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Harlem Désir à l'Europe, un mauvais sigal

Harlem Désir jeudi à Matignon, où il a été nommé officiellement secrétaire d'Etat aux Affaires européennes.

Harlem Désir jeudi à Matignon, où il a été nommé officiellement secrétaire d'Etat aux Affaires européennes. - -

INTERVIEW - Le nouveau secrétaire d'Etat aux Affaires européennes, Harlem Désir, est le 12e en 12 ans à occuper ce poste. Qu'est-ce qui explique un tel changement? Pourquoi ce poste est-il devenu une variable d'ajustement? Tentative d'explication avec Pascale Joannin, de la fondation Robert Schuman.

Nommé secrétaire d'Etat aux Affaires européennes mercredi, l'ancien premier secrétaire du PS Harlem Désir est le douzième à occuper ce poste en 12 ans. Un député européen connu pour son manque d'assiduité à Bruxelles.

De remaniement en changement de majorité, les ministres délégués ou secrétaires d'Etat se sont succédé dans ce qui ressemble à un placard doré. Ce poste est-il devenu une coquille vide dans une Europe à 28? BFMTV.com a posé la question à Pascale Joannin, directrice générale de la Fondation Robert Schuman.

Que pensez-vous de la nomination d'Harlem Désir au poste de secrétaire d'Etat aux Affaires européennes?

Cela montre le peu de cas que les gouvernements depuis 12 ans manifestent sur l'Europe. Je ne fais aucun commentaire sur les personnes, que ce soit Harlem Désir ou son prédécesseur Thierry Repentin, ni à Bernard Cazeneuve, mais on constate que depuis 12 ans, les secrétaires d'Etat aux Affaires européennes s'enchaînent.

Aujourd'hui, le poste européen du gouvernement est devenu une variable d'ajustement. Il change à chaque remaniement. Du coup, le secrétaire d'Etat a à peine le temps de connaître un peu les mécanismes, qu'il doit déjà partir! Ça donne une image déplorable de la France en Europe. Les autres ministres européens, qui changent beaucoup moins que nous, nous regardent en se demandant qui sera le prochain… Comment travailler avec eux, ensuite?

Mais en quoi consiste ce poste exactement?

On remarque déjà que jamais l'Europe n'a été un ministère plein. C'est à chaque fois un ministère délégué ou un secrétariat d'Etat, rattaché au ministre des Affaires étrangères, alors qu'il touche de plus en plus à des sujets "intérieurs", donc interministériels. Il devrait donc plutôt être rattaché au Premier ministre.

Le secrétaire d'Etat représente la France auprès des institutions européennes à Bruxelles. Il s'occupe des Affaires générales, hors des conseils "spécialisés", comme par exemple l'agriculture ou les finances. Mais il va aussi à Strasbourg, où siège le Parlement européen, pour expliquer la position de la France. Il met de l'huile dans les rouages, fait entendre la voix de la France, et comme il travaille avec tous les ministres, il devient aussi celui qui peut faire avancer tel ou tel dossier auprès du Premier ministre.

Le manque de pouvoir de ce poste peut-il aussi expliquer la valse des ministres?

C'est vrai qu'il a peu de pouvoir, mais il devrait en avoir plus, puisque de plus en plus de dossiers sont européens. Même dans le domaine du social, où les Etats ont gardé leur souveraineté, il y a des choses à faire. Mais aussi dans le domaine du climat, de l'environnement, de la jeunesse, de l'aide au développement, de la stratégie, etc.

Le problème est aussi politique. Chacun des grands partis se dit européen, mais a finalement peu de position sur l'Europe. Ils se retrouvent aussi bloqués par leurs différentes composantes internes. Certains sont plus pro-européens que d'autres, au sein du PS autant qu'à l'UMP. Et une fois au pouvoir, il faut composer avec les différentes tendances, et trouver des compromis.

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Propos recueillis par Ariane Kujawski