Mort de Fiona: "C’est une déflagration émotionnelle"

La mère de Fiona a menti au public qui la soutenait. - -
"Assassins! Meurtriers!" Les insultes ont fusé jeudi devant le tribunal de Clermont-Ferrand où des gens s’étaient réunis pour attendre l’arrivée de la mère de Fiona et son beau-père. Sur Facebook, la page Peine de mort pour Cecile Bourgeon avait recueillie près de 7.000 "like" vendredi.
Le rebondissement de l’affaire Fiona a provoqué une onde de choc que le psychiatre, criminologue et expert auprès des tribunaux Roland Coutanceau décrypte pour BFMTV.com.
Comment analysez-vous la haine suscitée par la mère de Fiona?
Vous avez deux idées contradictoires qui font choc dans cette histoire. D’un côté l’image de cette femme qui pleure et traduit la détresse d’une mère face à la disparition de son enfant. Et de l’autre, le dénouement de l’enquête qui fait que la victime se révèle être le bourreau. La disparition d’un enfant est la plus forte potentialité d’identification. C’est quelque chose que la plupart des gens craignent de vivre. Et il leur est difficile d’imaginer comment la mère de Fiona a pu mettre en scène un tel mensonge.
Le phénomène émotionnel est d’autant plus fort qu’on n’a pas encore tous les éléments concrets et tout le monde s’imagine le pire. En réalité, le personnage maternel est forcément plus complexe que cette apparence. Mais ensuite s’opère une espèce d’hystérie de masse, et la psychologie de masse ne connaît pas la nuance. On a besoin de diaboliser pour haïr.
On a pu voir des membres du comité de soutien en pleurs. Comment expliquez-vous ces réactions ?
C’est une déflagration émotionnelle pour ces personnes. Au choc du retournement s’ajoute une trahison. Ils se sentent eux trahis par la personne qu’ils soutenaient, qu’ils aimaient. Mais pour l'instant, ce sont les plus bouleversés qui témoignent. Ceux qui essaient de comprendre ou qui l'aiment encore ne parlent pas. Ils vont peut-être s'exprimer s'ils estiment que Céline Bourgeon est trop chargée.
Parmi ceux qui ont hué la mère et le beau-père de Fiona au tribunal, certains ne les connaissaient pas. Pourquoi étaient-ils là?
C’est l’image même du lynchage. Il y a quelque chose de violent dans la médiatisation de l’affaire. Le spectateur moyen voit son système émotionnel bombardé. Emerge alors une espèce de haine simplificatrice sur fond de choc face à une scène qui passe en boucle. Les plus radicaux ont une volonté d’extirper le mal, et passent à l'action.
On voit aussi cette haine déferler sur les réseaux sociaux...
Je crois qu’il y a un traumatisme du public. Ça créé une dramaturgie du fait divers qui explique pourquoi, je pense, cette affaire, comme celle de la petite Tiphaine dans le Nord, resteront dans l’histoire.