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Des milliers de patients privés de médecin après la fermeture brutale de centres de santé Sagéo

Le centre Sagéo d'Ivry-sur-Seine en août 2022

Le centre Sagéo d'Ivry-sur-Seine en août 2022 - Google Street View

Le Havre, Ivry-sur-Seine, Montigny-lès-Cormeilles, Ajaccio et Agen voient leurs centres de santé Sagéo fermer leurs portes après la liquidation judiciaire du groupe qui développait ces centres.

Clap de fin pour les pôles de santé Sagéo. Le tribunal de commerce de Paris a prononcé jeudi 13 février la liquidation judiciaire avec effet immédiat de la société créé en 2018. Cette décision entraîne la fermeture des sites du Havre (Eure), d'Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne), de Montigny-lès-Cormeilles (Val-d'Oise), d'Ajaccio (Corse du Sud) et d'Agen (Lot-et-Garonne).

Au Havre, ce lundi 24 février, des dizaines de patients faisaient la queue devant ce local situé du quartier Saint-Nicolas. Des secrétaires médicales restituaient les dossiers médicaux.

"Nous sommes venues sur la base du volontariat pour ne pas laisser tomber les patients", explique Karine Ménard, la responsable du centre à BFMTV.com.

Avec ses deux collègues, elles avaient eu vent des problèmes de la société, mais attendaient l'audience dans l'espoir d'une période d'observation ou d'une reprise. "On était dans le doute, nous avions eu mot que la situation n'était pas terrible. Nous ne pouvions pas communiquer", poursuit-elle.

10.000 patients concernés au Havre

Quand le couperet du tribunal de commerce est tombé, l'annonce a été communiquée aux patients via des affiches sur les portes des centres ainsi que des messages programmés sur le site de réservation Doctolib.

"Cela a provoqué un vent de panique. Ce sont 4.900 patients qui perdent leurs médecins généralistes, mais avec les spécialistes ça monte a 10.000", indique la responsable du centre du Havre.

Un collectif s'est constitué pour trouver une parade à cette fermeture avec une pétition. Les élus communistes locaux ont par ailleurs adressé une lettre ouverte au maire et ancien Premier ministre Édouard Philippe.

"L'ensemble de la patientèle de ce centre se retrouve désemparée, sans interlocuteur et sans perspective de prise en charge", écrivent-ils, tout en réclamant que la communauté urbaine étudie "rapidement" les conditions d'une reprise d'activité.

"Presque plus de généralistes"

C'est le même désarroi en région parisienne, comme à Ivry-sur-Seine où la plupart des professionnels de santé ont démissionné et se sont disséminés dans d'autres structures.

"C'est très pénible de trouver un nouveau médecin d'autant que les deux principaux étaient très appréciés. C'était super! À Ivry, il n'y a presque plus de généralistes, quelques vieux et une jeune au Centre Médical d'Ivry", déplore une patiente auprès de BFMTV.com.

Certains patients du centre d'Ivry-sur-Seine n'ont pas hésité à suivre un médecin qui s'est réinstallé à Massy dans l'Essonne, à une heure de transports en commun, pour conserver un suivi avec le même praticien.

Cette fermeture brutale intervient alors que le groupe Sagéo communiquait encore récemment sur de nouvelles ouvertures de centres dans le nord de la France au cours des mois à venir comme à Soissons, Melun, Dieppe, Bourges, Noisy-le-Grand, Sens ou Argenteuil.

Capture d'écran du site internet de Sagéo, qui prévoyait l'implantation de nouveaux centres médicaux.
Capture d'écran du site internet de Sagéo, qui prévoyait l'implantation de nouveaux centres médicaux. © Sagéo

Sur le papier, ces centres de santé pluridisciplinaires proposant des consultations avec des professionnels conventionnés secteur 1 en 100% tiers payant dans des territoires sinistrés avaient tout pour séduire. Mais la société qui avait ouvert son premier centre au Havre en 2020 n'était pas parvenue à respecter son plan de croissance de six à huit nouveaux centres par an.

Sagéo s'était installé dans des locaux grâce à un partenariat avec la Société foncière Bordelaise, un organisme de portage foncier qui réalise des opérations d'achat de foncier pour des collectivités et des sociétés. L'objectif d'une quarantaine de pôles de santé à l'horizon 2025 n'a jamais pu être atteint.

Florent Bascoul