Meurtre d'Agnès: le suivi de Mathieu en question au procès

Le huis-clos a été partiellement levé jeudi après-midi et vendredi matin. - -
Qui est responsable du manque de suivi de Mathieu, le meurtrier présumé d’Agnès, tuée en 2012 au Chambon-sur-Lignon? C’est sur cette question qu’ont porté les débats vendredi matin au Puy-en-Velay, aux assises de Haute-Loire, avant que le procès se poursuive à huis-clos.
Aujourd'hui âgé de 19 ans, Matthieu est jugé pour le viol et l'assassinat de cette collégienne de 13 ans, mais aussi pour le viol sous la menace d'une arme d'une autre mineure, un an plus tôt dans le Gard. Deux drames intimement liés puisque l'accusé, qui sortait de quatre mois de détention provisoire pour le premier viol, avait intégré l'internat du collège-lycée Cévenol, au Chambon-sur-Lignon, dans le cadre de son contrôle judiciaire.
Jean-Louis Daumas, le directeur central de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), a concédé devant la cour "une faiblesse" mais pas de "fautes" dans le suivi de Mathieu. Auteur d'un rapport remis le 2 décembre 2011 à Michel Mercier, le garde des Sceaux d'alors, Jean-Louis Daumas a réaffirmé vendredi que l'éducatrice de la PJJ, en charge du suivi de Matthieu, entendue jeudi par la cour, "a accompli, selon le référentiel méthodologique, son travail sans faute professionnelle".
Une pédopsychiatre qui ne maitrise pas assez le français
Il a concédé toutefois "deux réserves", mais "pas de faute", car "elle aurait pu prendre contact plus vite" avec le Cévenol, et non quatre mois après l'arrivée de Matthieu, et a eu trop de "distance dans les modalités du suivi psychiatrique". Avant d’insister sur le fait que Mathieu a récupéré "sa liberté si vite": "on pouvait protéger ce jeune et l'amener à faire ce travail" en quartier des mineurs "mieux qu'en milieu libre", a-t-il estimé.
Mais le président de la cour, Claude Ruin, préfère mettre l'accent sur les failles dans le contrôle judiciaire, obligeant le jeune homme à se soumettre à un "suivi psychiatrique ou psychologique pour travailler autour des faits commis et prévenir tout risque de récidive".
Et de citer deux rendez-vous avec une pédopsychiatre lituanienne "qui ne maîtrisait pas assez bien le français pour cette prise en charge" et ayant pour unique contact les parents de Matthieu. Puis, a-t-il ironisé, un "infirmier psychiatrique" et enfin un "psychothérapeute, qui n'en a ni le titre ni l'expérience" et qui "pendant neuf mois n'aborde jamais les faits" avec Matthieu.
"Nous n'en resterons pas là", dit le père d'Agnès
"La PJJ n'a pas vérifié que c'était sérieux et s'est contenté d'avoir l'attestation", a-t-il dénoncé. "Au-delà du référentiel, il y a le bon sens" consistant à "s'assurer que les gens chargés du suivi psychologique étaient compétents", a poursuivi le magistrat. Il s'est aussi étonné du fait que la PJJ n'ait eu qu'un seul contact, en mars 2011, avec le Cévenol, puis "aucun en 11 mois", jusqu'au drame.
Le visage creusé par la fatigue, Frédéric Marin, le père d'Agnès a exprimé son écoeurement à la sortie de l'audience. "C'est un florilège abject et indécent de dysfonctionnements et d'autosatisfaction", a-t-il dit, ajoutant: "Nous n'en resterons pas là."
Le verdict est attendu le 28 juin.
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