Démission de Kofi Annan, poursuite des violences en Syrie

Kofi Annan a démissionné de son poste de médiateur des Nations Unies. - -
Kofi Annan a démissionné ce jeudi 2 août de son poste de médiateur des Nations unies et de la Ligue arabe en Syrie. Il a justifié sa décision en expliquant qu'il n'avait pas « reçu tous les soutiens que la cause méritait ». Le plan en six points du diplomate ghanéen, chargé en février par la Ligue arabe et l'Onu de trouver une issue pacifique à la crise syrienne, visait à mettre un terme aux violences et à préparer une transition politique.
« Kofi Annan mérite notre profonde admiration pour la manière désintéressée avec laquelle il a mis ses formidables compétences et son prestige au service de cette mission des plus difficiles et potentiellement ingrate », a estimé jeudi le secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-moon, dans un communiqué. S'adressant à des journalistes à Genève, Kofi Annan a évoqué les « accusations et les insultes » subies au sein de Conseil de sécurité de l'Onu et a déploré le manque de soutien des grandes puissances. La Chine et la Russie ont opposé à trois reprises leur veto à des résolutions du Conseil de sécurité de l'Onu menaçant le régime de Bachar al-Assad de sanctions en cas de poursuite de la répression de l'opposition.
Le porte-parole de Kofi Annan, Martin Nesirky, a refusé de s'exprimer sur la question de la succession du médiateur. Le président russe Vladimir Poutine, allié indéfectible de Damas depuis le début des violences, a déploré la démission de Kofi Annan qu'il a qualifié de « diplomate brillant ». La Chine a fait part de son côté de ses regrets et a insisté sur l'importance du rôle joué par les Nations unies dans la résolution de la crise syrienne. La Maison blanche a pour sa part estimé que le départ de Kofi Annan illustrait le refus du président syrien Bachar al-Assad de respecter un plan de paix soutenu par l'Onu ainsi que l'incapacité de la Russie et de la Chine à demander des comptes à Bachar al-Assad devant le Conseil de sécurité de l'Onu.
« Les Occidentaux ont privilégié la voie militaire »
Pour les spécialistes, la démission de l'émissaire de l'ONU est le signal de l'échec de la diplomatie internationale. « La diplomatie n’a plus de place puisque tout le monde s’accorde sur le fait que c’est l’issue militaire qui décidera in fine de la situation », explique Jean-Yves Moisseron, chercheur à l’Institut de recherche pour le développement et spécialiste du Moyen-Orient.
« On sait que le président d’Obama a signé un acte pour donner le feu vert à la CIA pour soutenir l’armée syrienne libre engagée contre l’armée régulière gouvernementale, explique Richard Labevière, consultant international, spécialiste de la Syrie. On sait que depuis, la Turquie a un état-major commun regroupant des forces spéciales turques, américaines et françaises qui sont à pied d’œuvre pour aider l’armée syrienne libre sur le plan de l’artillerie et de leur coordination. Donc, les Occidentaux ont privilégié la voie militaire. On va s’installer dans le pire des scénarios dans la poursuite d’une guerre civile qui pourrait durer très longtemps ».
A Alep, les combats s'intensifient
Sur le terrain, les combats se sont intensifiés ces dernières heures à Alep, la deuxième ville du pays. Les forces gouvernementales ont pilonné le quartier de Salaheddine avec des chars et des tirs d'artillerie tandis que les rebelles ont tenté de consolider leur prise de contrôle de certains quartiers. Seize rebelles ont par ailleurs été tués dans un bombardement aérien des forces loyalistes dans la plaine du Hauran, dans le sud du pays.Cette offensive de l'armée régulière survient après l'attaque par des insurgés d'un barrage routier de l'armée jeudi près de la ville de Busra al Harir, précisent ces sources.
Au moins 50 personnes ont également été tuées par les forces syriennes au cours d'affrontements avec les forces rebelles dans la ville de Hama (centre), selon des habitants et des militants de l'opposition. Le sous-secrétaire général de l'Onu chargé des opérations de maintien de la paix Hervé Ladsous a confirmé que l'opposition syrienne était en possession d'armes lourdes sans toutefois être en mesure de savoir si les forces rebelles les utilisaient contre l'armée régulière.
La semaine prochaine, Ban Ki-moon présentera son rapport et ses recommandations sur la mission d'observation de l'Onu en Syrie (Minus). Le mandat de la Misnus, qui était de trois mois, a été prolongé de 30 jours par le Conseil de sécurité le mois dernier. Selon le représentant permanent de la France à l'Onu, Gérard Araud, le Conseil de sécurité ne devrait pas renouveler le mandat de la Misnus.