannique prenne l’avion. C'est à la gare du Nord à Paris que Charles III devait arriver dimanche, et la question de faire Paris-Bordeaux par les airs ne s’est pas posée à Londres. Pour rappel, le roi du Royaume-Uni avait été très critiqué par la presse anglaise quand il a pris l’avion pour faire un trajet Londres-Manchester.

Cécile Ollivier, Patrick Sauce avec J.B