Donald Trump à Singapour pour le plus grand coup de sa carrière

Donald Trump s'apprête à embarquer à bord d'Air Force depuis la base d'Andrews dans le Maryland, le 2 février 2018 - - SAUL LOEB, AFP
Dans la nuit de lundi à mardi, le monde aura le regard tourné vers Singapour, où Donald Trump va rencontrer le dirigeant nord-coréen, Kim Jong-un pour évoquer le renoncement de la Corée du nord à l'arme nucléaire. Une rencontre historique, qui a failli ne pas avoir lieu: le 22 mai, Donald Trump avait en effet annoncé qu'il décidait finalement de ne pas rencontrer Kim Jong-un…. Avant de changer d'avis.
Pour Donald Trump, l'enjeu est de taille: lui qui s'est érigé en roi de la négociation, fait face au coup qui pourrait marquer son passage à la Maison-Blanche. S'il parvient à un accord avec Kim Jong-un, il entrera définitivement dans l'histoire. Une issue positive est-elle possible? Difficile de le savoir, alors que Donald Trump a montré ces dernières semaines une imprévisibilité qui a fortement irrité jusqu'aux dirigeants des grandes démocraties du monde. Dernier exemple en date: quelques heures à peine après avoir quitté le G7, il a tweeté, depuis l'avion, qu'il se retirait finalement de l'accord. De quoi déclencher la colère d'Angela Merkel et d'Emmanuel Macron, loin des communiqués diplomatiques.
Un joueur de poker
Pourtant, la négociation fait partie intégrante du personnage. Auteur du bestseller The Art of deal en 1987, Donald Trump est d'abord un homme d'affaires – un "dealmaker", selon le terme américain. "On dit souvent de lui qu'il navigue à vue, mais dans son livre il se compare à un joueur de poker", explique François Durpaire, spécialiste des Etats-Unis. "Or le joueur de poker voit ses cartes! Donc on peut se demander quelle est la part de stratégie et quelle est la part d'improvisation chez Trump".
Certaines réactions créditent la thèse d'une réaction impulsive, comme sa proposition de réintégrer la Russie dans le G7. On se souvient aussi de son tweet sur Justin Trudeau, qu'il a qualifié de "malhonnête et faible" après avoir quitté le G7: "quelques minutes plus tard, tous les correspondants à la Maison Blanche ont reçu un mail leur indiquant que le sommet s'était très bien passé", se souvient François Durpaire.
L'amour du rapport de force
Mais le spécialiste des Etats-Unis rappelle aussi "la constance" du président américain dans ce qu'il cherche. La sortie de l'accord sur le climat, sur le nucléaire iranien, le déménagement de l'ambassade américaine à Jerusalem… "Il a fini par faire ce qu'il disait! Il laisse très peu de marges de négociation".
Et pour cause, le président américain apprécie le rapport de force: il multiplie les coups de pression, les coups de poker et les attaques surprises. Objectif: gagner l'ascendant sur son rival. "Il a un réel besoin de confrontation, c'est là où il est le plus à l'aise. En 90 heures, il quitte le Canada en rabrouant les leaders des grandes démocraties mondiales, pour aller rejoindre un dictateur à Singapour!".
Derrière la stratégie du "dealmaker", se cache aussi un réel idéologue: "Sa stratégie est au service de l'idéologie", avance François Durpaire. Nationaliste, protectionniste, Donald Trump avait pour slogan "America First" (l'Amérique d'abord) pendant sa campagne électorale. "Il est le président qu'il aurait aimé avoir lorsqu'il était businessman: il baisse les impôts et protège d'abord les intérêts américains".