Les Irakiens votent, des explosions font 16 morts

Dans un bureau de vote de Ramadi, à une centaine de kilomètre à l'ouest de Bagdad. Deux explosions ont fait 16 morts dans la capitale, alors que les Irakiens se rendaient aux urnes pour des élections législatives à valeur de test pour l'avenir du pays et - -
par Saif Taoufik
BAGDAD (Reuters) - Deux explosions ont fait 16 morts à Bagdad, alors que les Irakiens se rendaient aux urnes pour des élections législatives à valeur de test pour l'avenir du pays et que les insurgés islamistes ont promis de saboter.
Tirs de mortier et explosions ont retenti dans la capitale dès après l'ouverture des bureaux de vote à 07h00 (04h00 GMT) et dans les villes à majorité sunnite.
Seize personnes au moins ont trouvé la mort dans deux explosions qui ont détruit un immeuble résidentiel et un ensemble d'appartements à Bagdad, a-t-on appris de source proche du ministère de l'Intérieur.
Ces législatives, les secondes depuis l'invasion de mars 2003 et la chute du régime de Saddam Hussein, testeront la capacité de résistance de la jeune démocratie irakienne face aux conflits ethniques et religieux et à l'insurrection armée.
Elles représentent aussi un enjeu majeur pour les Etats-Unis qui prévoient de réduire de moitié leurs effectifs militaires dans le pays au cours des cinq prochains mois et d'en retirer toutes leurs troupes d'ici la fin 2011.
Les bureaux de vote ont ouvert à 7h00 et fermeront à 17h00 (14h00 GMT), sous la menace d'attentats promis par la branche irakienne d'Al Qaïda.
Quelque 18,9 millions d'électeurs inscrits, sur une population de 30 millions d'habitants, devront choisir entre 6.200 candidats appartenant à 86 formations politiques pour les 325 sièges du Conseil des représentants.
Il semble impossible de prédire le visage du futur gouvernement irakien. Il avait fallu cinq mois aux différentes alliances pour parvenir à la constitution d'un cabinet après les législatives de 2005.
LAÏQUES ET NATIONALISTES
Le Premier ministre Nouri al Maliki a invité l'ensemble des candidats à accepter les résultats quoi qu'il advienne. "Celui qui gagne aujourd'hui pourrait perdre demain et celui qui perd aujourd'hui pourrait gagner demain", a-t-il dit après avoir déposé son bulletin dans la "zone verte" ultrasécurisée.
Ce chiite conduit l'alliance non confessionnelle de l'Etat de droit (EDD) et espère recueillir, comme lors des régionales de l'an dernier, les fruits du recul de l'insécurité depuis le pic de violences interreligieuses des années 2006-2007.
L'EDD affrontera l'Alliance nationale irakienne (ANI), principale coalition à dominante chiite, qui réunit le Conseil suprême islamique irakien (CSII), le plus puissant parti de cette communauté religieuse majoritaire en Irak, et les militants anti-américains fidèles à l'imam radical Moktada Sadr.
"Aujourd'hui est le jour où les Irakiens prennent la parole tandis que les autres gardent le silence", a dit le chef du CSII, Ammar al Hakim, après avoir voté.
L'ancien Premier ministre chiite Iyad Allaoui dirige pour sa part Irakia, une alliance laïque et nationaliste, avec le vice-président sunnite Tarek al Hachémi. Allaoui s'est plaint d'irrégularités lors du vote anticipé qui a débuté cette semaine. Quelque 600.000 électeurs, militaires ou détenus notamment, se sont déjà prononcés avant ce dimanche.
Comme une autre alliance laïque, Unité de l'Irak (UDI), l'alliance Irakia a souffert de la décision d'interdire 400 candidats accusés de liens avec l'ancien parti Baas de Saddam Hussein, mais elle devrait néanmoins réaliser un bon score.
"Nous devons voir la volonté du peuple irakien s'exercer pleinement lors de cette élection. Sinon, l'Irak plongera à nouveau dans de graves violences", a déclaré Allaoui à la fin de sa campagne.
Les Kurdes, qui jouent le rôle d'arbitre au parlement de Bagdad depuis l'invasion américaine de 2003, sont représentés essentiellement par les deux mouvements nationalistes rivaux qui contrôlent le Kurdistan autonome (Parti démocratique du Kurdistan, PDK et Union patriotique du Kurdistan, UPK).
L'Etat islamique d'Irak, branche irakienne d'Al Qaïda, a intimé aux Irakiens de ne pas voter et menacé de représailles ceux qui enfreindraient son mot d'ordre. Les attentats ont fait au moins 49 morts dans les derniers jours précédant le vote.
La sécurité doit être assurée par les 670.000 soldats, policiers et autres membres des forces de l'ordre irakiennes, épaulés par 96.000 soldats américains. Les mouvements de véhicules ont été limités pour tenter de contrecarrer des projets d'attaques suicides.
Version française Jean-Stéphane Brosse et Grégory Blachier