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La Chine détient bien l'éditeur suédois "disparu"

Des "avis de recherche" de Gui Minhai (à gauche) placardées par des manifestants sur un bâtiment gouvernemental à Hong Kong lors de la précédente disparition de l'éditeur-libraire, le 23 janvier 2016

Des "avis de recherche" de Gui Minhai (à gauche) placardées par des manifestants sur un bâtiment gouvernemental à Hong Kong lors de la précédente disparition de l'éditeur-libraire, le 23 janvier 2016 - Anthony WALLACE, AFP/Archives

Il avait disparu depuis le 20 janvier dernier. Le gouvernement chinois a confirmé détenir l'éditeur Gui Minhai, comme le craignait sa fille.

Le gouvernement chinois a confirmé mardi détenir l'éditeur-libraire suédois d'origine chinoise Gui Minhai, dont Stockholm a réclamé la libération en dénonçant un enlèvement "brutal" et une violation du droit international.

Gui Minhai, 53 ans, qui commercialisait à Hong Kong des ouvrages ridiculisant le régime communiste, a été arrêté par des policiers en civil le 20 janvier dans un train chinois, alors qu'il était assisté de deux diplomates suédois.

La communauté internationale exige sa libération

"En raison de violations de lois chinoises, les autorités compétentes ont adopté des mesures judiciaires coercitives à l'encontre de Gui Minhai", a indiqué Geng Shuang, porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, sans autres précisions. En d'autres termes, le droit pénal chinois permet de placer un suspect en détention ou en résidence surveillée.

Stockholm avait dénoncé lundi une interpellation "brutale" réalisée alors que Gui Minhai était accompagné de diplomates, et donc "contraire aux règles internationales fondamentales sur le soutien consulaire", selon un communiqué virulent de la ministre suédoise des Affaires étrangères Margot Wallstrom.Celle-ci a, une fois encore, réclamé la libération du libraire. Une libération également exigé par l'Union européenne et les Etats-Unis.

Des publications jugées "graves"

"Même si Gui Minhai est ressortissant suédois, son cas doit être jugé conformément au droit chinois. La Suède doit prendre conscience que les faits en question sont graves", a martelé Geng Shuang lors d'une conférence de presse. Avant de prévenir: "Nous enjoignons fortement (à Stockholm) de ne rien faire qui puisse détériorer notre respect mutuel et nos liens bilatéraux".

Jusqu'à il y a deux ans, Gui Minhai travaillait à Hong Kong pour la maison d'édition Mighty Current. Basée dans l'ex-colonie britannique, territoire chinois autonome jouissant de fortes libertés publiques, cette maison publiait des livres salaces sur la vie privée des dirigeants chinois, interdits en Chine continentale.

Une deuxième disparition

Mais en 2015, comme quatre autres employés, Gui Minhai s'était volatilisé: il avait disparu lors de vacances en Thaïlande avant de réapparaître dans un centre de détention chinois et d' "avouer" à la télévision d'Etat son implication dans un accident de la route meurtrier plusieurs années auparavant.

Les autorités chinoises avaient finalement annoncé en octobre 2017 l'avoir relâché. Mais sa fille Angela Gui a affirmé que depuis, son père résidait sous surveillance dans un appartement de la police dans la ville portuaire de Ningbo.

Une détention qui inquiète

"Les vagues annonces du gouvernement (ce mardi) n'ont rien de rassurant. Il est très probable que Gui Minhai subit (...) une forme de détention secrète où les tortures et mauvais traitements sont affreusement banalisés", a réagi William Nee, chercheur de l'ONG Amnesty International. Or, "il est crucial qu'il puisse recevoir des soins médicaux, une aide consulaire, et rencontrer des avocats de son choix. La Chine ne peut pas ignorer le droit international simplement parce qu'elle a arbitrairement qualifié le cas de grave", s'est-il indigné.

De son côté, Angela Gui redoute que son père ne soit jugé et condamné à une longue peine, au péril de sa santé, et a appelé la communauté internationale à sortir de sa "léthargie".

Pékin avait déjà été fortement critiqué pour ne pas avoir laissé le Prix Nobel de la Paix Liu Xiaobo partir à l'étranger pour soigner son cancer du foie. Il était mort en juillet dans un hôpital chinois quelques semaines après sa libération conditionnelle.

M. F. avec AFP