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Donald Trump face à Harvard devant les tribunaux: pourquoi l'université prestigieuse déplaît-elle tant à la Maison Blanche?

Le président américain Donald Trump s'adresse aux journalistes avant de monter à bord de l'hélicoptère présidentiel Marine One et de quitter la Maison Blanche, le 24 juin 2025 à Washington, DC.

Le président américain Donald Trump s'adresse aux journalistes avant de monter à bord de l'hélicoptère présidentiel Marine One et de quitter la Maison Blanche, le 24 juin 2025 à Washington, DC. - CHIP SOMODEVILLA / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

L'administration Trump poursuit sa charge contre la prestigieuse université, accusée d'avoir favorisé un climat d'antisémitisme sur ses campus. Déjà privée de certaines subventions, l'université pourrait perdre bien plus.

Donald Trump et Harvard ont rendez-vous au tribunal. La prestigieuse école américaine va tenter d'obtenir gain de cause contre l'administration, ce lundi 21 juillet à Boston, après avoir perdu plus de 2 milliards de dollars de subventions fédérales.

Accusé d'encourager les comportements antisémites depuis les manifestations étudiantes propalestiniennes de 2024, l'université avait refusé de se conformer aux exigences du président américain, notamment celle de mettre fin aux programmes visant à favoriser la diversité et aux enseignements qui "alimentent le harcèlement antisémite".

"Aucun gouvernement, quel que soit le parti au pouvoir, ne doit dicter aux universités privées ce qu'elles doivent enseigner, qui elles peuvent enrôler et embaucher, ni sur quelles matières elles peuvent mener des recherches", avait plaidé en avril dernier le président de l'université Alan Garber.

Vers une coupure totale des subventions?

Face à ce refus, le ministère de l'Éducation a annoncé un gel de "2,2 milliards de dollars de subventions sur plusieurs années" ainsi que celui de "contrats pluriannuels d'une valeur de 60 millions de dollars".

Depuis, l'administration Trump n'a cessé d'accentuer la pression. Fin juin, elle a accusé Harvard de violer les droits de ses étudiants juifs ou israéliens et a menacé l'université de mettre complètement fin aux subventions du gouvernement fédéral si elle ne prenait pas des mesures "immédiates".

"L'échec de l'université à mettre en œuvre immédiatement les changements requis mènera à la perte de toutes ressources financières fédérales et continuera d'affecter les relations de Harvard avec le gouvernement fédéral", indique une lettre adressée à Alan Garber, le président de l'institution basée à Cambridge, dans le Massachusetts.

Dans ce courrier, la "task force" mise en place par l'administration pour combattre l'antisémitisme soutient que "la majorité des étudiants juifs ont fait état d'expérience négative ou de discrimination sur le campus", certains disant avoir été la cible de "crachats", ou avoir eu "peur" de s'afficher avec une kippa.

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Tensions autour des étudiants étrangers

Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, Donald Trump mène la charge contre les universités qu'il accuse de propager une idéologie "woke", terme utilisé de manière péjorative par les conservateurs pour dénoncer ce qu'ils perçoivent comme un excès de militantisme en faveur notamment des minorités.

Dans cette bataille idéologique, l'exécutif accuse Harvard de soutenir une "hiérarchie raciale" par laquelle "les individus sont triés et jugés en fonction de leur appartenance à un groupe identitaire opprimé et non à leur mérite personnel ce qui a permis à l'antisémitisme de se développer sur le campus".

L'administration américaine a également eu recours le 9 juillet à une injonction pour tenter d'obtenir des "documents" internes de l'université Harvard sur les étudiants internationaux soupçonnés d'avoir participé à des manifestations pro-palestiniennes.

"Comme d'autres universités, Harvard a permis aux étudiants étrangers d'abuser des privilèges liés à leur visa et de prôner la violence et le terrorisme sur le campus. Si Harvard ne défend pas les intérêts de ses étudiants, nous le ferons", a déclaré dans un communiqué Tricia McLaughlin, une porte-parole du ministère.

Sollicitée par l'AFP, la direction de Harvard a qualifié "d'injustifiée" la demande du gouvernement Trump et dénoncé une campagne de "représailles" contre une université qui "défend" à la fois ses étudiants et ses principes fondamentaux.

Fin mai, la ministre de la Sécurité intérieure, Kristi Noem, avait révoqué la certification de Harvard au programme Sevis (Student and Exchange Visitor), principal système par lequel les étudiants étrangers sont autorisés à étudier aux Etats-Unis. La direction de Harvard avait contesté cette décision en justice et obtenu un sursis.

Des négociations en coulisses

Si les deux camps s'affrontent dans les tribunaux, la solution à la crise pourrait bien être négociée via des discussions plus informelles.

"Nous travaillons en étroite collaboration avec Harvard, et il est fort possible qu'un accord soit annoncé d'ici une semaine environ. L'université a agi de manière tout à fait appropriée lors de ces négociations et semble déterminée à faire ce qui est juste", a affirmé Donald Trump sur son réseau social Truth le 20 juin dernier.

D'après CNN, des discussions entre un cercle très restreint de dirigeants de Harvard et la Maison Blanche étaient effectivement en cours au moment où le président américain évoquait la conclusion prochaine des accords.

Une source de la chaîne d'information américaine indiquait que les discussions étaient proches d'aboutir à un accord pouvant potentiellement résoudre les batailles juridiques en cours. Toutefois, rien n'a été annoncé officiellement depuis.

Harvard n'est pas la seule université ciblée par Donald Trump. Le ministère de l'Éducation a également menacé la prestigieuse université Columbia de New York de lui retirer son accréditation, ce qui pourrait la priver de tout financement fédéral. Sous pression lui aussi, le président de l'université de Virginie a annoncé sa démission le 28 juin après l'ouverture d'une enquête sur les pratiques de l'établissement pour favoriser la diversité.

François Blanchard