Bernard Tapie: son combat face à l'Etat

Barnard tapie, le 3 mars dernier sur le plateau de BFMTV. - BFMTV
Il s'agit du combat de sa vie. De son propre aveu, Bernard Tapie remonte sur le ring ce lundi. Jusqu'au 5 avril, l'homme d'affaires est jugé, aux côtés de 5 autres personnes, par le tribunal correctionnel de Paris, accusé d'avoir opéré des manoeuvres frauduleuses afin de faire tourner en sa faveur l'arbitrage dans le conflit qui l'oppose au Crédit Lyonnais depuis plus de 25 ans. Les trois arbitres s'étaient prononcés pour l'octroi de 404 millions d'euros dont 45 au titre de préjudice moral.
Depuis 1993, Bernard Tapie est en guerre ouverte avec le Crédit Lyonnais, alors banque d'Etat dans la fameuse affaire de la vente d'Adidas. A 76 ans, et atteint d'un cancer, il a décidé d'abandonner tous ses traitements juste avant le début de ce procès médiatique attendu. "Plus de chimiothérapie, plus d’antidouleurs, rien!", a expliqué Bernard Tapie au JDD. Il faut que je sois au top." L'homme d'affaires compte le faire savoir, il a multiplié les interventions médiatiques.
"Je peux vous jurer que même si je suis dans une chaise longue, j'irai à ce procès, a-t-il prévenu il y a quelques semaines sur BFMTV. Ca fait trois ans qu'on me parle des 400 millions que j'ai reçu de l'Etat, ça fait 3 ans que j'entends que moi j'ai été une pompe à fric de l'Etat et j'ai hâte que ce procès arrive."
Arbitrage privé
Des pages économie des journaux, l'affaire du Crédit Lyonnais a envahi celles de la rubrique judiciaire. Tout commence en 1993 quand Bernard Tapie, devenu député, demande à sa banque de vendre pour lui Adidas, qui lui appartenait alors, pour éviter tout conflit d'intérêts. La société est vendue pour 472 millions d'euros. Au terme d'un montage obscur, la banque revend la société quelques mois plus tard à un prix bien plus élevé, après avoir rompu un accord entre les deux parties, afin d'assainir la situation financière de l'homme d'affaires. Bernard Tapie s'estime floué.
A partir de 1995, l'affaire passe plusieurs fois devant la justice avant d'atterrir en 2007 devant un tribunal d'arbitrage privé. Une décision prise par le ministère de l'Economie et sa locataire de l'époque, Christine Lagarde. Trois juges arbitres indépendants sont choisis par les avocats des deux parties pour trancher le conflit qui oppose Bernard Tapie au Consortium de réalisation (CDR), une structure publique de l’Etat chargée de gérer les dettes du Crédit Lyonnais. Pierre Estoup, Pierre Mazeaud et Jean-Denis Bredin sont choisis.
525 millions d'euros réclamés
En juillet 2008, les trois arbitres tranchent: l'Etat est condamné à payer 403 millions d'euros, dont 45 millions au titre du préjudice moral. La bataille prend un tournant politique. Des recours sont déposés contre cette décision, et en 2015, la cour d'appel de Paris annule le jugement arbitral. Bernard Tapie est d'ailleurs condamné à rembourser les 404 millions d'euros. A ce jour, rien n'a été remboursé parce que l'homme d'affaires a obtenu de placer ses sociétés sous sauvegarde du tribunal de commerce, rendant ses biens insaisissables.
"Pour moi c'est plié, le problème c'est quelle va être l'ampleur de la sanction, estime le député Charles de Courson, qui a toujours combattu cet arbitrage. Est-ce qu'il va avoir de la prison ferme ou une amende qui complètement des 403 devenus 450 millions qu'il a détourné des fonds publics."
Selon nos informations, 525 millions d’euros vont être réclamés à Bernard Tapie par le CDR, le consortium de réalisation, la structure publique qui gère les dettes du Crédit Lyonnais. Cette somme correspond aux 400 millions d’euros qu’il a touchés en 2008 à l’issue de l’arbitrage privé considéré aujourd’hui par la justice comme frauduleux, plus les intérêts.
Malgré la maladie, les complications, Bernard Tapie entend se battre: "Au moment où on sait pas combien de temps il me reste, je n'ai pas envie d'entendre dire que j'ai truandé l'Etat", s'insurgeait-il sur BFMTV, lui qui se présente comme ayant toujours été au service de l'intérêt public.