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Référendum dans un climat pesant au kirghizistan

La présidente par intérim Roza Otunbaïeva est symboliquement venue voter dimanche à Och, ville frappée par de violentes émeutes ethniques, lors du référendum qui doit faire du Kirghizistan une démocratie parlementaire. Les résultats du vote sont attendus

La présidente par intérim Roza Otunbaïeva est symboliquement venue voter dimanche à Och, ville frappée par de violentes émeutes ethniques, lors du référendum qui doit faire du Kirghizistan une démocratie parlementaire. Les résultats du vote sont attendus - -

par Maria Golovnina OCH, Kirghizistan (Reuters) - Le référendum organisé dimanche au Kirghizistan dans un climat de méfiance sur fond de violences...

par Maria Golovnina

OCH, Kirghizistan (Reuters) - Le référendum organisé dimanche au Kirghizistan dans un climat de méfiance sur fond de violences ethniques doit ouvrir la voie à l'instauration de la première démocratie parlementaire en Asie centrale.

La réforme constitutionnelle, si elle est entérinée, renforcera la fonction de Premier ministre, qui récupérera une partie des prérogatives présidentielles. Suivront des législatives en octobre et la reconnaissance diplomatique du gouvernement provisoire.

Cette évolution des institutions, voulue par les nouvelles autorités qui ont pris le pouvoir après l'éviction du président Kourmanbek Bakiev, chassé par la rue en avril, est jugée essentielle par la présidente par intérim, Roza Otounbaïeva, pour rétablir la stabilité après une vague de violences communautaires.

Les affrontements entre Kirghizes et Ouzbeks, dans le sud du pays, ont fait 275 morts au moins, peut-être des centaines, principalement des Ouzbeks de souche. Des centaines de milliers de personnes ont fui leur domicile.

Comme un symbole, Roza Otounbaïeva, qui a refusé les appels en faveur d'un report du scrutin, a voté dans une apparente décontraction à Och, deuxième ville du pays, considérée comme la capitale régionale du Sud.

"La population vote pour la stabilité, pour un gouvernement légitime", a-t-elle dit après avoir s'être rendue, sous haute sécurité, dans le bureau de vote installé à l'université d'Etat publique de la ville.

"Un grand nombre de personnes disent aujourd'hui que nous sommes un Etat en faillite mais au bord d'un changement énorme. Par ce référendum, le peuple veut prouver que ce pays est uni", a-t-elle ajouté.

CLIMAT DE MEFIANCE

La commission électorale a fait savoir qu'à 15h00 locales (09h00 GMT), soit huit heures après l'ouverture du scrutin, le taux de participation était de 43,14%. Les bureaux de vote doivent fermer à 20h00 locales (14h00 GMT), et les premiers résultats ne sont pas attendus avant dimanche soir ou lundi.

Les violences ont provoqué une profonde méfiance parmi les populations d'origine ouzbèke sur la capacité des nouvelles autorités à assurer la sécurité et la stabilité du pays.

Bon nombre d'entre eux se sont toutefois rendus aux urnes, sortant ainsi pour la première fois de leur domicile depuis l'éclatement des violences le 10 juin.

Dans les files d'attente menant aux bureaux de vote de la ville d'Och, certains d'entre eux, qui ne s'étaient pas vus depuis cette date, se sont tombés dans les bras, heureux d'apprendre que leurs proches étaient toujours en vie.

Pour tous ceux qui avaient choisi de ne pas aller voter, craignant pour leur sécurité, des responsables de la commission électorale, accompagnés de soldats armés, ont organisé des bureaux de vote itinérants pour aller à la rencontre des électeurs, équipés d'une urne transparente.

"Il va falloir que nous traversions cette période de turbulences, mais lorsque nous aurons un gouvernement digne de ce nom, tout redeviendra stable", a confié Andrei Abdoullaïev, un Kirghize d'origine ouzbèke.

Cet ancien combattant de l'armée nationale fait partie d'un groupe d'autodéfense qui s'est formé il y a plusieurs semaines dans un quartier d'Och, où est aujourd'hui installé un bureau de vote dans une ancienne distillerie de vodka.

"NOUS VOULONS JUSTE VIVRE EN PAIX"

Aux alentours, la plupart des habitants occupent des logements sans toit et font sécher leur linge sur des fils tendus entre des murs incendiés.

"Nous n'avons rien ici: ni gaz, ni électricité, ni eau courante (...) Peut-être que quelqu'un va nous aider. Nous voulons juste vivre en paix", a expliqué une habitante du quartier, Farida Marasoulaïeva.

Craignant pour la sécurité de ses observateurs, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a refusé de dépêcher des délégations à Och et à Djalalabad.

S'exprimant depuis la capitale, Bichkek, le responsable des observateurs de l'OSCE, Janez Lenarcic, a exprimé ses craintes quant à la bonne tenue du scrutin, tout en ajoutant qu'il espérait une forte participation.

"Il y a des incohérences et des choses qui ne vont pas. Le principe d'un taux de participation minimum a par exemple été abandonné. Néanmoins, je pense que plus la participation sera forte, plus le processus sera légitime", a-t-il dit.

Roza Otounbaïeva, qui fut ambassadrice de son pays en Grande-Bretagne et des Etats-Unis, a rejeté les appels de certains de ses ministres à un report du référendum jusqu'à ce que les violences cessent.

Première femme au pouvoir dans une République d'Asie centrale, elle estime cette consultation nécessaire pour donner une légitimité à un gouvernement qui n'est pas issu des urnes et devrait permettre aux dirigeants kirghizes d'être reconnus par la communauté internationale.

Après le soulèvement d'avril, la Russie et les Etats-Unis, soucieux de leurs intérêts dans la région, ont noué des contacts avec Otounbaïeva mais aucun des deux pays n'a reconnu son gouvernement.

avec Dmitry Solovyov et Olga Dzioubenko à Bichkek, Nicole Dupont, Pierre Sérisier et Olivier Guillemain pour le service français