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Société

Grande-Synthe: la préfecture du Nord condamnée à des mesures sanitaires pour les migrants

Le camp de Grande-Synthe.

Le camp de Grande-Synthe. - PHILIPPE HUGUEN / AFP

L'État va être contraint d'installer des points d'eau, douches et autres toilettes près d'un gymnase de Grande-Synthe, dans le Nord, où vivent plusieurs centaines de migrants.

Le Conseil d'Etat a enjoint vendredi à la préfecture du Nord d'installer des points d'eau, douches et sanitaires à proximité d'un gymnase de Grande-Synthe, autour duquel vivent quelque 700 migrants, et d'organiser des maraudes pour les informer de leurs droits.

La plus haute juridiction administrative donne un délai de huit jours au préfet pour installer ces équipements "en nombre suffisant" et "mettre en place des maraudes d'information (...) à l'occasion desquelles des documents dans les langues principales, dont le Sorani, seront remis aux migrants pour les informer de leurs droits", peut-on lire dans son ordonnance, consultée par l'AFP.

700 personnes autour et dans le gymnase

Saisi en référé par neuf associations rejointes par la commune de Grande-Synthe qui voyaient dans les "conditions de vie" de ces migrants et "l'inaction" de l'Etat une "violation de leurs droits fondamentaux", le Conseil d'Etat annule ainsi une décision du tribunal administratif de Lille datée du 9 mai.

"Depuis plus de dix ans, de très nombreux migrants", souhaitant rejoindre l'Angleterre, "sont présents sur le territoire de la commune de Grande-Synthe" et dans le bois du Puythouck. "En décembre 2018, la commune (...) a décidé, contre l'avis de l'Etat", d'ouvrir un gymnase pour les accueillir, ainsi qu'un autre local finalement fermé en mai, rappellent les sages dans cette ordonnance, estimant à 700 le nombre total de personnes installées "autour, à l'intérieur" du gymnase et dans le bois. "Il appartient (...) aux autorités titulaires du pouvoir de police générale" de veiller "à ce que le droit de toute personne à ne pas être soumise à des traitements inhumains ou dégradants soit garanti" argue le Conseil d'Etat, jugeant que "les équipements sanitaires du gymnase (...) sont manifestement insuffisants pour permettre l'accès à l'eau, notamment potable, et aux toilettes" à ces personnes, parmi lesquelles des mineurs non accompagnés.

"Contraindre l'État à participer aux dépenses" 

Par ailleurs, les maraudes organisées dans le bois de Puythouck "ne portent que marginalement sur le gymnase" et "une telle situation est constitutive d'une carence" dans les missions de l'Etat, considèrent les juges.

"C'est une véritable victoire (...). Le Conseil d'Etat reconnaît que l'Etat a failli à sa mission de protection. La commune de Grande-Synthe a du pallier sa carence" a réagi dans un communiqué l'avocat de la commune, Patrice Spinosi. 

La commune engagera également, "dans les semaines à venir, une action indemnitaire contre l'Etat pour le contraindre à participer aux importantes dépenses" engagées en vue de "l'accueil décent" des migrants, a-t-il annoncé.

"Le préfet du Nord prend acte" de cette décision, a-t-il indiqué dans un communiqué, notant toutefois que l'ordonnance "écarte de nombreux points" soulevés par les requérants, rejetant par exemple leur demande de "suspension des expulsions" ou l'injonction de mettre en place à Grande-Synthe des structures d'hébergement d'urgence.

Le Conseil d'Etat "donne acte à l'État de la bonne gestion des opérations de mise à l'abri sur la commune et notamment de la régularité de la mise en oeuvre du concours de la force publique lors des opérations d'expulsion", estime le préfet.

Jeanne Bulant avec AFP