L'ex-patron des "Stups" accusé d'avoir facilité le trafic de cannabis

François Thierry, l'ancien patron de l'Office central de la répression du trafic illicite. - Patrick Kovarik - AFP
Il s'agit de la scène caractéristique du trafic de drogue: une belle villa en bord de mer et des hommes de main des caïds transférant de petit colis arrivés par bateau. Sauf que, selon Libération, cette fois-ci, ces petites mains sont des policiers français de l'Office central de la répression du trafic illicite (Octris). Stéphane V., un "infiltré", comme il se définit lui-même, révèle ce lundi que l'ancien patron des "Stups", François Thierry, aurait facilité l'importation de tonnes de résine de cannabis en France. Face à ces allégations, ce dernier a porté plainte pour diffamation contre le quotidien.
Cette "affaire d'Etat", comme la qualifie le quotidien, prend racine dans une saisie de drogue le 17 octobre dernier. Ce jour-là, boulevard Exelmans, dans le XVIe arrondissement de Paris, les policiers mettent la main sur 7,1 tonnes de cannabis stockées dans des fourgonnettes stationnées. Sauf que cette marchandise pourrait faire partie d'un lot bien plus important. Non loin de là réside Sofiane H., le numéro 1 du trafic de stupéfiants en France, précise des sources policières.
19 tonnes de cannabis débarquée
Sofiane H. a un pedigree. Dès l'âge de 20 ans, il fait partie des figures du milieu. En 2009, sa belle trajectoire connait un coup d'arrêt, l'homme est interpellé en Espagne. C'est lors de sa détention qu'il va être recruté par François Thierry en personne. Extradé en France, l'homme est condamné en avril 2011 à 13 ans de prison. Trois ans et une nouvelle avocate plus tard - cette dernière n'est autre que la compagne du grand patron des "Stups" - Sofiane H. est remis en liberté.
Cette remise de peine est jugée exceptionnelle. Du point de vue policier, cet échange de bons procédés doit permettre au trafiquant de réaliser des livraisons "surveillées". La pratique est légale. Elle consiste, sous le contrôle d'un magistrat, à permettre le passage de certaines quantités de drogue dans le pays, à condition qu'elles permettent le démantèlement de filières de revente.
Stéphane V., devant les officiers de l'Inspection générale de la police nationale (IGPN), a raconté un tout autre scénario. Dans le giron de François Thierry, cet homme explique s'être vu confier le gardiennage d'une villa en Espagne. C'est là, qu'entre mars et avril 2012, il a vu le système mis en place par l'ex-patron de l'Octris, qui a quitté récemment son poste. Des policiers utilisés comme petites mains, mais surtout, pendant cette période, 19 tonnes de cannabis arrivées par bateau puis réparties dans plusieurs véhicules. La drogue remontait vers la France par go-fast, une seule partie des convois était interceptée.
Pas de communication du parquet
La marchandise aurait donc été retrouvée dans le XVIe arrondissement parisien. Une autre partie à Nantes et encore six autres tonnes en Belgique. L'affaire pourrait se compliquer si Sofiane H. se révélait être l'importateur. "Deux saisies qui, clairement, indiquaient pour le moins que cette cargaison n’avait pas été aussi surveillée qu’elle aurait dû l’être…", confie au Parisien une source au fait de ce type de procédures. Le parquet de Paris n'a pas souhaité communiquer sur la véracité des propos ni sur la crédibilité de Stéphane V., l'ancien indic de François Thierry. Selon nos informations, deux enquêtes concernant la gestion de l'Octris sont bien ouvertes et confiées à l'IGPN mais aucune ne vise directement François Thierry.