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Politique

Des policiers au dessus des lois ?

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Les policiers qui abusent sont trop peu souvent punis en France. C'est ce qu'affirme, témoignages à l'appui, un rapport d'Amnesty International. Les autorités et les syndicats de police démentent.

« Des policiers au-dessus des lois ». C'est le nom d'un rapport publié par Amnesty International jeudi 2 avril. L'organisation y dénonce l'impunité dont bénéficient selon elle, des membres des forces de l'ordre françaises, accusés de graves violations des droits de l'Homme, au travers de 12 exemples d'abus. Selon Amnesty, les plaintes déposées contre des agents de la force publique pour passages à tabac, homicides, injures racistes et usages abusifs de la force ne sont « pas souvent suivies d'enquêtes effectives », et leurs responsables « rarement traduits en justice ». Des accusations démenties par les ministères de la Justice et de l'Intérieur, et les syndicats de policiers. Déplorant le manque de statistiques concernant les violences commises par les représentants de l'ordre, Amnesty réclame des enquêtes indépendantes.

« Même les magistrats disent que porter plainte ne sert à rien »

« Trop souvent il n'y a pas d'enquête », déplore Patrick Delouvin, directeur du pôle France d'Amnesty International. « Trop souvent nous entendons dire, des victimes, des avocats, des magistrats même, que ça ne sert à rien de porter plainte, qu'il n'y aura pas de résultats. Effectivement, trop souvent nous constatons que des dossiers sont classés sans suite. Et c'est évident, il y a un faible taux de comparution en justice des responsables. » Et le directeur d'Amnesty en France de constater avec amertume : « Pas d'amélioration depuis notre dernier rapport en 2005 : les victimes d'abus et de violences policières n'ont pas la possibilité de porter plainte et d'avoir droit à une enquête indépendante et impartiale. »

Albertine, victime d'une « bavure policière »

Albertine Sow et son frère Fele estiment avoir été victimes de violence policière en août 2006. Alors enceinte de 7 mois, comme elle l'avait fait remarqué aux policiers à l'époque, Albertine assiste à l'interpellation de son cousin et demande des explications aux policiers : « L'un d'eux m'a répondu : tu dégages ou je te fous mon point dans la gueule ! Le ton a monté, j'ai commencé à crier parce qu'il me bousculait, il m'a donné un coup de poing. » Son frère, arrivé à ce moment là, raconte : « j'ai vu ma sœur et mon cousin menotté au sol ; j'ai demandé "qu'est-ce qui se passe ?". Le policier a sorti sa bombe lacrymogène et demandé à son collègue "est-ce que je le gaze ?". Son collègue a dit oui. Bombe lacrymogène sur tout le monde. » La plainte d'Albertine contre les policiers a été classée sans suite mais la jeune femme, reconnue coupable d'avoir agressé trois policiers, a été condamnée à 1 mois de prison avec sursis, et son frère à 6 mois fermes. Ils ont fait appel.

Des policiers pas soutenus psychologiquement

Pour éviter ce genre de dérapages dans la police, Yannick Danio, porte-parole de l'UNSA, 1er syndicat des gardiens de la paix, demande « des professionnels plus présents dans les commissariats et ne pas hésiter à les faire venir sur le terrain avec les policiers pour qu'ils se rendent compte de la difficulté du métier. La formation continue est laissée à l'abandon dans la police nationale, poursuit-il, et les cellules de soutien psychologique ou de débriefing sont encore à l'état embryonnaire chez nous. Ça n'existe pas ou ça existe trop peu. »

La rédaction, avec Aurélia Manoli