Logement: les discriminations raciales existent aussi sur Airbnb

La plateforme d'hébergement chez l'habitant Airbnb (image d'illustration). - John MacDougall - AFP
Un problème de racisme sur Airbnb? C’est ce que suggère le hashtag #AirBnBWhileBlack ("AirBnB quand on est noir", en français), apparu sur Twitter l’an dernier et depuis repris par plusieurs utilisateurs de la plateforme de location de logements chez l'habitant, pour dénoncer les discriminations raciales dont ils se disent victimes.
A l’origine de ce mot-clé, Quirtina Crittenden, une consultante de 23 ans vivant à Chicago, rapporte le site américain Vox. Afro-américaine, la jeune femme l’a lancé après avoir constaté que ses demandes de location étaient fréquemment refusées par les hôtes, même lorsque les appartements apparaissaient comme disponibles sur l’annonce.
"Les hôtes trouvaient toujours des excuses comme, 'oh, quelqu'un vient juste de réserver' ou 'oh, certains de mes clients réguliers viennent en ville, et ils vont y séjourner ici'", a expliqué l’Américaine dans une interview à la radio nationale NPR. "Mais je suis devenue suspicieuse quand, en vérifiant quelques jours plus tard, je voyais que ces dates étaient encore disponibles."
Vague de témoignages sur Twitter
A titre d’expérience, Quirtina Crittenden a changé sa photo de profil, retirant une photo d’elle au profit de la photo d'une ville la nuit, et pris un autre nom d’utilisateur, modifiant Quirtina en Tina. Elle affirme que ses demandes de location ont d'un coup été acceptées.
"Depuis que j’ai changé mon nom et ma photo, je n’ai plus aucun problème", dit-elle.
D’autres personnes de couleur ont par la suite repris #AirBnBWhileBlack pour décrire des expériences similaires, captures d’écran à l’appui. Comme Raheem, partageant un message sur lequel sa demande a été rejetée, alors que celle de son amie est apparemment acceptée quelques heures plus tard.
"Une licence, un master et un doctorat plus tard, je ne peux toujours pas louer votre appartement #AirbnbWhileBlack", a tweeté un autre utilisateur.
Gregory Seldon, un utilisateur noir, a notamment posté un message mercredi racontant comment il a instantanément reçu une réponse positive après s’être créé un faux profil d’homme blanc, alors que le propriétaire venait de lui rétorquer que son bien n’était plus disponible. Un tweet devenu viral, raconte Vox, qui a déclenché un vif intérêt pour le hashtag.
"16% moins susceptibles d'être acceptés", dit une étude
En début d’année, des chercheurs de la Harvard Business School ont publié une étude sur les discriminations raciales dans "l'économie du partage" (l'économie de l'échange de biens et services de particulier à particulier).
Pour le volet concernant Airbnb, l’enquête de terrain a porté sur quelque 6.400 annonces, dans cinq villes des Etats-Unis (Los Angeles, Dallas, Baltimore, St Louis et Washington). Les auteurs ont créé des profils similaires, ne différant que par le nom, "l’un distinctivement afro-américain et l’autre distinctement blanc", expliquent-ils. Ils se sont ensuite enquis de la disponibilité de la disponibilité du logement à louer.
Conclusion? "Dans l'ensemble, une vaste discrimination contre les clients afro-américains." D’après les auteurs, sur les sites de l’économie du partage, "les demandes des clients avec des noms typiquement afro-américains sont à peu près 16% moins susceptibles d'être acceptés que les clients ayant un profil identique avec un nom distinctement blanc". Mais ce n’est pas tout: l'étude montre également que les personnes de couleur gagnent moins d'argent lors de la location de leur bien que les autres.
Au final, ces discriminations raciales sont cependant coûteuses pour les hôtes qui s’y adonnent, soulignent les chercheurs, puisque ceux qui rejettent des clients Afro-américains ne parviennent à trouver des clients de remplacement que dans 35% des cas.
Des "défis importants", pour Airbnb
Sur son site, Airbnb explique interdire "tout contenu qui incite à la discrimination". "Par ailleurs, les lois relatives à l'équité en matière de logement interdisent généralement la discrimination fondée sur la race, l'origine nationale, la religion, le sexe, le statut familial ou le handicap dans le cadre de la vente et la location de logements. En tant qu'hôte, vous devez vous familiariser avec les lois qui s'appliquent à vous et à votre logement", y est-il encore écrit. Un lien indique aussi la procédure à suivre “si vous pensez qu'un logement ou qu'une personne sur le site va à l'encontre de ces positions".
Conscient du problème, le géant américain de la location saisonnière a toutefois d’ores et déjà mis en place des séminaires et des discussions, proposés à ses hôtes, sur le thème des préjugés et de l’intégration. Et a récemment recruté directeur de la diversité, David King. Auprès de Vox, celui-ci déclare:
Airbnb "reconnaît que les préjugés et la discrimination constituent des défis importants, et nous prenons des mesures pour y faire face".