Les insurgés libyens prennent Ajdabiah, cap à l'ouest

par Angus MacSwan
AJDABIAH, Libye (Reuters) - Soutenus par les frappes aériennes de la coalition, les insurgés libyens ont repris leur progression vers l'ouest de la Libye et reconquis samedi Ajdabiah au terme d'une nuit de combats. Ils affirment s'être emparés aussi de Brega, port pétrolier du golfe de Syrte.
Dans l'ouest de la Libye, l'aviation française a mené plusieurs frappes dans les régions de Zentane et de Misrata. Ces raids ont permis de détruire au sol cinq avions de combat Galeb et au moins deux hélicoptères MI-35 des forces libyennes qui, déclare le ministère français de la Défense, "se préparaient à mener des opérations dans la région."
Un peu plus tôt, les forces de Mouammar Kadhafi avaient pilonné de nouveau Misrata, grande ville de 300.000 habitants aux mains des insurgés, et n'avaient cessé leurs tirs que lorsque sont apparus des avions de la coalition.
En une semaine, 115 personnes ont été tuées à Misrata où des tireurs embusqués ouvrent le feu, à partir des toits du centre, contre la population, a déclaré un habitant de cette ville située à 200 km à l'est de Tripoli.
Coupée des autres zones tenues par les insurgés, Misrata est encerclée depuis plusieurs semaines par les forces kadhafistes.
"Les hommes de Kadhafi contrôlent toujours les entrées Est et Ouest de la ville de Misrata. Des tireurs embusqués continuent de viser des civils", a raconté un habitant joint par téléphone.
A Tripoli, le porte-parole du gouvernement Moussa Ibrahim a déclaré à la presse que le colonel Kadhafi dirigeait en personne ses forces, mais il a semblé laisser entendre que le Guide libyen se déplaçait peut-être à l'intérieur du pays afin d'entretenir le mystère sur sa localisation.
"Il dirige la bataille. Il dirige le pays où qu'il soit", a dit Ibrahim. "Il a de nombreux bureaux à travers la Libye. Je peux vous assurer qu'il dirige le pays en ce moment même et qu'il est continuellement en communication avec tout le monde à travers le pays", a-t-il ajouté. A la question de savoir si Kadhafi se déplaçait, il a répondu par ces mots: "Nous sommes en temps de guerre. En temps de guerre, vous agissez différemment".
Dans l'Est, la chute d'Ajdabiah, une semaine après le début des frappes aériennes de la coalition, redonne le moral aux insurgés, qui étaient bloqués depuis plusieurs jours aux abords de cette localité, carrefour stratégique entre Benghazi au nord et le golfe de Syrte plus à l'ouest.
GATES DÉNONCE UNE MISE EN SCÈNE
Dans cette ville, les insurgés ont dansé samedi sur les chars, agité des drapeaux et tiré en l'air près de bâtiments criblés d'impacts de balles. Une demi-douzaine de blindés détruits jonchaient l'entrée Est. Les corps d'une quinzaine de combattants de Kadhafi gisaient à l'entrée Ouest.
"Merci la Grande-Bretagne, merci la France, merci l'Amérique!", disait un rebelle.
Les insurgés disent en outre avoir repris le contrôle de Brega, où se trouvent un terminal pétrolier et une raffinerie, à 70 km à l'ouest d'Ajdabiah. L'information n'a pas pu être confirmée de source indépendante.
"Brega est à 100% aux mains des forces de libération", a assuré Chamsiddine Abdoulmolah, porte-parole de l'insurrection, à Benghazi.
La télévision d'Etat libyenne, citant des sources militaires, a fait d'autre part état, samedi en fin de journée, d'un raid aérien de la coalition contre Sebha, ville au centre de la Libye, en plein désert.
La semaine dernière, les autorités libyennes avaient affirmé qu'une centaine de civils avaient été tués par les frappes de la coalition. Mais samedi, le secrétaire américain à la Défense, Robert Gates, a démenti et accusé le régime libyen de se livrer à une mise en scène macabre.
"La vérité, à ce sujet, c'est que nous avons du mal à avoir des preuves concernant des pertes civiles dont nous serions responsables", a-t-il dit.
"Nous disposons d'une quantité de renseignements disant que les hommes de Kadhafi déposent sur les sites que nous avons bombardés des cadavres de personnes qu'ils ont tuées", a dit Gates à la chaîne CBS.
Eric Faye pour le service français