Présidentielle: que proposent Marine Le Pen et Emmanuel Macron en matière de défense?

Un Super Etendard sur le pont du porte-avions Charles-de-Gaulle - -
Depuis le début de la guerre en Ukraine, la défense est devenue un thème majeur de l'élection présidentielle. Autrefois, les candidats se limitaient à des ajustements budgétaires. La prochaine loi de programmation militaire reste un point central de ce domaine où l'argent est le nerf de la guerre. Désormais, les enjeux et l'intérêt des Français portent sur les alliances de défense, la coopération industrielle avec en toile de fond la souveraineté qu'elle soit nationale ou européenne. Nous avons passé en revue les programmes militaires de Marine Le Pen et d'Emmanuel Macron.
Celui de la candidate RN est un document d'une vingtaine de pages qui aborde dans les moindre détails la stratégie française en matière de défense. Le programme du président sortant s'appuie sur son quinquennat au cours duquel le budget a été augmenté d'un niveau inédit avec un plan de modernisation des armées de terre, mer, air/espace et cyber.
Marine Le Pen

Un budget de 55 milliards d’euros
Le programme de Marine Le Pen s’articule autour de l’idée du réarmement de la France. Elle propose un "plein financement du modèle d’armée 2030 avec une LPM (loi de programmation militaire, NLDR) garantissant un effort annuel moyen de 55 milliards d’euros". Elle envisage aussi de financer la recherche dans la technologie d’armement à hauteur d’1,5 milliard d’euros par an.
Quitter le commandement intégré de l'Otan
Marine Le Pen souhaite que la France quitte le commandement intégré de l'Otan dès 2022. Ce commandement militaire de l'alliance atlantique fixe les stratégies militaires et les fait appliquer sur le terrain. Ainsi, des soldats français peuvent être mis sous son autorité. En 1966, le général De Gaulle avait décidé de quitter ce commandement tout en restant membre de l'Otan. En 2009, Nicolas Sarkozy a décidé d'y réintégrer la France.
"Je ne placerai simplement jamais nos forces armées sous un commandement qui ne relève pas de la souveraineté nationale française, ni sous un commandement intégré de l'Otan ni sous un futur commandement européen", explique Marine Le Pen.
La candidate RN plaide aussi pour un rapprochement stratégique entre l'Otan et la Russie "dès que la guerre russo-ukrainienne sera achevée". "Mon inquiétude est que la Russie s'associe avec la Chine. Ce serait un danger majeur, un danger économique, mais aussi militaire", a déclaré sur France 2 la candidate RN.
Cesser de coopérer avec l'Allemagne
"La relation avec l'Allemagne sera largement remaniée". L'industrie français doit rester souveraine estime Marine Le Pen qui désire mettre un terme aux programmes industriels de défense conclu avec l'Allemagne. Mercredi, lors de sa conférence de presse, la candidate a accusé le président sortant de ne pas "défendre les intérêts de la France" face à l'Allemagne. Elle a fait état de "divergences stratégiques irréconciliables".
Elle propose donc de rompre tous les accords de coopération conclus depuis 2017. Parmi ces projets, le Scaf (système de combat aérien du futur) qui doit remplacer entre autres le Rafale ou le MGCS (Main Ground Combat System), le char du futur qui doit succéder au char Leclerc.
Aide militaire à l'Ukraine
"Il faut leur donner les moyens de se défendre", reconnaît Marine Le Pen, qui se dit favorable à la transmission de "renseignements" aux Ukrainiens et à l'envoi d'armes défensives. Par contre, la candidate est "plus réservée" sur la livraison d'armes lourdes car "la ligne entre l'aide et la cobelligérance est mince", a-t-elle estimé.
Emmanuel Macron

Poursuivre la voie budgétaire...
Dans son programme, le président sortant, candidat de La République en Marche (LREM) souhaite poursuivre l’objectif de consacrer 2% du PIB en dépenses militaires. La LPM 2019-2025 est de 40,9 milliards en 2022. Dès 2023, ce budget sera en hausse de plus de 3 milliards d'euros par an pour atteindre 50 milliards dès 2025 contre 32,3 milliards en 2017.
... et la modernisation des armées
Pour faire face à "de nouveaux types de conflictualité" comme le spatial ou le cyber, Emmanuel Macron veut "réinvestir dans de la technologie de pointe" et "conforter un modèle complet d'armée". Il prévoit aussi de doubler le nombre de réservistes opérationnels d’ici 2027.
La modernisation se poursuivra d’ici 2030 avec, entre autres, la livraison de plus de 60 Rafale supplémentaires, 5 sous-marins nucléaires d’attaque, 1250 nouveaux véhicules blindés polyvalents. Il poursuivra le développement d'innovations : armes électromagnétiques, drones sous-marins, missiles hypersoniques, nanosatellites de surveillance spatiale.
Le candidat LREM soutient toujours les grands programmes industriels avec d'autres pays européens, dont l'Allemagne (Scaf, MGCS, Eurodrone...).
Cyberdéfense
Depuis 2017, la France dispose aussi d’un commandement militaire de cyberdéfense. La loi de programmation militaire 2019-2025 prévoit un budget de 1,6 milliard d’euros pour la cyberdéfense et le recrutement de 1100 cyber-combattants supplémentaires pour atteindre un effectif de 4000 personnes.
Renforcer la résilience
Dans son programme, Emmanuel Macron présente un plan de mobilisation civile pour renforcer la résilience. Ce programme s'articule sur la "relocalisation des filières essentielles, en renforçant les stocks stratégiques, en recensant les compétences des Français volontaires pour être mobilisés en cas de crise grave et les capacités des entreprises clés".
Les moyens de l'Anssi (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information) seront augmentés pour "renforcer la capacité de lutte et de soutien cyber aux entreprises françaises". Emmanuel Macron veut aussi lancer des états généraux "pour le droit à l’information, afin de lutter contre toutes les tentatives d’ingérence".
Assurer l'autonomie européenne
La vision d'Emmanuel Macron, qui assure la présidence de l'Europe, est aussi de renforcer la souveraineté européenne sur l'énergie, les technologies et la stratégie militaire. Il souhaite réduire la dépendance de l'Europe au charbon, au gaz, au pétrole importés, se doter d'infrastructures essentielles (" cloud", spatial...) et définir une doctrine commune pour renforcer les capacités des armées européennes et leur coordination.
