Le Fine Gael en tête des législatives irlandaises

Décompte des bulletins de vote à Dublin. Le Fine Gael (centre droit) arrive en tête des suffrages mais devrait être privé de la majorité absolue en raison du succès inattendu du Labour (centre gauche), son probable partenaire de coalition. /Photo prise le - -
par Kate Holton et Carmel Crimmins
DUBLIN (Reuters) - L'opposition irlandaise devrait former une coalition et gouverner le pays avec une large majorité à l'issue des élections législatives, marquées par la sanction sans précédent du grand parti irlandais, le Fianna Fail.
Le Fine Gael (centre droit) arrive en tête des suffrages mais devrait être privé de la majorité absolue en raison du succès inattendu du Labour (centre gauche), son probable partenaire de coalition.
Selon un sondage réalisé à la sortie des urnes et diffusé samedi par la télévision publique RTE, le Fianna Fail n'obtiendrait que 15,1% des voix, le pire score de son histoire.
Le Fine Gael obtiendrait 36,1% des suffrages et serait poussé à former une coalition avec les travaillistes (centre gauche), qui auraient attiré 20,5% des voix, meilleur score de l'histoire du Labour irlandais.
Les Irlandais, traumatisés par le déclassement de leur pays, ont largement sanctionné le parti au pouvoir depuis 14 ans, tenu pour responsable de l'effondrement économique du "tigre celte".
Le Premier ministre sortant Brian Cowen deviendra dimanche, à l'annonce des résultats, la première victime politique de la crise de la dette en Europe .
La débâcle sera observée avec anxiété à Lisbonne, le Portugal étant considéré comme le prochain pays à devoir faire appel à l'aide du Fonds monétaire international (FMI) et de l'Union européenne (UE) .
"LA PLUS GROSSE DÉBÂCLE"
Le décompte des voix, complexe en raison du mode de scrutin proportionnel, a commencé à 09h00 GMT et les premiers résultats officiels ne sont pas attendus avant samedi soir, mais les sondages de RTE sont généralement très proches de la réalité.
"Ca va être une journée exceptionnellement mauvaise pour le Fianna Fail", a commenté Theresa Reidy, professeur de sciences politiques à l'université de Cork.
"Ils devraient avoir une petite vingtaine de sièges, c'est une perte de plus de 50 sièges, la plus grosse débâcle qu'un parti ait jamais connu dans ce système."
Le chef du Fine Gael, Enda Kenny, ex-enseignant et plus ancien parlementaire du pays, devrait succéder à Brian Cowen au poste de Premier ministre.
Avec 36% des voix, son parti réaliserait son meilleur score depuis 1982 et obtiendrait 72 sièges sur les 166 que compte le parlement.
Il aurait alors besoin des travaillistes, qui pourraient glaner 35 sièges, pour légiférer. Même si les débats ont été houleux durant la campagne électorale, Fine Gael et Labour ont déjà gouverné ensemble.
Le Sinn Fein, parti d'extrême-gauche et anciennement l'aile politique de l'IRA (Armée républicaine irlandaise), aurait obtenu 10% des voix, un score suffisant pour tripler sa présence au parlement avec 15 sièges.
Enfin, le total des voix indépendantes atteint 15,5%, ce qui devrait renforcer la présence des élus d'extrême-gauche.
RENÉGOCIER
Kenny, comme les travaillistes, souhaite renégocier les termes du prêt de 85 milliards d'euros accordé par l'UE et le FMI pour sauver le pays de la faillite, qui menaçait en raison de l'éclatement de la bulle immobilière et le sauvetage des banques. Beaucoup d'Irlandais y ont vu une perte de souveraineté intolérable.
Même s'il obtient un assouplissement de ses conditions de prêt, dans le cadre de la mise en place d'un mécanisme européen plus global, l'Irlande n'a qu'une marge de manoeuvre limitée et pourrait être contrainte de prendre des mesures d'austérité supplémentaires, au risque pour le parti au pouvoir de perdre très vite sa popularité auprès des électeurs.
Comme le Fianna Fail, le Fine Gael a une politique favorable aux entreprises et s'oppose à des impôts trop élevés. Il s'est engagé à respecter les objectifs fixés par l'UE en terme de déficit mais le Labour veut obtenir une année de répit supplémentaire.
La présence des travaillistes au gouvernement signifiera des négociations plus acharnées entre Dublin et ses partenaires européens mais, l'Irlande dépendant de l'Europe pour maintenir ses banques en vie, c'est à Francfort, au siège de la Banque centrale européenne, que devraient se prendre les décisions.
"Ca pourrait tourner à l'épreuve de force mais je pense que dans un face à face entre Enda Kenny et (la chancelière allemande) Angela Merkel, Angela Merkel gagne à tous les coups", dit Eoin O'Malley, politiste à l'université de Dublin.
Clément Guillou et Jean-Stéphane Brosse pour le service français