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Police-Justice

Les contradictions d'Alexandre Benalla sur son port d'arme pendant la campagne présidentielle

Alexandre Benalla, le 19 septembre 2018 à la Commission d'enquête du Sénat à Paris.

Alexandre Benalla, le 19 septembre 2018 à la Commission d'enquête du Sénat à Paris. - Alain Jocard - AFP

Alors que l'ancien collaborateur d'Emmanuel Macron, dont le rôle précis est encore flou, affirmait qu'il n'avait pas l'autorisation de porter une arme pendant la campagne présidentielle, Mediapart révèle ce mardi une image où il pose avec une femme, arme à la main.

Depuis quand et dans quelles conditions Alexandre Benalla était-il autorisé à porter une arme? Contre toute attente, au fur et à mesure des déclarations, des auditions et des nouveaux éléments, le voile s'obscurcit devant les autorisations dont disposait ce collaborateur d'Emmanuel Macron, mis en examen pour des violences présumées le 1er mai. Ce mardi, une photographie dévoilée par Mediapart vient mettre à mal la version d'Alexandre Benalla, qui affirme n'avoir pas porté d'arme pendant des déplacements lors de la campagne présidentielle.

Le 19 septembre dernier, devant les sénateurs réunis en Commission d'enquête, ce chargé de mission au rôle encore bien flou affirmait n'avoir eu l'autorisation de porter une arme qu'en octobre 2017. Une déclaration corroborée par le ministre de l'Intérieur, devant cette même Commission, et par un arrêté de la préfecture de police dévoilé par Le Point.

Deux refus de port d'arme, notamment pendant la campagne

Cette autorisation lui avait été refusée au moins deux fois par le passé par le ministère de l'Intérieur, notamment lors de la campagne.

"Il a été refusé à deux reprises par le ministère de l’Intérieur sur des motifs administratifs (…) même si, un moment, sur le premier port d’arme est intervenue une décision de Frédéric Aureal, chef du SDLP qui n’a pas souhaité que je puisse porter une arme durant cette campagne présidentielle", a même précisé Alexandre Benalla lors de son audition, dans des propos rapportés par Public Sénat.

S'ils ne s'accordent pas sur la raison de ce port d'arme une fois Alexandre Benalla à l'Elysée (pour des raisons de sécurité personnelle selon l'intéressé, pour une "mission de police" et de "coordination de la sécurité" d'après la préfecture), tous s'entendent sur le fait qu'elle a été délivrée après l'élection d'Emmanuel Macron.

Et donc, pendant la campagne, Alexandre Benalla n'était pas censé détenir d'arme. En juillet dernier, le collaborateur faisait déjà mention au Monde d'une autorisation de détention d'arme au quartier général d'En Marche!, à Paris, délivrée par la préfecture de police. A la question du quotidien lui demandant s'il n'était jamais sorti avec, Alexandre Benalla répondait: "Non, jamais. On n’est pas mabouls, il y a un risque pour la réputation du candidat…"

Une photographie compromettante

Pourtant, il semblait bien disposer d'une arme le 28 avril 2017 à Poitiers, dans la Vienne. Dans un cliché révélé par Mediapart, que le site d'information considère comme authentique, le jeune homme pose avec deux hommes et une serveuse au visage flouté, une arme à la main. La scène se serait déroulée dans un restaurant à quelques kilomètres de Châtellerault, où Emmanuel Macron venait de tenir un meeting.

L'ex-directeur du restaurant, qui ne se trouvait pas dans l'établissement ce soir-là mais a été contacté par sa serveuse, a confirmé les faits à un correspondant de l'AFP.

"Selon elle, l'équipe de Macron et ses gardes du corps étaient très sympas. Elle a évoqué le selfie. J'ai trouvé que c'était dangereux pour la personne en question, pour Benalla, de faire ça, qu'il pouvait perdre son travail. J'ai trouvé ça un peu pathétique, pour un garde du corps de Macron, de faire des selfies avec une serveuse... Et je lui ai dit de garder ça pour elle", s'est-il souvenu.

De son côté, la serveuse a assuré à l'AFP que la photo était "vraie", "authentique" et provenait de son propre téléphone portable. Le parquet de Poitiers a ouvert une enquête préliminaire qui a été confiée à la sûreté départementale. 

"Il n'est pas le seul à nous mentir"

"Benalla nous a menti mais manifestement il n'est pas le seul", a estimé ce mercredi le sénateur LR François Grosdidier auprès de Public Sénat. "Il nous a menti au moins sur l'usage qu’il avait des armes, sur ses autorisations et sur les distorsions entre les utilisations et les usages", a-t-il avancé, même si les questions de la Commission d'enquête se sont surtout concentrées sur le port d'arme une fois Alexandre Benalla en fonctions à l'Elysée. 

Les personnes entendues par la Commission d'enquête témoignent sous serment et jurent de dire la vérité. En cas de parjure, elles risquent jusqu'à cinq ans de prison et 75.000 euros d'amende.

"Il n'est pas le seul à nous mentir", a toutefois nuancé François Grosdidier. "Alors si on lance des procédures en parjures, on doit aller jusqu'où?", a lancé le sénateur.

Liv Audigane