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Culture

Financement, "indifférence provocatrice"... Pourquoi la soirée de levée de fonds du British Museum fait-elle polémique?

Des visiteurs admirent les marbres du Parthénon, également connus sous le nom de marbres d'Elgin, au British Museum de Londres, le 9 janvier 2023. Ces sculptures antiques ont été retirées du temple du Parthénon, sur l'Acropole d'Athènes, au début du XIXe siècle par le diplomate britannique Thomas Bruce, comte d'Elgin.

Des visiteurs admirent les marbres du Parthénon, également connus sous le nom de marbres d'Elgin, au British Museum de Londres, le 9 janvier 2023. Ces sculptures antiques ont été retirées du temple du Parthénon, sur l'Acropole d'Athènes, au début du XIXe siècle par le diplomate britannique Thomas Bruce, comte d'Elgin. - Daniel LEAL / AFP

Le "Pink Ball", événement réunissant célébrités, mécènes et politiques organisé par le British Museum n'a pas été exempt de controverses ce samedi 18 octobre, en particulier en raison de son financement et des tensionsbilatérales entre la Grèce et le Royaume-Uni.

Il y avait des airs de MET Gala ce samedi 18 octobre à Londres. Le British Museum a organisé son "Pink Ball", une soirée réunissant célébrités, mécènes et politiques, destinée à récolter des fonds pour compenser la baisse des subventions publiques. Parmi les personnalités invitées, des célébrités comme Naomi Campbell, Mick Jagger ou Janet Jackson ou encore des politiques comme le maire de Londres Sadiq Khan et l'ancien Premier ministre britannique Rishi Sunak.

Le musée, qui possède l'une des plus grandes collections permanentes au monde, entend "célébrer Londres comme l'une des principales capitales culturelles du monde" et faire de cette soirée un rendez-vous annuel incontournable. Coût d'entrée: 2.000 livres (environ 2.300 euros).

Mais derrière les paillettes et les sourires, pointe déjà un vent de polémique. Parmi les financeurs de cet événement, la compagnie britannique BP, qui s'occupe de l'extraction, du raffinage et de la vente de pétrole, a fait grincer des dents.

Ainsi, le discours prononcé par le président du conseil d'administration du musée, George Osborne, a été interrompue par une militante de l'association "Energy Embargo for Palestine".

Infiltrée dans la soirée en tant que serveuse, la manifestante a brandi une pancarte "STOP BP NOW". "Le parrainage de 50 millions de livres sterling du British Museum avec BP offre une couverture culturelle à une entreprise qui provoque un effondrement climatique, a-t-elle alors déclaré. Si le British Museum veut vraiment faire face à son héritage culturel, il [devrait] examiner la manière dont il soutient activement l'impérialisme aujourd'hui."

"Indifférence provocatrice"

La ministre grecque de la Culture, Lina Mendoni, a, quant à elle, dénoncé, ce lundi 20 octobre, l'"indifférence provocatrice" du British Museum qui a organisé un dîner de collecte de fonds notamment dans la galerie Duveen qui accueille les Frises du Parthénon.

"La sécurité, l'intégrité et la dignité des monuments devraient constituer la principale préoccupation du British Museum, qui, une fois encore, fait preuve d'une indifférence provocatrice", a-t-elle commenté dans un communiqué.

Rappelant qu'elle avait "condamné à maintes reprises les dîners, réceptions et défilés de mode organisés dans les espaces des musées où sont exposés des monuments et des oeuvres d'art", la ministre a jugé que "de telles initiatives sont offensantes pour les biens culturels" en ce qu'elles "mettent (aussi) en danger les objets eux-mêmes".

Lina Mendoni a fustigé le fait que les frises du Parthénon, trésors archéologiques vieux de quelque 2.500 ans, soient utilisées "comme éléments décoratifs pour le dîner que (le British Museum) a organisé".

Querelle historique

Ces vestiges antiques font l'objet d'une querelle historique entre la Grèce et l'institution londonienne. La question de la restitution de ces ces précieuses frises longues de 75 mètres et détachées du Parthénon empoisonne, depuis de nombreuses années les relations bilatérales.

En décembre dernier, les deux parties avaient semblé se rapprocher d'une solution, le British Museum s'étant montré ouvert à un "partenariat sur le long terme" avec Athènes.

Le Premier ministre grec Kyriakos Mitsotakis, ardent partisan d'un retour de ces trésors archéologiques exposés depuis deux siècles à Londres, s'était dit "fermement convaincu" que les marbres du Parthénon reviendraient à Athènes. Mais, depuis les discussions n'ont pas semblé faire de progrès tangibles.

Une loi britannique de 1963 empêche le musée d'effectuer des restitutions.

La Grèce, qui réclame depuis des décennies le retour de ces précieuses frises détachées du Parthénon, est déterminée à retrouver son patrimoine. Les autorités grecques soutiennent qu'elles ont été l'objet d'un "pillage" orchestré en 1802 par Lord Elgin, ambassadeur britannique auprès de l'Empire ottoman.

Mais Londres affirme que les sculptures ont été "acquises légalement" par Lord Elgin, qui les a revendues au British Museum.

S.H. avec AFP