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Police-Justice

Affaire Théo Luhaka: la vidéo de l'interpellation au cœur du deuxième jour du procès

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Près de sept ans après l'interpellation du jeune Théo Luhaka à Aulnay-sous-Bois, la vidéo et des photos ont été présentés et commentées ce mercredi 10 janvier dans la salle d'audience des assises de Seine-Saint-Denis.

Une vidéo décortiquée seconde par seconde. Ce mercredi 10 janvier, au deuxième jour du procès sur l'interpellation de Théo Luhaka en février 2017, l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), la "police des polices", a présenté, devant les assises de la Seine-Saint-Denis, la vidéo où le jeune homme reçoit un coup avec la pointe d'un bâton télescopique de défense (BTD) à travers son caleçon.

Entendu dans la matinée, le commandant en charge de piloter l'enquête IGPN a décortiqué les images de vidéosurveillance et les photos prises sur le lieu de l'interpellation. Dans la salle, chaque seconde de la vidéo est commentée. Le coup de matraque à travers le caleçon de Théo Luhaka, qui s'effondre, est montré.

"On voit que Théo va se raidir, et il n’oppose plus de résistance, donc on pense que le coup est donné à ce moment-là", a analysé le commandant, juste avant que la mère du jeune homme quitte la salle quelques minutes, visiblement émue.

Handicapé à vie

Le 2 février 2017, le jour même de l'interpellation peu avant 17 heures du jeune homme à Aulnay-sous-Bois, "la hiérarchie du commissariat se rend rapidement compte de la gravité des faits", a assuré le directeur d'enquête de l'IGPN.

Suite à une saisine du parquet de Bobigny, ses équipes sont dépêchées ce jour-là au commissariat d'Aulnay-sous-Bois, à une vingtaine de kilomètres au nord-est de Paris, quelques heures après que Théo Luhaka a été hospitalisé.

Le jeune homme va alors subir une opération en urgence pour traiter une perforation rectale: il a reçu un coup avec la pointe d'un bâton télescopique de défense (BTD) à travers son caleçon lors de son interpellation. Presque sept ans après les faits, Théodore Luhaka, 29 ans, est porteur d'un handicap à vie.

Après la vidéo, c'est la photo de Théo Luhaka, visage tuméfié et vêtements ensanglantés, qui sera diffusée dans la salle. Mais, à la barre, les enquêteurs de l'IGPN mesurent leurs propos.

Les accusés sont qualifiés "de très bons professionnels", "sans antécédent". Une inspectrice de l'IGPN assure, au sujet du violent coup de matraque à l'anus, que, "même si les conséquences de ce geste sont aussi dramatiques", cela n'empêche pas que la technique utilisée est "tout à fait légitime". Il s'agit du "geste le moins dangereux" dans l'usage de la force avec un bâton télescopique de défense, dit-elle.

La "gravité des blessures" mal évaluée?

Dans la voiture qui a servi à transporter la victime au commissariat, du sang est retrouvé en abondance sur la plage arrière, la portière et une vitre, sans que les policiers ne se rendent compte "de la gravité des blessures".

Lorsque Théo Luhaka est placé en garde à vue, il a le visage tuméfié, les yeux mis clos, le T-shirt couvert de sang et se retrouve allongé sur le sol en carrelage, d'après un cliché retrouvé sur le portable d'un des policiers.

À son arrivé au commissariat, le policier qui a porté le coup de matraque assure que la victime "a glissé sur le bâton". "Une rumeur", qui se propage parmi ses collègues.

"Ce n'est pas renverser les choses?", demande l'avocat général. "Si, je pense", répond le directeur de l'enquête.

Mélanie Bertrand avec AFP