Mal-logement : la situation s’aggrave, selon la Fondation Abbé Pierre

Le rapport de la Fondation Abbé Pierre dénonce le manque de souplesse des aides au logement. - -
C’est, chaque année, de pire en pire. Selon le 18e rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre, le mal-logement en France s'aggrave encore face à une crise qui s'accentue et s'élargit. La Fondation Abbé Pierre évalue à plus de 3,6 millions le nombre de personnes mal-logées ou sans abri, et plus largement à près de 10 millions celles qui sont concernées par la crise du logement. Principaux touchés : les familles monoparentales et les ménages en milieu rural.
Premier constat, il n'y a toujours pas assez de logements sociaux, et l'offre ne s'adapte pas aux mutations de de la famille : il faudrait notamment faciliter la mobilité au sein du parc social en cas de séparation. Les APL, les Aides personnalisées au logement, sont aussi pointées du doigt pour leur manque de réactivité et de souplesse. En effet, seul un des deux parents touche l'APL, par exemple, en cas de garde alternée, ce qui pénalise souvent le père. Et ne croyez pas que seuls les parisiens sont concernés : la Bretagne souffre d’insalubrité, la région lyonnaise de pénurie, et les loyers sont trop chers par rapport aux revenus dans le Nord.
« On ne sait pas où on va »
Souvent trop chers, parfois en mauvais état, les logements deviennent de plus en plus inaccessibles en ville. Emilie a ainsi dû s’installer à une trentaine de kilomètres de Lyon, à Béligneux, dans l’Ain, il y a deux ans. Et même là, les lieux étaient loin d’être salubres. « Des trous dans les murs, des sols pourris, avec beaucoup d’humidité. Au total, tout à refaire, du sol au plafond ». Difficile, pourtant, d'isoler une maison avec un salaire de 1400 euros par mois. Pour Philippe, son compagnon, c’est donc système D : « Trois couvertures. On a la chambre juste au-dessus d’une cave qui donne sur l’extérieur, donc le froid remonte. En trois ou quatre mois, on a dû dépenser environ 4000 litres de fioul, soit à peu près 4000 euros. Pour les travaux, tout est en arrêt. Ma peur principale, c’est de ne plus pouvoir rembourser le prêt. Concrètement, on ne sait pas où on va ».
« On peut traiter ça en amont »
Selon Patrick Doutreligne, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, « la crise a révélé des ménages plus fragiles, bien sûr principalement les familles monoparentales, essentiellement des mères avec enfants. C’est difficile de s’occuper des enfants, trouver un emploi et payer son loyer dans un marché du logement extrêmement cher, donc on se retrouve avec des couples divorcés qui continuent de vivre ensemble faute de trouver un logement pour l’un des deux conjoints. Ce qu’il faut, c’est éviter qu’ils basculent dans cette précarité. On peut traiter ça en amont, ou en tout cas au moment où le phénomène se produit », espère-t-il.