BFMTV
International

L'église du Souvenir, au cœur de Berlin et de son Histoire

placeholder video
Edifiée à la fin du XIXe siècle, l'église du Souvenir devait initialement rendre hommage au fondateur du IIe Reich. Mais les bombardement de la Seconde guerre mondiale et la division de la ville sous la guerre froide l'ont chargée de bien d'autres souvenirs. C'est près de cette paroisse que lundi un camion a fait au moins douze morts et quarante-huit blessés.

C’est peu dire que l’église du Souvenir, près de laquelle la course folle d’un camion a fait au moins douze morts et quarante-huit blessés lundi, est placée au cœur de Berlin. La paroisse est située sur le Kurfürstendamm, abrégée familièrement en Ku’Damme par les Allemands, une artère commerciale et touristique très connue de la capitale allemande, en pleine Breitscheidplatz, lieu berlinois fameux. Depuis plusieurs décennies, l’église du Souvenir porte avant tout une intense charge symbolique. Et un souvenir peut en cacher d'autres.

Conçue pour célébrer une victoire, elle commémore ensuite une catastrophe humaine

Le nom complet du lieu de culte est le suivant: église du Souvenir de l’Empereur Guillaume. Construite entre 1891 et 1895 par Franz Schwechten selon la volonté de Guillaume II, elle est à l’origine un hommage au grand-père du souverain, Guillaume Ier, et de la victoire de ce dernier contre les Français à Sedan en 1870. Mais, depuis longtemps, ce ne sont plus les bacchantes du vieil empereur Guillaume que l’église du Souvenir rappelle aux Berlinois. Celle-ci d’ailleurs ne ressemble plus que très partiellement à l’édifice originel.

En novembre 1943, puis en avril 1945, la Breitscheidplatz et l’église sont noyées sous un tapis de bombes alliées. Le bâtiment religieux est sévèrement endommagé. Entre 1956 et 1961, on balaie une bonne part des ruines de la première église pour mieux en dresser une nouvelle, ainsi qu’un beffroi ultramoderne. Initialement, l’architecte Egon Eiermann comptait bien détruire l’intégralité de la précédente construction. Devant l’opposition locale, l’homme avait cependant dû revoir ses plans.

L'écho d'un passé pas si lointain

Ce qu’il subsiste donc encore aujourd’hui du bâtiment néo-roman qui fut le premier à voir le jour sur la place, ce sont principalement le porche et le clocher sur lequel se lisent toujours les stigmates du dernier conflit mondial. Cette tour, victime des raids aériens anglo-saxons, doit à cette apparence endolorie son surnom actuel de "dent creuse". Les Berlinois, et les touristes, sont d’autant plus conscients de l’importance mémorielle de l’église du Souvenir que celle-ci dispose de plusieurs pièces dont la résonance est peut-être moins religieuse qu’historique.

Il y a d’abord cette croix faite de clous venus de la cathédrale de Coventry au Royaume-Uni, elle-même ravagées par les stukas nazis en 1940. On peut aussi y contempler la "Madone de Stalingrad", un dessin de la Vierge marie serrant contre elle l’enfant jésus tracé aux alentours de Noël 1942 dans le froid de Stalingrad par l’officier-médecin allemand Kurt Reuber.

Comme le montre ce tweet de Thomas Wieder, correspondant du Monde en Allemagne, l’église renvoie toujours cet écho de la guerre la plus meurtrière de l’humanité.

Un nouveau souvenir...

Intrinsèquement liée au XXe siècle tourmenté de la société allemande, et plus particulièrement berlinoise, l’église du Souvenir est aussi associée à la scission de la capitale allemande. Elle est en effet fichée dans Berlin-ouest dont elle est l’un des symboles, pas très loin du mur séparant la partie est de la ville de la portion occidentale.

Ce 19 décembre 2016, l’église du Souvenir était encore aux premières loges pour voir passer une nouvelle et triste page de l’histoire allemande.

Robin Verner