BFMTV
Santé

Australie: une étude sur l'impact de l'endométriose sur la vie sexuelle des hommes déclenche un tollé

Un couple dans le jardin des Tuileries le 11 juillet 2015 à Paris.

Un couple dans le jardin des Tuileries le 11 juillet 2015 à Paris. - LUDOVIC MARIN / AFP

Alors que l'endométriose touche plus d'une femme sur 10 en âge d'avoir des enfants et ne fait l'objet que de rares recherches, une étude sur son impact sur le bien-être sexuel des hommes a été lancée à l'université de Sydney. Plusieurs patientes ont manifesté leur colère sur les réseaux sociaux.

Tout est parti d'un tweet. Imogen Dunlevie, une jeune Australienne souffrant d'endométriose depuis l'âge de 13 ans, a posté mardi sur Twitter une longue séries de messages pour dénoncer une étude sur laquelle elle est tombée mardi. Une élève de philosophie de l'Université de Sydney a décidé de lancer une recherche sur l'impact de cette maladie gynécologique touchant plus d'une femme sur 10 en âge de procréer... sur le bien-être sexuel des hommes.

"Jane Keany enquête sur les hommes dont la compagne souffre pendant les rapports sexuels à cause de l’endométriose, et sur la façon dont ça influe sur leur vie sexuelle à eux", précise l'étude.
"Je souhaite interroger des hommes actuellement en couple avec une femme atteinte d'endométriose et de douleurs pendant les rapports sexuels", explique l'étudiante. 

Autant d'endométriose que de diabète, mais 95% de fonds en moins

L'endométriose, qui se caractérise par la présence de tissus semblables à la muqueuse utérine en dehors de l'utérus, provoque de très vives douleurs chez les patientes qui en souffrent. Pendant les règles ou en dehors, et très souvent pendant les rapports sexuels. Elle est aussi la première cause d'infertilité chez les femmes.

Malgré cela, très peu de fonds sont alloués à la recherche sur cette maladie, qui n'est diagnostiquée en moyenne qu'au bout de 7 ans. De quoi provoquer la "rage aveugle" d'Imogen Dunlevie et de nombreux autres internautes qui se sont manifestés à la suite de son premier message.

"Votre partenaire est atteinte d'une des maladies les plus douloureuses, désagréables et difficiles à aborder, mais assez parler d'elle, comment allez-vous?", ironise par exemple une internaute, réagissant à l'étude. 
"Ce serait quelque chose si la maladie était bien étudiée et qu'il n'y avait plus rien à chercher, mais c'est putain de ridicule", s'indigne un autre utilisateur de Twitter.
"Je ne sais pas si je dois rire ou pleurer, mais ce que je ressens n'a pas vraiment d'importance. *Se tourne vers l'homme le plus proche* Comment te sens-tu?", écrit une autre. 

Pas de causes ni de remèdes connus

Dans une tribune publiée sur le Guardian, la jeune femme a expliqué en détail les raisons de son indignation. "Une grande partie de la lutte contre l'endométriose réside dans le fait que la maladie soit si peu comprise", explique-t-elle. "Les chercheurs ne connaissent toujours pas les causes de la maladie et il n'existe pas de remède. Les traitements ont une efficacité variable", ajoute-t-elle.

Et de rappeler qu'autant de femmes souffrent d'endométriose que de diabète. Mais les fonds alloués à l'endométriose représentent 5% de ceux consacrés au diabète. 

"Vu le très peu d'attention et de fonds dont bénéficie l'endométriose, c'est rageant de voir quelqu'un conduire une étude sur la manière dont la maladie influe sur les hommes", regrette-t-elle.

L'auteure défend son étude

Imogen Dunlevie estime que bien d'autres éléments devraient faire l'objet de recherches, et dénonce le manque de crédibilité attribuée à la parole des femmes, qui sont nombreuses à s'être plaintes de douleurs pendant des années avant d'être véritablement entendues. La jeune femme se décrit comme chanceuse, ce n'est qu'au bout de deux ans qu'elle a été diagnostiquée, alors que les douleurs étaient telles qu'elles l'empêchaient certains jours de marcher. 

Jane Keany, à l'origine de l'étude, défend le bien-fondé de sa démarche. Dans une interview à ABCelle explique avoir anticipé des réactions de ce type, mais campe sur ses positions, estimant qu'un tel travail de discussion avec les hommes pourrait aider les femmes souffrant d'endométriose. Elle espère "ouvrir la conversation plus amplement" et considère que la maladie n'est pas un problème de femme mais "un problème de couple".

"Certains hommes déclarent avoir vraiment peur d'exprimer leurs envies sexuelles parce que leur partenaire va mal (donc) ils doivent juste mettre leurs envies de côté", explique-t-elle. 

"La vie sexuelle des femmes est beaucoup plus affectée"

Imogen Dunlevie explique quant à elle ne pas blâmer personnellement l'auteure de l'enquête, mais s'indigne du traitement global qui est fait de la maladie. 

"La vie sexuelle des femmes est beaucoup plus affectée par l'endométriose que celle des hommes, et si une étude est conduite dans ce domaine, elle devrait s'intéresser à la manière dont les femmes et leur vie sexuelle sont touchées", poursuit la jeune femme, qui explique que la maladie touche tous les aspects de la vie des patientes.

Charlie Vandekerkhove