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James Foley: les jihadistes ont demandé 100 millions de dollars de rançon

Des combattants de l'Etat Islamique à Raqa, en Syrie, le 30 juin dernier.

Des combattants de l'Etat Islamique à Raqa, en Syrie, le 30 juin dernier. - Welayat Raqa - AFP

L'exécution en Syrie du journaliste américain James Foley relance le débat du paiement des rançons réclamées par les ravisseurs pour libérer les otages.

Faut-il risquer la vie des otages et refuser de financer les ravisseurs à travers les rançons? Les Etats-Unis et la Grande-Bretagne ont depuis longtemps choisi cette option. Les pays européens, dont la France, nient officiellement accepter ces chantages financiers mais y ont recours, souvent par le biais d'intermédiaires.

Après des mois d'incertitude, les proches de James Foley ont d'abord reçu par mail une demande de rançon, irréaliste, de cent millions de dollars, indique une source ayant participé aux efforts entrepris pour le libérer. L'administration américaine est restée inflexible: interdiction de payer ou de négocier sur ces bases.

Le 13 août, selon la même source, la famille du reporter a reçu un dernier message annonçant qu'en représailles aux raids de l'aviation américaine sur les positions de l'Etat islamique en Irak, James Foley allait être exécuté. Moins d'une semaine plus tard, la terrifiante vidéo de sa décapitation était mise en ligne.

"On ne paie pas."

"Washington peut négocier sur d'autres choses, on l'a vu récemment en Afghanistan où ils ont libéré des prisonniers de Guantanamo en échange de leur soldat capturé, mais comme les Anglais ou les Israéliens, pour l'argent, leur politique est constante: on ne paie pas", confie Alain Chouet, ancien chef du service de renseignement de sécurité à la DGSE, les renseignements extérieurs français.

"Dans tous les cas, les otages, c'est un vrai dilemme", ajoute-t-il. "D'un côté, il faut défendre ses citoyens par tous les moyens. D'un autre, l'expérience prouve que quand on ne paie pas, on s'en fait moins prendre (des otages, ndlr). Nous, les pays qui payons, sommes parfois considérés par les mouvements terroristes comme des vaches à lait. Nous leur fournissons une rente, c'est un peu facile".

Lors d'une conférence à Londres en 2012 David Cohen, sous-secrétaire au Trésor américain chargé du terrorisme, avait estimé à environ 120 millions de dollars le montant des rançons versées à des organisations terroristes entre 2004 et 2012. "Le paiement de rançons conduit à de nouveaux enlèvements et de nouveaux enlèvements mènent à de nouvelles rançons, qui renforcent les organisations terroristes. Il faut briser ce cercle vicieux", avait-il alors déclaré.

"Ils vivent la détention de façon différente"

Cette différence est également faite par les ravisseurs et les otages eux-mêmes. Le journaliste français Nicolas Hénin, libéré après avoir partagé son calvaire avec James Foley durant sept mois, le reconnaît: "En détention, les otages ressortissants de pays qui sont réputés pour ne pas négocier sont conscients que leur cas est plus compliqué". Un autre ex-otage français confie anonymement: "Ils (les otages américains) vivent la détention de façon différente. Pour eux la crainte est beaucoup plus forte. Ils savent que contrairement à nous, leur gouvernement ne négocie pas".

Otage des Talibans en Afghanistan pendant plus de sept mois en 2009 avant de parvenir à s'évader, le journaliste américain David Rhodes demande, dans une tribune publiée dans l'hebdomadaire The Atlantic, que les puissances occidentales harmonisent leurs politiques et fassent preuve de davantage de transparence.

"L'exécution de Foley est la démonstration la plus claire du fait que les réponses différentes aux kidnappings par les gouvernements américain et européens sauvent les otages européens mais condamnent les Américains" estime-t-il, dans un texte intitulé "Comment les USA et l'Europe ont laissé tomber James Foley". Pour montrer qu'elle ne restait pas inactive face aux ravisseurs, l'administration américaine a révélé mercredi qu'un raid des forces spéciales US avait été monté pendant l'été pour tenter de libérer, en vain.

A. G. avec AFP