Trump a-t-il révélé des informations "secret défense" à la Russie?

Sergueï Lavrov, Donald Trump et l'ambassadeur Sergueï Kislyak à la Maison Blanche, le 10 mai. - HO / RUSSIAN FOREIGN MINISTRY / AFP
Donald Trump soulève une nouvelle polémique l'impliquant lui et la Russie. Si la controverse ne fait que commencer, elle apparaît déjà très sérieuse. Selon un article publié par le Washington Post ce lundi soir, le président américain a dévoilé des informations hautement confidentielles au ministre des Affaires étrangères russe, Sergueï Lavrov, et à l'ambassadeur de Russie aux Etats-Unis, Sergueï Kislyak, lors de leur réception à la Maison Blanche mercredi dernier. Cette rencontre, tenue au lendemain du limogeage par le chef d'Etat du directeur du FBI James Comey qui enquêtait sur de possibles ingérences de la Russie dans la campagne présidentielle américaine, a d'ailleurs largement défrayé la chronique. Ces nouvelles révélations, dévoilant une part de ce que Donald Trump a confié de manière fautive à ses interlocuteurs, et que le site du célèbre journal dit tenir d'un membre actuel de l'administration américaine et d'un ancien cadre de cette autorité, ne risquent pas d'apaiser les débats.
Une divulgation potentiellement lourde de conséquences
Mercredi dernier donc, Donald Trump a commencé par claironner devant ses interlocuteurs: "J'ai de bonnes informations. Tous les jours, les gens viennent et me donnent de très bons renseignements". Il a alors évoqué devant ses interlocuteurs une menace terroriste posée par Daesh et liée à l'utilisation d'ordinateurs portables dans des avions. Il a également détaillé à Sergueï Lavrov et au diplomate des mesures de prévention pour parer à cet éventuel péril. Pire, il leur a également dit dans quelle ville, actuellement tenue par Daesh, ces renseignements avaient été obtenus. Si la Russie et les Etats-Unis considèrent tous deux l'organisation jihadiste comme ennemie, ils ne partagent pas les mêmes vues sur la Syrie, où Bachar al-Assad est soutenu par le pays de Vladimir Poutine.
Cette divulgation peut également compromettre la source qui en est à l'origine et qui a actuellement accès aux rouages du mouvement terroriste. Ce partenaire des Américains n'avait d'ailleurs pas donné l'autorisation de transmettre son information à la Russie. Les détails en avaient même été cachés aux alliés des Etats-Unis et ne devaient pas être mis entre toutes les mains dans les hautes sphères des autorités américaines. Et cette mine d'informations pourrait se tarir du fait de cette bévue selon un membre de l'administration: "Si ce partenaire a appris qu'on avait donné ça à la Russie sans même qu'il le sache ni qu'on lui ait demandé, ce serait un coup porté à notre relation".
Le Sénat prévenu, la Maison Blanche dément
H.R. McMaster, conseiller à la sécurité nationale de Donald Trump, a commenté et a démenti l'erreur: "A aucun moment, des sources et des méthodes n'ont été mentionnées et aucune opération militaire n'a été dévoilée qui n'était déjà publiquement connue". Plus tard dans la soirée de ce lundi, la Maison Blanche a réagi avec force, en dénonçant "une histoire fausse". Ce qui est sûr en tous cas, c'est que cette partie de l'échange n'apparaît pas dans le compte-rendu officiel qui en a été dressé. Si la faute de Donald Trump se confirmait, cependant, elle ne tomberait sans doute pas sous le coup de la loi, selon le Washington Post, tant la gestion de ce type d'informations, même du plus grand secret, est laissée à la discrétion du président américain.
Lors de cet entretien avec ces hauts responsables russes, Donald Trump s'est même exprimé avec une certaine candeur: "Mais dans quel monde on vit? C'est fou, non?" Deux membres des plus hauts cercles du pouvoir américain, qui avaient été avertis des révélations faites par Donald Trump, ont confirmé auprès de Buzzfeed que Donald Trump avait bien tenu les propos qu'on lui prête. "C'est bien pire que ce qui a déjà été écrit", a même commenté l'un d'entre eux. Le United States Senate Select Committee on Intelligence (ou Comité du Sénat pour le renseignement) a aussi été prévenu. Et le soupçon gagne du terrain dans la classe politique. Le sénateur démocrate du Connecticut, Chris Murphy, s'est inquiété dans le même article: "Si cette histoire est vraie, c'est un nouvel élément dans le tableau d'une connexion vraiment très troublante entre Trump et le gouvernement russe".