Covid-19: pourquoi la prédominance du variant Omicron ne marque pas forcément la fin de l'épidémie

Pour Tyra Grove Krause, c'est le début de la fin. La cheffe du département d'épidémiologie de l'Institut national du Sérum du Danemark table sur une fin de l'épidémie de Covid-19 - du moins telle que nous la connaissons depuis mars 2020 - d'ici deux mois.
"Il y a encore beaucoup d'incertitudes autour de l'épidémie", a pondéré l'épidémiologiste sur la chaîne danoise Danish TV 2, "on peut imaginer qu'une fois que les mois de janvier et de février seront passés [...] la situation sera meilleure qu'avant l'arrivée d'Omicron. Je pense qu’on en a pour deux mois, et puis j’espère que l’infection commencera à se calmer et que nous retrouverons une vie normale", a-t-elle poursuivi.
Optimisme affiché de l'exécutif
En France aussi, les autorités jouent la carte de l'optimisme alors que le nombre de nouveaux cas quotidiens explose depuis une dizaine de jours. Dans les colonnes du Journal du Dimanche, le ministre de la Santé Olivier Véran n'a pas exclu que cette cinquième vague, portée un temps par le variant Delta et désormais par Omicron, soit "peut-être la dernière".
"Peut-être que cette vague nous permettra d'acquérir une forme d'immunité", a développé le membre du gouvernement.
Les dernières études qui relèvent la très forte contagiosité du variant Omicron mais aussi sa moindre virulence peuvent laisser entendre que les contaminations qu'il engendrera seront légion, mais que l'hôpital serait proportionnellement moins touché. Reste que ces prévisions ne sont pas les premières depuis l'émergence du Covid-19 et que d'autres variants pourraient prendre la place d'Omicron.
"On ne peut prédire que le virus a épuisé toutes ses capacités de mutations"
Alain Fischer ne veut pas croire à un scénario catastrophe. Le président du Conseil d'orientation de la stratégie vaccinale - alias "Monsieur Vaccin" du gouvernement - partage l'idée selon laquelle, par le variant Omicron, le virus n'empêchera bientôt plus les Français de reprendre une vie normale.
Avec un nouveau variant qui est "un peu plus transmissible (que ses prédécesseurs, NDLR) mais moins agressif, peut-être qu'on assiste à un début d'évolution vers un virus plus banal comme on en connaît d'autres", a-t-il lancé sur BFMTV.
Des propos qu'il a développés dans les colonnes des Échos, où il a estimé "possible qu'Omicron marque le début d'une évolution vers des variants moins sévères. Alors, l'Histoire nous mettra progressivement à l'abri".
"Omicron a douché nos espoirs en prenant des embranchements différents et en combinant une multiplicité de mutations. On ne peut prédire que le virus a épuisé toutes ses capacités de mutations", a toutefois tempéré l'immunologue. "Néanmoins, si la sélection du virus continue à se faire par une meilleure transmission, il n'est pas exclu qu'on soit au premier stade d'une évolution vers des formes moins sévères", a-t-il développé.
"Cette pandémie a montré son imprévisibilité"
L'épidémiologiste Antoine Flahault ne veut pas non plus crier victoire trop vite. Tout en rappelant que l'épidémie est loin d'être contrôlée en France et dans d'autres pays en Europe, il se refuse à toute projection à long terme.
"Cette pandémie a montré son imprévisibilité et je crois qu'on ne peut pas dire aujourd'hui que la pandémie est derrière nous après cette vague", met en garde le directeur l'Institut de santé globale de l'université de Genève en Suisse.
Invité à réagir aux propos de Tyra Grove Krause, la spécialiste danoise, il estime aussi que ce délai de deux mois se référait en réalité à la vague Omicron: "elle espère qu'après celle-ci il n'y aura plus de nouveaux variants qui viendront nous empoisonner notre existence. "On peut partager cet optimisme [...] peut-être que dans deux mois elle (l'épidémie, NDLR) sera derrière nous. Après qu'y aura-t-il?", s'interroge-t-il enfin.
Alerte de l'OMS
Renaud Piarroux juge quant à lui "possible" une sortie prochaine de la crise sanitaire mais reste très méfiant. Le chef du service de parasitologie à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière explique sur BFMTV que la forte contagiosité d'Omicron va de facto augmenter l'immunisation de la population et ainsi la prémunir face à d'autres variants.
"Il va y avoir une quantité encore plus importante qu'avant de nouveaux patients et donc une 'opportunité' plus importante de générer de nouveaux variants", alerte-t-il sur notre antenne. "Je ne dis pas qu'il va y en avoir, personne ne sait, mais on ne peut pas l'exclure."
Catherine Smallwood, une responsable des situations d'urgence à l'OMS, a averti mardi que la multiplication des cas d'Omicron dans le monde pourrait même accroître le risque d'apparition d'un nouveau variant plus dangereux du Covid-19.
"Plus Omicron se répand, plus il se transmet et plus il se réplique, plus il est susceptible de générer un nouveau variant", a-t-elle précisé. "Actuellement, Omicron est mortel, il peut causer la mort (...) Peut-être un peu moins que Delta, mais qui peut dire ce que le prochain variant pourrait générer?"
L'immunité naturelle ou vaccinale, un atout
"À terme, il y a de l'espoir", rassure Arnaud Fontanet dans le JDD. Mesuré, l'épidémiologiste espère que le Covid-19 perdra en virulence et qu'il rejoindra avec le temps "les autres coronavirus saisonniers humains qui nous donnent des rhumes et des angines chaque hiver".
"Nous n'y sommes pas encore", a-t-il cependant averti, "on peut s'attendre à ce que de nouveaux variants émergent mais, notre immunité se renforçant avec le temps, soit par infection naturelle, soit avec des doses de rappel du vaccin, leur capacité à donner des formes sévères va diminuer", a-t-il prédit.
De là à atteindre une immunité collective suffisante pour freiner définitivement le nombre de contaminations? Antoine Flahault affiche ses doutes: "en revanche on a clairement une digue qui nous protège bien des hospitalisations et des formes graves". Pour Renaud Piarroux, là est "peut-être le bon côté" de cette cinquième vague.