Nouvelle allocution de Macron: l'opposition accuse le chef de l'État d'utiliser le Covid-19 pour faire campagne

Le président Emmanuel Macron s'exprime devant la presse dans la cour de l'Elysée, à Paris, le 3 novembre 2021 - GEOFFROY VAN DER HASSELT © 2019 AFP
Une cinquième vague serait-elle une "bonne" nouvelle politique pour le président de la République? Alors qu'Emmanuel Macron est attendu ce mardi soir pour une allocution qui traitera notamment de la situation sanitaire, en pleine période de dégradation des indicateurs de l'épidémie, les politiques reprochent à l'Élysée d'utiliser l'épidémie comme une rampe de lancement vers la campagne présidentielle.
"Nous soupçonnons le pouvoir d'être prêt à tout", a ainsi jugé Jean-Luc Mélenchon (LFI) lors d'une conférence de presse ce lundi. "Nous sommes dans une mise en scène sur la question sanitaire" d'un "président en campagne", a estimé de son côté Julien Bayou (EELV) sur France 2 le week-end dernier. "Il a trouvé un bon moyen de faire durer le feuilleton", a analysé de son côté Louis Aliot (RN), sur France info ce vendredi.
Marcher à nouveau sur sa jambe gauche
"Il faut reconnaître que le Covid lui a permis de rééquilibrer son image. En s'appuyant sur l'État-providence, en trouvant toutes les vertus à la relance, en sortant massivement le carnet de chèques ces dernières semaines, il a pu renouer avec son électorat de centre-gauche qui lui a permis de gagner 2017. C'est intéressant parce qu'au début de son mandat, la France qui l'a élu l'a trouvé bien plus à droite que ce qu'elle imaginait", estime Olivier Rouquan, politologue et chercheur associé au CERSA (Centre d'Etudes et de Recherches de Sciences Administratives et Politiques) pour BFMTV.com.
Et pour cause: vaste plan de relance, chèque inflation, un budget renforcé dans la police, ou encore un grand plan pour Marseille: le chef de l’État a multiplié les annonces de financement depuis cet été.
"Je ne suis pas convaincu que cette nouvelle séquence soit une bonne nouvelle pour lui. De nouvelles contraintes sanitaires sont toujours pénibles, difficiles à accepter. La situation économique est plutôt bonne, l'État a mis beaucoup la main à la poche ces derniers temps et je ne vois pas quel intérêt retire Emmanuel Macron à devoir à nouveau faire face à un coût économique et social potentiellement lourd", nuance de son côté Nicolas Tenzer, le président du Centre d’étude et de réflexion pour l’action politique (CERAP).
Bien conscient de la ligne de crête sur lequel il évolue, Emmanuel Macron ne devrait annoncer, d'après nos informations, ni confinement ni couvre-feu ce mardi. La grande inconnue concerne le pass sanitaire. L'exécutif pourrait en effet le conditionner à la troisième dose pour le public éligible.
Se placer au-dessus de la mêlée
Au-delà des annonces qu'il fera ou non, c'est aussi le positionnement et la vision que le politique va donner pour les prochains mois qui sera particulièrement scrutée.
"Il va chercher à endosser le costume du président protecteur, du chef qui veille à ce que ses concitoyens se sentent en sécurité sur le plan sanitaire mais aussi économique et social. Toute l'idée est d'apparaître au travail, au service des Français pendant que les candidats à la présidentielle, eux, s'agitent", avance de son côté Arnaud Benedetti, professeur associé à l'Université Paris-Sorbonne.
Le jour de l'allocution d'Emmanuel Macron a d'ailleurs été soigneusement choisi. C'est à la fois le lendemain du premier débat LR et la date anniversaire de la mort de Charles de Gaulle.
Convaincre de sa capacité à encore réformer
Le locataire de l'Élysée devrait également profiter de son discours pour faire le service après-vente des réformes entreprises depuis septembre, tout particulièrement le revenu d'engagement, qui va permettre aux jeunes de 16 à 25 ans qui ne sont ni en emploi, ni en études ni en formation de toucher 500 euros. Il abordera également la question des retraites.
L'incertitude règne encore: Emmanuel Macron dégainera-t-il une partie de la réforme des retraites avant la fin de son mandat? Le climat social tendu actuel pourrait l'en dissuader, tout comme le calendrier parlementaire. L'Assemblée nationale et le Sénat arrêteront de siéger fin février.
"Je doute qu'il annonce la moindre réforme. On n'a jamais vu un président réformer 6 mois avant une élection présidentielle. Mais c'est une vraie déception pour son électorat. Il s'est pris de plein fouet la crise des gilets jaunes puis le Covid-19, l'empêchant de déployer ses velleités réformatrices", analyse Nicolas Tenzer.
Le point de vue est partagé par Arnaud Benedetti. "Son vrai problème politique, c'est que le bloc électoral qui le soutient est attaché aux réformes et que les crises qu'il a dû gérer ont remis profondément en cause son logiciel libéral. Il va devoir aller convaincre qu'il est bien toujours l'homme de la situation, qu'il peut garder ses accents réformateurs", décrypte encore Arnaud Benedetti.
D'après le dernier sondage Elabe pour BFMTV et L'Express en partenariat avec SFR, le chef de l'État fait toujours la course en tête des intentions de vote (entre 23 et 26% selon les scénarios). Il a cependant perdu 2 à 3 points depuis le mois d'octobre.