Scrutin présidentiel historique en Egypte

Devant un bureau de vote au Caire. - -
Première élections présidentielles libres pour les Egyptiens. Qui remplacera Hosni Moubarak, le président chassé en février 2011 par la révolution égyptienne ? Quelque 50 millions d'électeurs sont invités à choisir parmi douze candidats le successeur de l'ancien président Hosni Moubarak, chassé du pouvoir par la rue le 11 février 2011, au terme d'une transition gérée par l'armée et entachée de nombreuses violences. « Je vais bien sûr aller voter, je veux du changement. On ne peut pas rester dans cette situation délicate jusqu'à la fin de notre vie », explique Wael Azmy, qui a pris un jour de congé pour pouvoir aller glisser son bulletin dans l'urne. L'élection du nouveau président, si besoin à l'issue d'un second tour mi-juin, est présentée comme le point d'orgue d'une transition démocratique qui devrait voir l'armée rendre le pouvoir aux civils - tout en continuant, sans doute, à tirer les ficelles en coulisse.
« Avec ces élections, nous achevons la dernière étape de la période de transition », a assuré le général Mohamed el Assar lors d'une conférence de presse, à la veille du scrutin. Près de seize mois après la chute du raïs et en dépit de l'élection cet hiver d'un parlement dominé par les islamistes, le pouvoir n'a pas encore changé de mains. Dirigé par le maréchal Mohamed Hussein Tantaoui, qui fut pendant vingt ans le ministre de la Défense d'Hosni Moubarak, le Conseil suprême des forces armées (CSFA) n'a prévu de s'effacer que le 1er juillet.
Islamistes et cadres du régime de Moubarak donnés favoris
Parmi les principaux candidats, deux islamistes, le Frère musulman Mohamed Morsi et le dissident de la confrérie Abdel Moneim Aboul Fotouh, et d'autre part deux « libéraux » incarnant une forme de continuité avec l'ancien régime, l'ex-ministre Amr Moussa et l'ex-général Ahmed Chafik favori de l'armée et de la minorité chrétienne copte. Face à ces poids lourds, seul le « président des pauvres », le nassérien Hamdine Sabahi, qui se présente en « seul défenseur des idéaux révolutionnaires », semble en mesure de tirer son épingle du jeu, même si sa présence au second tour ferait figure de tremblement de terre.
L'arbitre attentif de cette joute électorale est l'armée égyptienne, qui a beaucoup à perdre en abandonnant le pouvoir aux civils, au point que les rues du Caire bruissent depuis des mois de rumeurs de coup d'Etat dans l'hypothèse d'une victoire d'un candidat qui ne conviendrait pas aux généraux. Et ce candidat pourrait être celui des Frères musulmans, dont l'un des dirigeants, Essam el Erian, a prévenu qu'ils « ne permettraient pas à l'armée de jouer un rôle politique » à l'avenir, tout en admettant que le processus de « démilitarisation de l'Etat » prendrait du temps pour éviter « une confrontation frontale ».