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"Une vraie déception": pourquoi le gouvernement abandonne les deux heures de sport en plus au collège

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La volte-face de l'exécutif qui avait promis de "préparer les champions de demain" en offrant aux collégiens volontaires de faire deux heures de plus de sport par semaine ne passe pas. Elle s'inscrit dans un contexte plus large de dispositifs qui peinent à décoller, comme les 30 minutes de sport par jour à l'école primaire.

Une promesse enterrée quelques mois seulement après les Jeux olympiques. Testée depuis 2 ans, la volonté d'Emmanuel Macron de permettre à tous les collégiens volontaires de faire deux heures de sport en plus au collège en 2026 n'aboutira pas.

Ce dispositif sera "recentré sur les seuls établissements en éducation prioritaire", indique une circulaire de l'Éducation nationale publié mi-novembre, très loin donc de la volonté du chef de l'État qui avait "promis de préparer les champions de demain" et de "construire une nation sportive".

7.500 élèves concernés

Exit donc la généralisation aux 7.000 collèges de l'Hexagone et cap sur les seuls collèges classés en REP/REP+, là où le nombre de licenciés sportifs par département est le plus faible.

Le dispositif avait été mis en place à la rentrée scolaire 2023 dans 700 collèges après une expérimentation dans une centaine d'établissements en 2022. Seule une poignée d'élèves en ont bénéficié ces derniers mois - 7.500 d'après un rapport parlementaire sur les crédits de la mission sport.

"C'est une vraie déception, bien sûr", reconnaît un député macroniste qui a suivi de près le dossier ces dernières années, auprès de BFMTV.com.

Dans un contexte de forte restriction budgétaire pour tous les ministères, l'Éducation nationale avait-elle vraiment le choix ? "La généralisation" des 2 heures de sport supplémentaires "à l'ensemble des 7.000 collèges n'apparaît pas soutenable", reconnaît d'ailleurs le ministère dans sa circulaire.

Un dispositif qui n'arrive pas à toucher les collégiens loin du sport

La mesure a jusqu'ici coûté 145 millions d'euros par an, d'après les chiffres des députés.

Restreindre le dispositif a également le mérite de pouvoir concentrer les efforts alors que les collèges concernés ont rapidement fait remonter au ministère que nouer des partenariats avec des fédérations sportives pour attirer les élèves les plus éloignés du sport s'avérait très compliqué.

Et pour cause: le programme, basé sur le volontariat des élèves, attirait des collégiens déjà pratiquants dans un club. Autant dire que la mesure n'a pas vraiment trouvé son public - un bon argument à avancer pour la ministre de l'Éducation nationale.

"Nous l'adaptons pour la rendre plus efficace, plus juste", a expliqué Anne Genetet sur X.

Agacement parmi les champions olympiques

Le dispositif cherche toujours à attirer "des collégiens qui ne sont inscrits ni en club ni à l’association scolaire, avec une attention particulière pour les jeunes filles et les jeunes en situation de handicap", peut-on lire dans la circulaire.

Et tant pis si cette annonce agace plusieurs gagnants des JO comme le nageur Léon Marchand ou le pongiste Simon Gauzy. Le ministre des Sports, Gil Avérous, présent ce vendredi aux côtés de Léon Marchand pour le lancement du projet de la Cité de la natation à Toulouse, a de son côté essayé de convaincre.

"On a une nouvelle manière de faire de la politique. Désormais quand on met en place un dispositif, on l’évalue, on le recentre, on le modifie, on l’adapte en fonction des retours du terrain", a défendu le ministre.

"On met le paquet pour essayer d’aller où le besoin est le plus fort" dans les quartiers qui accueillent des collèges REP et REP +, défend encore Gil Avérous, promettant de "refaire une évaluation du dispositif après.

Les 30 minutes de sport par jour en primaire à la peine

Problème: l'abandon de la généralisation des deux heures de sport au collège s'inscrit dans un contexte plus large. Les 30 minutes de sport par jour à l'école primaire, le second dispositif lancé dès 2020 pour créer "la génération 2024" pour reprendre les mots du chef de l'État, ont eux aussi du plomb dans l'aile.

En septembre 2023, 51% des écoles appliquaient le dispositif d'après des chiffres du ministère de l'Éducation nationale. Un rapport sénatorial évoque, lui, 42% des écoles concernées à la rentrée 2024 seulement.

Contraintes de planning alors que la mesure n'apparaît pas dans les emplois du temps, bruit que peut produire l'activité physique pendant que les autres élèves sont en classe, manque de matériel... Les raisons sont nombreuses.

Sans guère freiner les ardeurs d'Emmanuel Macron qui réclame à la même rentrée scolaire à volonter "à terme d'avoir une heure de sport par jour" à l'école. La mesure pour l'instant n'est pas appliquée.

"C'était très ambitieux, on l'a tout de suite su. Mais il faut aussi des annonces politiques fortes pour amener les gens", analyse un ancien conseiller de l'ex ministre des Sports Roxana Maracineanu.

Le budget des subventions pour favoriser l'inscription en club rabotée

Quant à l'utilisation du Pass Sport, une aide de 50 euros versée aux jeunes de 6 à 30 ans - sous conditions de ressources - pour s'inscrire dans un club sportif, elle est en demi-teinte.

Alors qu'elle pourrait potentiellement toucher plus de 5 millions de personnes, 1,5 millions de personnes en ont bénéficié. Un chiffre "faible" avait reconnu la ministre des Sports de l'époque Amélie Oudéa-Castéra. L’enveloppe inscrite au budget de l'État est de 74,5 millions d’euros, contre 85 millions en 2024.

Marie-Pierre Bourgeois