"On se sent humiliés": ils prénomment leur bébé Kaymronne et subissent une vague de cyberharcèlement

L'histoire du petit Kaymronne avait tout pour faire rêver. Le nourrisson de 3,454kg a été le premier bébé à naître à Saint-Malo (Ile-et-Villaine) en 2024, le lundi 1er janvier peu après minuit. Un conte de fée qui s'est pourtant transformé en cauchemar pour la petite famille lorsqu'elle a été racontée deux jours plus tard dans Ouest France.
En quelques heures, l'orthographe du prénom choisi par le couple a été la cible de nombreuses moqueries sur les réseaux sociaux, où l'article était relayé. Kaymronne est qualifié de "pauvre gosse", ses parents de "beaufs", voire accusés de "maltraitance"...
"On se sent complètement humiliés", confient à BFMTV.com Johnny et Stessy, les parents du petit Kaymronne, qui étaient loin de se douter que cet article bienveillant serait à l'origine d'une vague de cyberharcèlement.
Johnny et Stessy ne comprennent pas en quoi le choix du prénom de leur enfant peut déranger les gens, alors que cette variation orthographique du prénom Cameron leur a tout de suite plu. Le couple explique avoir transformé le prénom d'origine afin qu'il s'inscrive dans la lignée de leurs deux autres filles, qui ont aussi des prénoms commençant par la lettre K: Kayla et Kenzianne.
"On nous a dit que c'était un prénom de chien, de cassos et j'en passe... C'est très pesant, on devrait être heureux actuellement et en fait tout le monde se moque de nous", déplore la mère de famille.
De plus en plus de singularité dans les prénoms
Depuis une réforme de 1993, les parents sont libres de prénommer leur enfant comme ils l'entendent, à quelques exceptions près - notamment qu'il ne soit pas "contraire à l’intérêt de l’enfant".
"Au fil des années, les parents se sont emparés de cette loi qui leur a ouvert le champ des possibles", explique Baptiste Coulmont, professeur à l'École normale supérieure (ENS) Paris Saclay et chercheur à l'Institut des sciences sociales du politique, spécialiste des prénoms.
"Ils laissent libre court à leur créativité car on est aujourd'hui très sensibles à l'idée que le prénom de l'enfant doit être relativement rare ou singulier ", explique le sociologue.
Et pour cause, "c'est un moyen de désignation beaucoup plus utilisé que le nom de famille aujourd'hui, ce qui n'était pas autant le cas il y a encore quelques décennies".
"On entend beaucoup de parents dire qu'il ne faudrait pas que deux enfants portent le même prénom dans une même classe", poursuit Baptiste Coulmont. Pour nombre d'entre eux, l'orthographe peut être un mode d'identification: "Certains choisissent un prénom relativement courant pour se fondre dans la masse, mais ils se distinguent malgré tout ou font sortir l'enfant du lot par la graphie spécifique de son prénom."
"Pourquoi tant de haine?"
Pour ce qui est de Kaymronne, la violence verbale est telle ces derniers jours que Johnny et Stessy ont été contraints de demander au journal régional de supprimer ses publications sur les réseaux sociaux. Le couple n'exclut pas d'aller porter plainte contre certains internautes si cela venait à se poursuivre.
"Pourquoi tant de haine?" s'interrogent les jeunes parents "dégoûtés", qui ne demandent qu'une seule chose aux internautes malveillants: "Arrêtez, s'il vous plaît. Nous n'avons rien demandé à personne, laissez-nous tranquilles."