La Ligue arabe en quête de crédibilité en Syrie

Dans une manifestation à Kafranbel, pancarte représentant le président syrien Bachar al Assad (à droire) et le chef de la mission d'observateurs de la Ligue arabe en Syrie, le général soudanais Moustafa Dabi. La présence des observateurs de la Ligue arabe - -
par Mariam Karouny et Erika Solomon
BEYROUTH (Reuters) - Les observateurs de la Ligue arabe ont prévu de visiter jeudi trois nouvelles villes de Syrie pour tenter de s'assurer que les troupes gouvernementales ont cessé, commis elles l'ont promis, les opérations de répression contre les opposants au président Bachar al Assad.
Mais l'Observatoire syrien pour les droits de l'homme a déclaré que huit personnes au moins avaient été tuées dans la journée à l'occasion de manifestations antigouvernementales.
La mission panarabe est attendue dans les localités de Deraa, Hama et Idlib après avoir passé la journée de mardi dans la cité de Homs, l'un des berceaux de la contestation qui dure depuis neuf mois et a fait 5.000 morts civils, selon l'Onu.
Le chef de la mission, le général soudanais Moustafa Dabi, avait estimé mercredi qu'il n'y avait "rien d'alarmant" à Homs, mais des voix, dont celle de la France, se sont élevées pour rappeler que la brièveté de la visite des observateurs ne leur avait pas permis d'apprécier la gravité de la situation humanitaire.
Les opposants au gouvernement ont affirmé que la localité avait été le théâtre des plus graves violences depuis le début de la contestation, avec une trentaine de personnes tuées à la veille de l'arrivée de la mission.
Des habitants du quartier de Bab Amro, l'un des plus sévèrement touchés par la répression, avaient refusé de rencontrer les observateurs mercredi, infligeant un premier camouflet à cette initiative internationale.
Les villes de Deraa, Hama et Idlib sont situées sur un arc sud-nord d'environ 450 km le long duquel s'est développée la révolte contre la famille Assad, au pouvoir depuis 41 ans.
"Les gens ont vraiment envie de pouvoir entrer en contact avec eux (les observateurs). Nous n'avons pas vraiment accès à la délégation. Les gens ont cessé de croire à quoi que ce soit. Seul Dieu peut nous aider", a commenté un militant de l'opposition à Hama.
LA LIGUE DEMANDE UNE SEMAINE
Les habitants de cette ville, où 30.000 personnes furent massacrées en 1982 par les troupes d'Hafez al Assad réprimant un soulèvement religieux, ont prévu de descendre dans les rues pour attendre les observateurs.
Des incertitudes ont brièvement entouré la suite de la visite jeudi en raison de problèmes de communication avec les équipes sur le terrain.
"Le programme d'aujourd'hui va se poursuivre comme prévu. Le seul problème était lié à des perturbations du réseau téléphonique qui ont compliqué les liaisons avec nos observateurs", a dit à Reuters une source proche de la Ligue.
Les déclarations du général Dabi au premier jour de la visite sur le terrain ont suscité quelques inquiétudes concernant la crédibilité de la mission au sein de la communauté internationale.
L'officier soudanais avait dû ensuite rectifier le tir de ses propos en précisant que la mission n'en était qu'à ses tout débuts et que de nouvelles investigations étaient nécessaires.
"Il ne s'agit que de la première journée", a repris en écho Mark Toner, porte-parole du département d'Etat américain. "Nous devons laisser la mission trouver ses marques, la laisser faire son travail et fournir ses conclusions", a-t-il précisé.
La Ligue arabe, qui tente d'asseoir grâce à cette initiative son rôle de médiateur dans la région, sait que tous les regards sont tournés sur cette mission.
Son secrétaire général Nabil Elarabi a reconnu que la délégation avançait dans l'inconnu mais que dans le délai d'une semaine elle sera en mesure de savoir si la Syrie respecte les engagements pris pour entamer un processus de paix. "Nous n'aurons pas besoin d'un mois", a affirmé Elarabi.
Pierre Sérisier pour le service français