Valls-Taubira : policiers et magistrats choisissent leur camp

Le ministre de l'Intérieur a envoyé une lettre à François Hollande pour lui demander de trancher. - -
Le point de non-retour a-t-il été atteint entre Manuel Valls et Christiane Taubira ? Oui, à en croire les révélations faites mardi par le journal Le Monde. Le quotidien publie le contenu d'une note adressée par Manuel Valls à François Hollande le 25 juillet dernier. Dans ce texte, il est question de la future réforme de la procédure pénale, portée par Christiane Taubira. Le ministre de l'Intérieur s'adresse au chef de l'Etat : « J'attire votre attention sur les désaccords (...) autour du projet de réforme pénale présenté par le ministère de la Justice ». « La quasi-totalité des dispositions de ce texte a fait l'objet de discussions, voire d'oppositions du ministère de l'Intérieur », poursuit-il.
« Une phase normale d'échanges »
Christiane Taubira n'a, en tout cas, pas apprécié que Manuel Valls en appelle au Président, sans même la prévenir. « Je ne peux que m'étonner qu'un tel document ne m'ait pas été communiqué », déclare la Garde des Sceaux dans Le Monde. Pas de commentaires de L'Elysée. Matignon essaie de relativiser, en évoquant « une phase normale d'échanges préalables avant les arbitrages ». Mais au-delà des ministères, syndicats de policiers et magistrats s’opposent aussi sur la marche à suivre.
« Cela se traduirait par une explosion de la délinquance »
Patrice Ribeiro, secrétaire général de Synergie-Officiers (second syndicat d'officiers de police) estime pour sa part que « le ministre de l’Intérieur est dans le vrai, la réalité, pas dans la dénégation comme madame Taubira ». Selon lui, « considérer que la prison créé la délinquance et la récidive, c’est prendre la chose à l’envers, c’est considérer qu’on est encore une fois dans la culture de l’excuse et bannir la prison comme pilier et socle de la politique pénale. Si la réforme venait à passer, cela se traduirait sur le terrain par une explosion de la délinquance, notamment en ce qui concerne les multirécidivistes, et ce ne sera plus contrôlable ».
« Arrêter d'avoir la prison comme seule peine possible »
« Il faut arrêter d’avoir la prison comme seule peine possible », lui répond Françoise Martre, présidente du Syndicat de la Magistrature, qui soutient Christiane Taubira. « La réforme a comme ambition de revenir sur les peines automatiques et d’imaginer autre chose, un autre accompagnement pour les condamnés, parce qu’un condamné qui bénéficie d’un suivi a moins de chances de récidiver qu’un condamné qui fait de la prison sèche. C’est pour ça que nous soutenons la réforme pénale voulue par Christiane Taubira, qui doit absolument voir le jour ».