Raul Castro à Paris: des partenariats commerciaux qui cachent les droits de l'Homme

François Hollande et Raul Castro s'étaient rencontrés à New York lors de la 70ème assemblée des Nations Unies, le 28 septembre 2015. - Alain Jocard - AFP
C'est une visite à forte connotation économique et commerciale, mais qui ne pourra oublier la question des droits de l'Homme. La France reçoit lundi le président cubain Raul Castro, pour une visite d'État venant consacrer la nouvelle relation entre Cuba et le monde occidental, dans la foulée de son rapprochement avec les États-Unis et l'Union européenne.
Arrivé samedi à Paris pour une visite privée, Raul Castro doit rencontrer François Hollande lundi. Le voyage officiel, inédit en Europe depuis que le président cubain de 84 ans a succédé à son frère aîné Fidel en 2006, suit la visite de François Hollande à Cuba en mai. Le président français avait alors été le premier dirigeant occidental à se rendre à Cuba après le rapprochement spectaculaire entamé fin 2014 entre l'île et son vieil ennemi américain.
Un rapprochement économique avant tout
Lors de cette visite, La Havane et Paris doivent fixer une feuille de route économique et conclure des accords dans le domaine du tourisme, des transports et du commerce équitable, indique-t-on à Paris. Une opportunité bienvenue pour l'île dont le principal soutien économique, le Venezuela, est plongé en pleine crise, forçant Cuba à chercher de nouveaux partenariats.
La France a récemment été le grand artisan d'un accord sur la dette cubaine due aux créanciers du Club de Paris, avec 8,5 milliards de dollars d'intérêts apurés. Paris pourrait aller plus loin au niveau bilatéral lors de cette visite. De quoi débloquer pour Cuba certains accès aux marchés financiers, en attendant la levée de l'embargo américain imposé à l'île depuis 1962 et condamné depuis longtemps par la France.
Avec environ 180 millions d'euros d'échanges commerciaux annuels, la France, l'un des dix premiers partenaires de Cuba, souhaite tirer les bénéfices du rapprochement engagé dès avril 2014 lors d'une visite sur l'île du ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius. Paris veut s'appuyer sur Cuba pour gagner en influence en Amérique latine, mais aussi devancer sur l'île les concurrents américains et européens lorgnant un potentiel riche en trésors touristiques et en main-d'oeuvre qualifiée.
Les droits de l'Homme "seront discutés", assure-t-on
Depuis avril 2014, Cuba dialogue aussi avec l'Union européenne afin d'instaurer un "cadre de dialogue politique et de coopération" censé tourner la page de vieilles querelles sur les droits de l'Homme. L'étape parisienne offre au gouvernement communiste cubain l'occasion de présenter au monde un visage plus fréquentable, comme en témoigne la récente multiplication des visites de délégations occidentales à La Havane.
Les droits de l'Homme, thème sur lequel Cuba est souvent montré du doigt, "seront discutés", assure une source diplomatique française à Paris. Mais François Hollande, critiqué pour avoir rencontré l'ex-président Fidel Castro en mai, devrait rester assez discret sur la question pour ne pas ternir cette visite.
Lundi, Raul Castro recevra un accueil officiel sous l'Arc de Triomphe, devant des Champs-Élysées pavoisés aux couleurs du drapeau cubain. Sa rencontre avec François Hollande sera suivie d'un dîner d'État à l'Élysée. Mardi, il s'entretiendra successivement avec le président de l'Assemblée nationale Claude Bartolone, le président du Sénat Gérard Larcher, la maire de Paris Anne Hidalgo et le Premier ministre Manuel Valls avant de visiter le Musée de l'Homme, fraîchement rénové. Il doit également s'entretenir avec la directrice générale de l'Unesco Irina Bokova.