Dans "Un cowboy sous pression", Lucky Luke croise le grand-père de Trump, immigré bavarois

Lucky Luke revient dans Un cow-boy sous pression, perdu dans les brumes du Nord des États-Unis et un conflit social dans l'industrie de la bière, univers totalement inédit pour lui.
"On aime bien confronter Lucky Luke à un monde qu'il ne connaît. Ce choc des cultures, on s'est imaginé le faire avec la communauté allemande aux Etats-Unis, qui est en fait considérable", souligne auprès de BFMTV Jul qui signe le scénario de cette nouvelle aventure.
Cet album, à paraître vendredi aux éditions Lucky Comics, est le onzième de la nouvelle série reprise par Achdé. Le dessinateur, qui a succédé au créateur du personnage, Morris, reste très fidèle au graphisme de son maître.
Mais, pour cette aventure, il a fallu se renouveler: elle se déroule essentiellement dans une grande ville, Milwaukee, et des décors typiques de la Révolution industrielle, très peu sinon jamais abordés par Morris, quoique Belge.
"Je sais que j'ai mis la pression à Hervé" Darmenton, le véritable nom d'Achdé, concède le scénariste Jul (Julien Berjeaut).
Loin du Far West
"Tout était compliqué, parce que bon, moi, je n'aime pas faire de la ville. Je le reconnais, je l'ai toujours dit: j'ai repris Lucky Luke parce que je voulais dessiner des déserts, des cactus et des têtes de vache", rappelle le dessinateur interrogé par l'AFP.
Alors a-t-il pris du plaisir à représenter ces canalisations, cuves, chaînes de fabrication et autres entrepôts en briques? "Pas du tout. Mais c'est marrant, disons que c'est le défi. Là où on prend du plaisir, c'est quand on réussit", répond-il.

Lucky Luke, loin de son Far West, de ses Grandes Plaines avec ranchs, petites localités isolées et horizons dégagés, est appelé à la rescousse pour réconcilier patrons et ouvriers brasseurs sur les salaires et les conditions de travail.
Il est plein de bonne volonté. Mais il ne connaît rien à ce monde des Miller, Blatz et autres Schlitz, marqué par l'origine allemande ou nordique de sa population et par les rapports de force entre classes sociales.
"On l'a un peu oublié, mais il a des États, dans le nord des États-Unis, la 'german belt', où plus de 70% étaient allemands, des villes où tout était écrit en gothique", rappelle Jul au micro de BFMTV.
"Et on se rend compte que ces Allemands, ils ont donné aux États-Unis tous les grands symboles de l''american way of life', le hamburger, le ketchup, le hot dog, et évidemment la bière", énumère-t-il encore, expliquant pourquoi ils ont choisi la bière comme fil rouge de leur histoire.
Jul a envie que les lecteurs trouvent que "ça ressemble aux Lucky Luke de la grande époque, qu'on aime et, en même temps, ça apporte quelque chose de neuf".
Friedrich Trump, immigré bavarois
D'où, entre autres, le télescopage entre les Dalton et Karl Marx - les frères hors-la-loi sont persuadés qu'il détient un gros magot surnommé "le Capital". Ou la présence d'un immigré bavarois, Friedrich Trump, propriétaire d'un saloon doublé d'une maison close - même si, en réalité, le grand-père de Donald n'était pas installé à Milwaukee.
"Le grand-père de Donald Trump était contemporain de Lucky Luke, évoque Jul pour BFMTV. Il était parmi ces fameux immigrants allemands, il débarque de Bavière. Trump comme Eisenhower font, des gens qui ont fait l'histoire américaine, font partie de ce monde des colons allemands".
Mais cet album fait doublement écho à l'actualité. "Lucky Luke, c'est quelque chose qui nous parle encore aujourd'hui, et peut-être plus encore cet album que les autres", souligne Jul.
"Ce qui s'est passé aux États-Unis avec la réélection de Donald Trump, on le met en scène. Parce que c'est l'Amérique blanche, c'est cette Amérique des ouvriers qui ont été oubliés par les démocrates, c'est cette Amérique des Allemands, de ces blancs qui ont façonné les États-Unis, qu'on a tendance à oublier dans les représentations contemporaines, et c'est eux qui ont dit 'c'est nous qui tenons la barre du navire'."
"Cet album, c'est un passeport pour comprendre cette Amérique", conclut-il.
Outre les librairies, l'homme qui tire plus vite que son ombre débarque aussi en salle de ventes. Vendredi, Christie's Paris met aux enchères 50 planches originales signées Morris. Datant de 1949 à 2001, elles sont estimées à des prix variant de 20.000 à 80.000 euros.