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Six morts en deux jours de troubles à Lattaquié en Syrie

MANIFESTATIONS ANTI-GOUVERNEMENTALES DANS PLUSIEURS VILLES DE SYRIE

MANIFESTATIONS ANTI-GOUVERNEMENTALES DANS PLUSIEURS VILLES DE SYRIE - -

DERAA, Syrie (Reuters) - Les forces de sécurité syriennes ont tué six personnes en deux jours de manifestations antigouvernementales dans la ville...

DERAA, Syrie (Reuters) - Les forces de sécurité syriennes ont tué six personnes en deux jours de manifestations antigouvernementales dans la ville portuaire de Lattaquié, ont déclaré samedi à Reuters des militants réformistes en exil à l'étranger.

Le président Bachar el Assad, confronté à la plus grande vague de contestation de son régime en 11 ans de pouvoir, a fait libérer 260 prisonniers, dans l'espoir de désamorcer la contestation.

Les informations en provenance de Lattaquié, important port stratégique du nord-ouest du pays, laissent penser cependant que les troubles, partis de Deraa dans le Sud, se propagent désormais à travers le pays. Des manifestations ont eu lieu vendredi en outre à Damas ou Hama.

Des informations ont fait état de plus de 20 morts dans les manifestations vendredi, surtout dans le Sud, et selon des médecins, des dizaines de personnes ont été tuées au cours de la semaine écoulée dans la seule ville de Deraa, proche de la frontière avec la Jordanie.

De telles manifestations de colère auraient été impensables voici quelques mois encore dans ce pays dirigé par l'un des régimes les plus autoritaires du monde arabe.

Boussaïna Chaaban, proche collaborateur du président Assad, a déclaré à l'agence de presse officielle syrienne que le pays était "la cible d'un plan visant à semer la discorde entre les communautés afin de venir à bout du modèle unique de coexistence en Syrie".

Au Caire, un militant des droits syriens en exil, Ammar Kourabi, a déclaré à Reuters qu'"Il y a eu au moins deux morts (à Lattaquié) aujourd'hui, quand les forces de sécurité ont ouvert le feu sur les manifestants qui cherchaient à incendier le siège du parti Baas". "Je suis en contact avec des personnes en Syrie depuis hier soir(...). Les événements se succèdent à un rythme très rapide", ajoutait-il.

L'agence de presse officielle, qui cite une source gouvernementale, écrit que les forces de sécurité n'ont pas ouvert le feu sur les manifestants de Lattaquié mais qu'un groupe armé a tiré à partir des toits sur des civils et des agents, faisant cinq morts depuis vendredi.

DES BÂTIMENTS INCENDIÉS À TAFAS

A Damas et dans d'autres villes, des milliers de partisans d'Assad ont défilé ou ont circulé en voiture en brandissant des drapeaux, pour clamer leur fidélité au parti Baas.

Le président Assad s'est engagé jeudi à envisager d'accorder davantage de libertés et de lever l'état d'urgence imposé en 1963 à l'arrivée du parti Baas au pouvoir. Ses annonces n'ont pour l'instant pas calmé la rue syrienne.

Samedi, un défenseur des droits de l'homme a indiqué que 260 détenus, pour l'essentiel des islamistes, avaient été libérés après avoir purgé au moins les trois quarts de leurs peines, à la prison de Saïdnaya, au nord-est de Damas.

Selon Amnesty International, la répression des manifestations a fait au moins 55 morts au cours de la semaine écoulée à Deraa et aux alentours. A Sanamein près de Deraa, 20 manifestants ont péri sous les balles vendredi, a affirmé un habitant à la chaîne Al Djazira.

Deraa est un bastion de la majorité sunnite du pays, qui dénonce le pouvoir et les richesses accumulées par une élite issue de la communauté minoritaire alaouite, issue du chiisme, à laquelle appartient le clan Assad.

Samedi, des locaux du parti Baas et un commissariat ont été incendiés à Tafas, près de Deraa, selon des habitants. Des milliers de personnes se sont rassemblées dans cette localité aux cris de "liberté !" pour les obsèques d'un manifestant tué la veille.

A Deraa même, des centaines de contestataires se sont retrouvés sur la place centrale, a rapporté un témoin. Trois jeunes gens se sont hissés sur les restes de la statue de l'ex-président Hafez al Assad déboulonnée et incendiée la veille, en brandissant des pancartes portant le slogan: "Le peuple veut la chute du régime". En fin d'après-midi, les forces de l'ordre ont tiré des grenades lacrymogènes pour disperser les manifestants, a dit un témoin.

Jean-Philippe Lefief, Guy Kerivel et Eric Faye pour le service français