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De flop à film culte, comment "Dingo et Max" est devenu un Disney de référence

Détail de l'affiche de "Dingo et Max"

Détail de l'affiche de "Dingo et Max" - Disney

Conçue en France, cette aventure de Dingo sur grand écran fête ses 30 ans ce lundi 7 avril. A l'occasion, un documentaire retraçant sa genèse est diffusé sur Disney+.

Un film dingo. Oeuvre méconnue de Disney, Dingo et Max fête ses 30 ans ce lundi 7 mai. Désormais réhabilité dans un documentaire inédit sur sa création, Not Just A Goof, disponible dès ce lundi sur Disney+, ce film réalisé par Kevin Lima (Tarzan, 102 Dalmatiens) était passé inaperçu à sa sortie en 1996.

Dingo et Max a longtemps souffert du contexte dans lequel il est sorti, à la moitié des années 1990, entre plusieurs classiques: avant La Belle et la bête (1991), Aladdin (1992) et Le Roi Lion (1994) puis après Pocahontas (1995), Le Bossu de Notre-Dame (1996) et Hercule (1997).

Autant de références écrasantes, qui ont brouillé l'image de cette petite production, en réalité un spin-off de la série La Bande à Dingo. Conçu avec un budget dérisoire pour un Disney (20 millions de dollars contre les 45 du Roi Lion), Dingo et Max s'inspire d'un voyage du patron de Disney, Jeffrey Katzenberg avec sa fille.

Dingo et Max prend en effet la forme d'un voyage initiatique. Contraint de partir en vacances l'été avec son père, avec qui il a une relation tendue, Max va vivre des aventures loufoques à travers les États américains qui vont lui permettre de se réconcilier avec son géniteur.

"Un OVNI"

A la sortie, l'accueil avait été mitigé. Seulement 672.103 spectateurs s'étaient déplacés en France, loin des 9,4 millions d'entrées du Roi Lion en 1994. Et dans le monde, le film n'avait rapporté que 37.6 millions de dollars. Depuis, Dingo et Max a gagné ses lettres de noblesse et est considéré comme un des Disney modernes les plus émouvants.

Dingo et Max est salué pour son humour, la qualité de son animation et les relations entre les personnages finement observées et bien écrites. En avril 2022, la critique Angelica Bastien a ainsi estimé dans les colonnes de Vulture: "Dingo et Max est le genre de film qui n'existe plus - surtout chez Disney."

"Aux grands discours (moralisateurs), Dingo et Max (...) préfère une simple histoire d'amour entre un père célibataire et son fils unique. Le doublage est superbe et parfaitement fluide. L'animation a du caractère."

Selon le site de référence Chronique Disney, Dingo et Max est "une belle réussite" "d'une modernité incroyable", "un OVNI" qui parle "de problèmes réels et courants dans la vie des jeunes spectateurs".

Cauchemar

Certaines séquences ont façonné la légende de Dingo et Max. La première notamment: dans un champ de blé, Max aperçoit la fille qu'il aime en secret, Roxane. Alors qu'il s'apprête à lui parler, ses pieds et ses dents grossissent soudainement. Sa voix change. Il se transforme en son père, Dingo, et il se réveille en sueur.

Avec sa métaphore de la puberté, vue comme une transformation monstrueuse, cette séquence a traumatisé beaucoup d'enfants des années 1990. Peu de films d'animation auraient osé un tel début.

Mais ce n'est pas le seul passage traumatisant du film. La séquence du parc d'attractions dédié aux opossums est aussi un grand moment de honte pour le personnage de Max. L'animation parvient à faire ressentir la gêne ressentie à ce moment précis par Max.

Ce travail de qualité a été conçu en France. Dans les années 1990, Walt Disney Animation avait ouvert un studio à Montreuil pour aider la production de films qui se déroulaient à Burbank, en Californie, et à Orlando, en Floride. Fer de lance de ce nouveau studio, Dingo et Max a même servi de galop d'essai pour des scènes du Bossu de Notre Dame et Tarzan.

Réappropriation

Comme beaucoup de films cultes, Dingo et Max a eu une étonnante seconde vie. Pour la critique Angelica Bastien, Dingo et Max a ainsi été une œuvre importante pour la communauté noire américaine, comme elle l'affirme dans Vulture.

"Tous les enfants noirs que je connais - dont ma famille - voient cette histoire comme celle d'une famille noire. Quand vous aimez la culture populaire, vous apprenez à vous reconnaître, souvent de manière inattendue."

Hypothèse partagée par le réalisateur Donald Glover dans sa série Atlanta. Il a d'ailleurs imaginé un épisode intitulé Dingo derrière la porte, diffusé en novembre 2022, en forme de documentaire sur un personnage le fictif: Thomas Washington, premier PDG noir de Disney.

"Le film le plus noir de l'histoire"

L'intention de cet éphémère patron, catapulté à la tête de Disney à la suite d'un malentendu, est, selon le faux documentaire, de réaliser "le film le plus noir de l'histoire du cinéma", Dingo et Max.

Dans cette histoire alternative des années 1990, l'idée de Dingo et Max lui aurait été inspirée par les émeutes de Los Angeles de 1992, en réaction à l'acquittement des policiers blancs accusés d'avoir passé à tabac Rodney King.

L'épisode offre ainsi d'autres interprétations sur le film, qui serait un commentaire sur la masculinité noire et les difficiles relations entre les hommes noirs et leurs enfants. Nul doute que Not Just A Goof offrira aux fans de quoi imaginer de nouvelles théories pour faire perdurer le mythe de cette œuvre culte.

https://twitter.com/J_Lachasse Jérôme Lachasse Journaliste BFMTV