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Venezuela: le pouvoir s'attaque au chef de l'opposition en exil

Le président du Venezuela, Nicolas Maduro, lors de son allocution télévisée, le 7 août 2018

Le président du Venezuela, Nicolas Maduro, lors de son allocution télévisée, le 7 août 2018 - HO, Venezuelan Presidency/AFP

La Cour suprême a ordonné "l'arrestation immédiate du député" Julio Borges pour tentative de meurtre à l'encontre du président Nicolas Maduro.

La Cour suprême vénézuélienne a ordonné mercredi l'arrestation de Julio Borges, ex-président du Parlement en exil, et lancé la procédure pour le juger, en pleine offensive du pouvoir contre l'opposition que le président Nicolas Maduro accuse d'avoir voulu l'assassiner.

La Cour s'est aussi déclaré favorable à des "poursuites" contre le député Juan Requesens, 29 ans, qui a milité avec Julio Borges dans le parti d'opposition Primero Justicia (la Justice d'abord) et également impliqué par Nicolas Maduro dans la "tentative de magnicide", c'est à dire d'assassinat d'une personnalité de haut rang.

Dès "l'attentat" de samedi, Nicolas Maduro a accusé l'opposition et la Colombie d'être derrière cette attaque avec des fonds provenant des Etats-Unis.

La Cour suprême a ordonné "l'arrestation immédiate du député" pour tentative de meurtre à l'encontre de Nicolas Maduro, précise un communiqué du tribunal.

La Constituante, créée pour neutraliser le Parlement, seul organe du pouvoir vénézuélien aux mains de l'opposition, a privé de leur immunité les députés visés par des poursuites.

Julio Borges en exil depuis février a qualifié les accusations de Nicolas Maduro de "farce"

Fer de lance de l'opposition, Julio Borges, qui se trouve actuellement en Colombie où il a assisté mardi à l'investiture du nouveau président Ivan Duque, a qualifié les accusations de Nicolas Maduro de "farce".

"Tout le monde sait que (l'"attentat") est une mise en scène destinée à poursuivre et condamner tous ceux qui s'opposent à ta dictature", a-t-il lancé mercredi à Nicolas Maduro sur Twitter.

A l'origine de sanctions internationales imposées contre le Venezuela, Julio Borges se trouve en exil depuis février, lorsqu'a échoué, en République dominicaine, un dialogue avec le gouvernement de Nicolas Maduro qui portait sur la date de l'élection présidentielle.

Le très impopulaire Nicolas Maduro, à la tête d'un pays ruiné, a accusé la Colombie d'être responsable de cette "tentative d'assassinat" à son encontre, avec l'opposition vénézuélienne.

Julio Borges et Juan Requesens ont été accusés de participation à l'attaque aux drones chargés d'explosifs

La décision concernant Juan Requesens a été prise après avoir "déterminé qu'existent des éléments suffisants pour estimer qu'ont été commis des délits", selon la Cour.

Juan Requesens a été arrêté mardi soir par des membres de la police secrète.

"Le député Juan Requesens et sa soeur Rafaela ont été capturés et frappés par 14 hommes du Sebin", avait déclaré mardi Primero Justicia sur son compte Twitter.

"Sans aucun mandat d'arrêt, ils sont arrivés à la résidence et l'ont emmené par la force", a affirmé à des journalistes le père du député, dont le lieu de détention n'a pas été fourni par le procureur general, Tarek William Saab.

"Il s'agit d'un kidnapping, de la disparition forcée d'un député, du viol de son immunité. (...). L'Assemblée constituante, illégitime, inconstitutionnelle, n'a pas le pouvoir de lever l'immunité", a réagi lors d'une conférence de presse mercredi le vice-président du Parlement, Alfonso Marquina.

Julio Borges et Juan Requesens ont été accusés par le président Maduro de participation dans l'organisation d'une attaque à l'aide de drones chargés d'explosifs qui, selon le gouvernement, avaient pour but d'attenter à la vie du chef de l'Etat, lors d'un défilé militaire à Caracas samedi. Les circonstances de l'incident restent floues.

L'Assemblée constituante s'est arrogée le pouvoir de lever l'immunité des membres du Parlement 

Selon la Constitution vénézuélienne, seul le Parlement peut lever l'immunité des ses membres, sur demande la Cour suprême. Mais dans la pratique l'Assemblée constituante, qui n'est pas reconnue par une grande partie de la communauté internationale, s'est arrogée ses pouvoirs.

L'Assemblée constituante avait avancé au 20 mai l'élection présidentielle normalement prévue pour décembre, qui a vu la réélection de Nicolas Maduro jusqu'en 2025. Le résultat du scrutin a été rejeté par l'opposition et par une grande partie de la communauté internationale qui le considère comme illégitime.

La crise politique se déroule alors que tous les voyants économiques au Venezuela sont au rouge vif. L'inflation pourrait atteindre 1.000.000% fin 2018 selon le Fonds monétaire international (FMI), et le PIB devrait s'effondrer de 18%. Les pénuries touchent les produits de première nécessité, notamment les médicaments et les produits alimentaires.

Nicolas Maduro a été confronté en 2017 à une vague de protestations de l'opposition qui a fait en quatre mois plus de 125 morts et des centaines de blessés.

N.Ga., avec AFP