BFMTV
États-Unis

Six mois de prison pour un viol: le jugement qui choque les Etats-Unis

Sur le campus de l'université Stanford, en 2014. (photo d'illustration)

Sur le campus de l'université Stanford, en 2014. (photo d'illustration) - Justin Sullivan - Getty Images North America - AFP

La décision plus que clémente d'un juge californien à l'égard d'un étudiant de Stanford ayant violé une étudiante inconsciente, en janvier 2015, a provoqué l'indignation des Américains, qui se sont mobilisés sur Internet pour réclamer la révocation du magistrat.

Six mois, dont trois fermes. Voilà la nature de la sentence qui a été prononcée à l'encontre de Brock Turner, d'un étudiant de la prestigieuse université de Stanford, en Californie, coupable d'avoir violé une autre élève du campus, inconsciente, en janvier 2015.

En mars dernier, il avait été reconnu coupable de trois chefs d'accusation: agression avec intention de commettre un crime sur une personne en état d'ébriété/inconsciente, pénétration d'une personne en état d'ébriété et pénétration d'une personne inconsciente.

"Remords sincères"

Le juge californien Aaron Persky a justifié sa décision en affirmant qu'un emprisonnement plus long de Brock Turner, 20 ans, qui risquait initialement jusqu'à 14 ans de prison, aurait eu "un impact profond" sur lui alors qu'il avait fait preuve de "remords sincères".

De son côté, le père du jeune homme a salué le verdict en déclarant que la prison ferme était une punition "trop dure" pour "20 minutes d'action sur une vie de 20 ans", ajoutant que son fils ne serait "jamais plus cette personne toujours joyeuse". Aujourd'hui âgée de 23 ans, la victime s'est dite déçue de cette peine "douce". 

Dans une déclaration lue au tribunal, jeudi dernier, la jeune femme avait décrit comment l'attaque l'avait blessée émotionnellement, lui faisant "ne plus vouloir de son corps". 

Que s'est-il passé?

Les faits remontent à la soirée du 18 janvier 2015. Ce jour-là, la victime se rend à une fête organisée par une fraternité étudiante. Avant de se réveiller quelques heures plus tard dans un lit de l'hôpital de San José, en Californie, sans se souvenir de ce qui s'était passé. Fortement alcoolisée, comme la plupart des participants de la soirée, la jeune fille a fait un black out. Et ne se souvient de rien. Deux passants ont alerté la police, alors qu'elle était en train de se faire agresser, derrière une benne à ordures.

Face à la cour, l'étudiante s'est lancée dans la lecture d'une longue lettre, dans laquelle elle a décrit les sévices, son état post-agression, et détaillé tous les examens minutieux et invasifs subis pour accumuler des preuves.

"Un jour, au travail, je parcourais l’actu sur mon téléphone, et je suis tombée sur un article. Je l’ai lu et j’ai appris pour la première fois que j’avais été trouvée évanouie, les cheveux emmêlés, long collier enroulé autour du cou, soutien-gorge sorti de ma robe, robe poussée au-dessus de mes épaules et de ma taille, que j’étais nue jusqu’à mes bottes, les jambes écartées, et que j’avais été pénétrée par un objet étranger, par quelqu’un que je n’avais pas reconnu. C’est comme ça que j’ai appris ce qui m’était arrivé, assise à mon bureau devant un article. J’ai appris ce qui m’était arrivé au même moment que le reste du monde a appris ce qui m’était arrivé", a-t-elle expliqué dans cette lettre, intégralement traduite par le site Buzzfeed

L'étudiante a aussi contredit Brock Turner qui affirmait qu'elle était consciente et consentante pendant l'agression.

Mobilisation sur Internet

La clémence du verdict, ainsi que la lettre, dure et froide, lue par la victime et devenue virale sur Internet, ont fait naître une vive polémique, à l'heure où les autorités américaines s'alarment du fléau des agressions sexuelles sur les campus. 

La décision a fait scandale sur les réseaux sociaux, qui se sont vite organisés pour obtenir la révocation du juge. Ainsi, mardi, près d'un demi-million de personnes avaient déjà signé une pétition en ligne pour demander le renvoi du juge californien, accusé d'avoir été trop complaisant avec Brock Turner. Mise en ligne sur Change.org, cette pétition dénonce notamment un "parti pris" du juge, qui s'avère être un ancien athlète de Stanford, comme Turner, lui-même champion de natation.

Adrienne Sigel, avec AFP