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Paris Île-de-France

Procès de l'incendie de la rue Erlanger: 27 ans de réclusion requis contre l'accusée

L'incendie dans l'immeuble situé au 17 bis de la rue Erlanger à Paris a fait 10 morts dans la nuit du 4 au 5 février 2019.

L'incendie dans l'immeuble situé au 17 bis de la rue Erlanger à Paris a fait 10 morts dans la nuit du 4 au 5 février 2019. - Benoît Moser / BSPP - Brigade de sapeurs-pompiers de Paris

Essia B., est jugée pour avoir allumé un feu au 17 bis rue Erlanger dans la nuit du 4 au 5 février 2019 causant la mort de dix habitants.

Une peine de 27 ans de réclusion criminelle, assortie de 18 ans de sûreté, a été requise mercredi contre l'accusée au procès de l'incendie de la rue Erlanger à Paris, qui a provoqué la mort de dix personnes en février 2019.

L'avocat général Rémi Crosson du Cormier a reconnu que le discernement de l'accusée, qui souffre d'importants troubles psychiatriques, était "altéré" au moment des faits. Mais il a demandé au jury de ne pas appliquer la réduction de peine possible dans ce cas, "au regard de la gravité extrême de la tragédie" provoquée par son "action volontaire, vengeresse et disproportionnée".

Essia B., une femme de 44 ans qui souffre d'addictions et d'importants troubles psychiatriques, a reconnu avoir mis le feu dans son immeuble du XVIe arrondissement de Paris la nuit du 4 au 5 février 2019, après un différend avec un voisin.

Ni "un geste délirant", ni "un geste impulsif"

Les fumées toxiques et les flammes avaient envahi en quelques minutes les huit étages de cet immeuble ancien en fond de cour, difficile d'accès pour les secours, piégeant de nombreux habitants dans leur appartement.

Essia B. est "la seule auteure de cette terreur qui a emporté dix personnes dans la mort, blessé près de 100 autres personnes et plongé tant de familles dans la douleur.

"Les incendiaires" font partie des criminels "qui troublent le plus gravement l'ordre social", a affirmé l'avocat général en commençant son réquisitoire devant la cour d'assises de Paris, comparant la scène vécue par les victimes cette nuit-là - les cris, l'attente, l'intervention des pompiers et des forces de l'ordre" - à celle d'un "attentat terroriste".

Si Essia B. a bien "une personnalité complexe", sa décision de mettre le feu n'est ni "un geste délirant", ni "un geste impulsif", mais le résultat de "sa colère non maîtrisée et exacerbée par son alcoolisme", a estimé le représentant de l'accusation.

Le verdict attendu jeudi

Incarcérée peu après les faits, Essia B. a effectué l'essentiel de sa détention provisoire dans une unité hospitalière spécialement aménagée (UHSA), une structure dédiée aux détenus nécessitant des soins psychiatriques.

S'exprimant clairement au cours des débats, mais luttant souvent pour ne pas fermer les paupières dans le box, en raison du "lourd traitement" qui lui est prescrit, l'accusée n'a pas réagi à la peine réclamée.

Dans la matinée, les avocats des victimes avaient appelé le jury à "rendre une justice à la hauteur de leurs souffrances" et à protéger la société "de manière durable et efficace" des actes d'Essia B..

"Cette accusée que l'on infantilise à dessein, pour atténuer sa responsabilité, (...) n'a rien d'une gamine ni d'une folle", a argumenté Julie Duvivier, avocate d'une jeune femme qui vivait au premier étage.

Comme d'autres, elle a demandé au jury de ne pas retenir l'"altération" du jugement d'Essia B., "atteinte de troubles qui l'amèneraient à s'intoxiquer involontairement, 'parce qu'il n'y a que ça qui l'apaise'".

Pour l'avocate, cet état mental, "qu'on voudrait vous présenter comme atténuant", constitue au contraire "un contexte aggravant" qui "mène au geste criminel qu'elle a commis, sous stupéfiants et en état d'ivresse, c'est-à-dire en sachant parfaitement qu'elle deviendrait dangereuse".

Les deux avocats d'Essia B. doivent plaider mercredi après-midi. Le verdict est attendu jeudi.

S. B. avec AFP