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Police-Justice

Jean-Jacques Urvoas adresse 57 pages de recommandations à son successeur

Le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas à la sortie de l'Elysée, le 5 avril 2017.

Le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas à la sortie de l'Elysée, le 5 avril 2017. - Bertrand Guay - AFP

Loi de programmation pour la justice, numérique, dignité de la détention, révision constitutionnelle… En “dix chantiers”, le ministre de la Justice adresse ses recommandations à son successeur.

Le ministre de la Justice Jean-Jacques Urvoas a publié mardi 18 avril aux éditions Dalloz une longue lettre à l’attention de son ou sa successeur(e). Dans ce document de 57 pages, le garde des Sceaux se présente notamment comme un “jardinier” ayant préparé le terrain pour les ministres à venir.

“[...] Un ministre doit se comporter comme un jardinier et planter des graines dont seuls ses successeurs profiteront des arbres et récolteront les fruits qui en seront issus. Tout au long de ces mois place Vendôme, j’ai donc inlassablement sarclé, obstinément biné, opiniâtrement semé, en cherchant à renforcer le service public de la justice.”

Jean-Jacques Urvoas livre donc un bilan de son action à la tête de la Justice, mais formule surtout des recommandations à l’attention de son ou sa successeur(e), découpées en “dix chantiers” pour le futur.

Une loi de programmation pour la justice

Dénonçant un “manque de moyens pour le bon fonctionnement des tribunaux”, le garde des Sceaux rappelle son combat pour une loi de programmation pour la justice pour “guider les engagements budgétaires des trois prochaines années”.

Jean-Jacques Urvoas souhaite également que son successeur continue à “rapprocher la justice du citoyen”, notamment en complétant le service d’accueil unique du justiciable (SAUJ) par un pendant numérique et un point d’accès au droit, en réformant l’aide juridictionnelle et en renforçant le rôle du juge de première instance.

Développer le numérique

L’actuel ministre de la Justice souligne par ailleurs le besoin de modernisation du ministère par rapport au numérique. Il préconise ainsi “la dématérialisation de l’ensemble des procédures et des échanges” au sein de la législature, le renforcement de la sécurité informatique du ministère et d’adapter la formation et les moyens informatiques des magistrats et du personnel.

“Notre pays [...] confond la notion avec celle de punition. Or la peine n’a de sens que si elle favorise la réinsertion du condamné, tout en prenant en compte les intérêts de la société, les droits des victimes et, enfin, si elle contribue à prévenir la récidive”, insiste Jean-Jacques Urvoas dans son volet sur “Repenser la peine et son exécution”.

Il souhaiterait ainsi que la progression du recours à la détention provisoire soit “enrayé”, que les personnels d’insertion et de probation soient doublés, et que les personnes détenues disposent de plus d’offres d’activité, de formation ou de travail.

Dignité de la détention

Le cinquième grand chantier concerne la dignité en détention. Le garde des Sceaux incite à poursuivre la construction de nouveaux établissements pénitentiaires, ainsi que la rénovation de ceux existants.

Il promeut également une “justice de protection”, dont le rôle est aussi de “restaurer le lien social”. Pour ce faire, il engage entre autres son successeur à développer la justice restaurative et développer les dispositifs d’insertion de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ).

Jean-Jacques Urvoas met également en garde contre le nombre important de départs en retraite au sein de la justice dans les cinq prochaines années. Il préconise de renforcer l’attractivité des métiers de la législature, d’en améliorer les conditions de travail, et de continuer à adapter la formation.

Droit des entreprises

Pour son “huitième chantier”, le ministre de la Justice se pose en défenseur des entreprises et conseille de “concevoir un droit de la petite entreprise, accessible et protecteur”, ainsi que de “moderniser les garanties offertes aux entreprises” et de “faciliter l’exécution des décisions françaises hors de l’Union Européenne par des conventions internationales modernisées”.

Au niveau européen, Jean-Jacques Urvoas souhaite la mise en place du parquet européen, la consolidation de l’échange d’informations entre casiers judiciaires européens (ECRIS), notamment “en y intégrant les condamnations des ressortissants d’États tiers à l’Union européenne et les empreintes digitales”.

Pour finir, le ministre de la Justice prône une “révision constitutionnelle au service de la nation”, notamment en confiant la garantie de l’indépendance de l’autorité judiciaire au Conseil supérieur de la magistrature (CSM), et en supprimant la Cour de Justice de la République (CJR) chargée de juger les crimes ou délits commis par les membres du gouvernement dans l’exercice de leurs fonctions.

Liv Audigane