Non-lieu dans l'affaire du chlordécone aux Antilles: un avocat des victimes annonce faire appel

Une femme porte un t-shirt "Tous contre le chlordécone" près d'un barrage routier à La Boucan à Sainte-Rose, à la Guadeloupe, le 29 novembre 2021 - Christophe ARCHAMBAULT © 2019 AFP
La justice a prononcé un non-lieu dans l'enquête sur l'empoisonnement à vaste échelle lié à l'utilisation du chlordécone aux Antilles françaises. Si les magistrates instructrices reconnaissent un "scandale sanitaire", elles prononcent un non-lieu, évoquant la difficulté de "rapporter la preuve pénale des faits dénoncés", "commis 10, 15 ou 30 ans avant le dépôt de plaintes", la première l'ayant été en 2006.
Une décision dénoncée auprès de FranceInfo par Harry Durimel, l'avocat historique des victimes et maire de Pointe-à-Pitre, en Guadeloupe, qui annonce "faire appel de cette ordonnance."
"Si la Cour d'appel ne nous donne pas raison, nous ferons un pourvoi en cassation. Nous sommes déterminés à aller jusqu'à la Cour de cassation et à la Cour européenne de justice pour que justice nous soit rendue", assure-t-il.
"Un État de droit ne peut pas dire qu'il y a un non-lieu face à une injustice d'une telle gravité" explique à FranceInfo l'avocat, qui affirme que "c'est par la presse" que les associations de victimes en Outre-mer ont appris la décision de justice.
Impossibilité de "caractériser une infraction pénale"
Pour justifier le non-lieu, les magistrates avancent divers obstacles liés au droit, à son interprétation et son évolution depuis l'époque d'utilisation du chlordécone. Elles attestent de leur "souci" d'obtenir une "vérité judiciaire", qui a toutefois abouti à une impossibilité à "caractériser une infraction pénale".
Utilisé dans les bananeraies pour lutter contre le charançon, le chlordécone a été autorisé en Martinique et en Guadeloupe jusqu'en 1993, sous dérogation, quand le reste du territoire français en avait interdit l'usage.
Il a provoqué une pollution importante et durable des deux îles et est soupçonné d'avoir provoqué une vague de cancers. Il n'a été banni des Antilles que 15 ans après les alertes de l'Organisation mondiale de la santé.
Selon Santé publique France, plus de 90% de la population adulte des deux îles est contaminée par ce pesticide.