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Police-Justice

Angers: des étudiants brûlés lors d'un rituel d'intégration

Des étudiants parisiens. (photo d'illustration)

Des étudiants parisiens. (photo d'illustration) - Stéphane de Sakutin - AFP

Un rituel d'intégration réalisé chaque année à l'Ensam Angers a mal tourné, en octobre dernier, lorsque seize étudiants de première année se sont retrouvés brûlés et tatoués sur les bras. Une enquête a été ouverte.

Le rituel a mal tourné. Seize étudiants de première année à l'Ecole nationale supérieur des arts et métiers (Ensam) d'Angers ont été brûlés au cours d'un rituel d'intégration, en octobre dernier. Tous présentent des brûlures sur les bras, réalisées à l'aide de manches de cuillères chauffés à blanc, selon des faits rapportés par Le Monde. L'inspection générale de l'administration de l'Education nationale a été saisie.

"Illusion de tatouage"

Les faits se sont déroulés le 11 octobre lors d'une "période de transmission des valeurs". Chaque année, raconte Le Monde, les étudiants de deuxième année de cette école bicentenaire font croire à leurs nouveaux camarades de première année qu'ils vont les tatouer, au cours de cette cérémonie. Un rite surnommé l'"illusion de tatouage". D'ordinaire, les élèves utilisent des glaçons pour simuler la sensation de brûlure. Mais cette année, les choses ne se sont visiblement pas déroulées comme prévu.

"Normalement, c’est une espèce de mise en scène où on fait croire aux première année qu’on va les tatouer. On passe un glaçon et après tout le monde rigole. Mais là, les choses ont été mal maîtrisées", raconte Laurent Champaney, le directeur général de l'Ensam, cité par Le Monde. "Ce soir-là, ils n’avaient pas de glaçons pour simuler la brûlure, alors ils ont fait chauffer des manches de cuillère. Ils ont testé sur eux et ont dit que ça donnait une sensation de chaud. Mais il semble que l’opération ait été de moins en moins maîtrisée au fil de la nuit".

Résultat: seize étudiants se sont retrouvés avec des brûlures et des chiffres tatoués sur leurs bras. Toutefois, aucun n'a été hospitalisé, et aucune plainte n'a été déposée, ni par les étudiants ni par leur famille, selon le parquet d'Angers.

Enquête ouverte

Alerté par des élèves, le directeur de l'Ecole a contacté le ministère dès le 12 octobre. "La direction de l'Ensam d'Angers a contacté le ministère dès les faits connus", a ainsi indiqué le ministère de l'Enseignement supérieur, qui a de son côté averti le recteur de l'académie de Nantes et saisi l'inspection générale de l'administration de l'Education nationale. Les conclusions de cette enquête sont attendues pour fin janvier, peu après une commission disciplinaire interne à l'école, prévue le 10 janvier. 

Par ailleurs, dès qu'elle a eu connaissance des faits, l'école a précisé avoir immédiatement suspendu, "la période de transmission des valeurs sur tous les sites". Depuis, avec accord du ministère, la pratique a été réautorisée sur tous les campus de l'Ensam, à l'exception de celui d'Angers. 

Un bizutage?

"On a franchi une étape, là. C'est l'escalade. Avant, il y avait une pression psychologique. Là, ce sont carrément des sévices. Comment est-ce que, dans une grande école comme ça, on peut encore faire ça?", s'étonne Marie-France Henry, présidente du Comité national contre le bizutage. "Ce n'est pas de l'humiliation, ce n'est pas dégradant? C'est quoi alors? C'est de la torture, tout simplement", s'insurge-t-elle avant de réclamer "une condamnation en justice".

Mais pour le directeur de l'Ensam Angers, Jean Quessada, la "période de transmission des valeurs" ne relève habituellement pas du bizutage. "On n’est pas dans des actes dégradants, de harcèlement ou d’humiliation, on en est bien loin. Et ça n’aurait pas dû laisser de traces", explique-t-il au Monde. "Ce sont des actes qui n’auraient pas dû se dérouler. On est tout sauf laxistes face à des faits comme ça", assure-t-il encore.

Pour rappel, le bizutage est une pratique interdite par la loi de 1998, qui prévoit des sanctions de six mois de prison et 7.500 euros d'amende. Contactée par l'AFP, l'école assure être "particulièrement vigilante" par rapport au cadre défini par cette loi, et dit informer "chaque année les étudiants de la stricte interdiction et des conséquences -y compris pénales- de toute pratique de bizutage".

Adrienne Sigel