Ils jouent de la musique à la gloire des narcotrafiquants

Le 19/01/2016 à 14h39

Des CD de narcocorridos se vendent dans certaines boutiques de Mexico. - Yuri Cortez - AFP

Ils jouent d'un instrument, ils sont mexicains et ils ont un mentor: "El Chapo", le célèbre narcotrafiquant rattrapé par le gouvernement mexicain après une cavale de plusieurs mois. Les "narcocorridos" sont des chansons jouées par des groupes de musique d'Amérique du Sud et qui n'ont qu'un seul registre: chanter la gloire des narcotrafiquants.

Chapeau de cowboy vissé sur la tête, chemise scintillante et santiags en croco aux pieds, les chanteurs de "narcocorridos" ont un style identifiable entre tous. Historiquement chantées par les "anciens", les narcocorridos sont des compositions musicales qui retracent les aventures des trafiquants de drogue. Les chanteurs sont, pour la plupart, originaires du Sinaloa, province du Mexique gangrénée par le trafic de drogue. Les premiers narcocorridos datent des années 1930 et vantaient les mérites de Juan Ramírez-Pimienta, un trafiquant mexicain.

Aujourd'hui, les stars de ces chansons s'appellent Joaquin "El Chapo" Guzman ou encore Pablo Escobar, qui ont tous les deux eu droit à des dizaines de titres à leur gloire. Après son arrestation à Los Mochis, au Mexique, "El Chapo" est redevenu le sujet préféré des compositeurs.

"Depuis votre arrestation rien n'est pareil, vous manquez à la ville, nous sommes nombreux à demander votre libération, vous êtes une bonne personne qui apporte de l'aide", peut-on entendre dans certains titres.

Un symbole de réussite et de défiance envers l'Etat

Ces chansons connaissent un grand succès, essentiellement au Mexique. La raison? Les narcotrafiquants sont appréciés dans les pays d'Amérique du Sud par une majorité de la population.

Ils représentent la richesse, le courage, la liberté et la défiance envers l'Etat. Grâce à ses multiples évasions, "El Chapo" a accentué le symbole de défiance de l'Etat.

Les narcocorridos interdits de diffusion

Mais ces artistes sont interdits de diffusion sur les ondes de radio et de télévision mais c'est sur internet que leurs tubes s'écoutent et s'échangent. En 2006, les autorités mexicaines ont voté l'interdiction pour les groupes de jouer ces chansons lors de concerts ou dans des lieux publics. Et la sanction est lourde pour les contrevenants: 100.000 pesos d'amende, l'équivalent de 5.000 euros.

Avant chaque concert, le groupe qui se produit doit déposer cette somme en caution. S'ils ne respectent pas la loi, la somme est encaissée par l'Etat. En février 2013, la Cour suprême mexicaine a annulé le décret promulgué dans la province du Sinaloa, ou se trouvent le plus de musiciens. Résultat: ceux-ci peuvent désormais s'y produire. Comme un nouveau pied-de-nez à l'Etat mexicain.