Autriche: à 31 ans, Sebastian Kurz va devenir le plus jeune dirigeant au monde

Col de chemise ouvert, cheveux plaqués en arrière, physique de jeune premier: le conservateur Sebastian Kurz, qui a remporté dimanche les législatives autrichiennes, s'apprête à accéder à la fonction de chancelier, et à devenir à seulement 31 ans le plus jeune dirigeant d'Europe et du monde. Ministre depuis six ans, il a réussi à s'imposer comme la figure du renouveau en Autriche, et témoigne d'une carrière fulgurante.
"L'enfant prodige"
"J'accepte ces nouvelles responsabilités avec beaucoup d'humilité", a réagi dimanche le "Wunderwuzzi" (enfant prodige) de la politique autrichienne qui va être chargé de former le prochain gouvernement au nom d'un parti chrétien-démocrate (ÖVP) qui était encore au plus bas il y a six mois.
Né le 2 août 1986 à Vienne d'un père technicien et d'une mère enseignante, Sebastian Kurz a déjà un long parcours politique derrière lui. Ancien patron de la puissante organisation de jeunesse de l'ÖVP, il est nommé en 2011 secrétaire d'Etat à l'intégration à 24 ans, avant même d'avoir achevé son cursus d'études de droit. En 2013, il devient le plus jeune ministre des Affaires étrangères d'Europe, et s'exprime à la tribune de l'Assemblée générale des Nations unies l'année suivante, à tout juste 28 ans.
Dans ses fonctions, il s'est forgé une stature d'homme d'Etat en côtoyant ses grands homologues internationaux, notamment lors des négociations sur le nucléaire iranien à Vienne en 2015. Une ambiance loin de ses faux-pas de débutant, comme lorsqu'il distribuait des préservatifs noirs (l'ancienne couleur de l'ÖVP) pour vanter le côté "excitant" du parti.
A l'automne 2015, il est l'un des premiers ténors européens à critiquer la politique d'accueil des migrants de la chancelière allemande Angela Merkel, prônant - et obtenant - la fermeture de la route des Balkans.
Une "Kurmania"
La "Kurzmania" s'est illustrée tout au long de la campagne par la ferveur entourant ses meetings et les longues séances de selfies avec des militants de tous âges. "C'est lui, rien que lui, la façon dont il aborde les choses est captivante. Il a ouvert le parti à la société civile", explique Michael Brandstetter, un jeune supporter conquis. Werner Schwab, 64 ans, apprécie son "calme et sa discipline".
A une Autriche prospère mais insécurisée par la crise migratoire, il a offert une image de modernité et un discours de fermeté sur l'immigration. Une coalition de Sébastian Kurz avec la formation d'extrême droite FPÖ est d'ailleurs considérée comme scénario le plus probable à l'issue du scrutin, leurs positions s'étant rapprochées au point que le FPÖ a accusé le candidat conservateur de "plagier" son programme.
Un "Messie" dont le parcours évoque celui d'Haider
Il est aujourd'hui appelé à devenir le plus jeune dirigeant d'Europe, devant le capitaine-régent de Saint-Marin Enrico Carattoni (32 ans), le Premier ministre irlandais Leo Varadkar (38 ans) et le président français Emmanuel Macron (39 ans). Mais à la différence de ce dernier, porté à la présidence par un mouvement qu'il avait créé de toutes pièces, Sebastian Kurz a refaçonné à sa main une formation existante, lui imposant une nouvelle couleur (le bleu turquoise pâle) et l'appellation "Liste Kurz".
L'avènement de celui qu'une presse autrichienne partagée entre admiration et ironie a qualifié de "Messie" ou de "Kaiser" n'est pas sans rappeler Jörg Haider, le flamboyant leader d'extrême droite mort dans un accident de voiture en 2008.