Espagne: des milliers de manifestants dénoncent "l'urgence sociale" à Madrid

Des dizaines de milliers de personnes ont défilé contre l'austérité dans les rues de Madrid, samedi 22 mars. - Crédits photo : nom de l'auteur / SOURCE
Ils ont traversé l'Espagne, parcouru à pied des centaines de kilomètres pour dénoncer "l'urgence sociale". Agitant des drapeaux de toutes les régions du pays, une immense foule a envahi le centre de Madrid, ce samedi, pour le plus grand défilé organisé depuis ceux de 2012.
"Debout, debout, nous allons lutter", criaient les manifestants rassemblés autour de la gare d'Atocha, avant de défiler le long des grandes artères du centre de Madrid. Une partie d'entre eux étaient venus à pied, en huit colonnes, après avoir marché pour certains pendant près d'un mois, depuis l'Andalousie, dans le sud de l'Espagne, la Catalogne, dans l'est, les Asturies, dans le nord-ouest, ou l'Estrémadure, dans l'ouest.
Des incidents ont éclaté samedi soir, en fin de parcours, entre la police et des jeunes qui jetaient des projectiles sur les forces de l'ordre. Ces incidents ont fait 27 blessés, dont un policier grièvement atteint. Les jeunes ont également monté des barricades avec des barrières, enflammé des poubelles et cassé les vitres d'une banque à coup de chaises en fer forgé.
"Le peuple se réveille"
Les slogans "ras-le-bol, ras-le-c..." étaient sur toutes les lèvres samedi après-midi. Les manifestants ont exprimé le sentiment d'une grande injustice, de payer le marasme économique dans lequel est enfoncé leur pays, les énormes déficits publics et le sauvetage bancaire européen de plus de 40 milliards en 2012 tandis que, selon eux, les responsables de l'explosion de la bulle immobilière, de la corruption et des abus bancaires qui ont ruiné les petits épargnants continuent de s'enrichir.
Comme un symbole, un gigantesque doigt d'honneur a surgi de la foule. "Le peuple se réveille. C'est fini la fête", assure une pancarte accrochée au doigt. "Les responsables politiques ont transformé la politique en un commerce pour leurs intérêts", proclamait une autre pancarte orange surmontée des visages de membres du gouvernement de Mariano Rajoy.
Au total, huit colonnes ont convergé vers la gare d'Atocha, à l'appel de multiples organisations sociales, groupes de la mouvance des "indignés" ou collectifs professionnels. Une mobilisation rappelant les grands défilés qui avaient marqué la poussée de fièvre sociale, retombée depuis, qui a agité l'Espagne en 2011 et 2012.
"Marches pour la dignité"
Les autorités régionales avaient mobilisé quelque 1.700 policiers pour assurer la sécurité, craignant des incidents en raison de la présence attendue de groupes antisystème.
"Nous voulons du travail. Nous ne pouvons pas accepter que des millions de personnes au chômage doivent retourner chez leurs parents", a expliqué Jorge Balbas, un chômeur de 24 ans de Burgos, dans le nord de l'Espagne, rappelant que plus d'un jeune actif espagnol sur deux est au chômage et que nombre d'entre eux partent à l'étranger. "Ni chômage, ni exil, ni précarité. Des marches, des marches, des marches pour la dignité", hurlaient dans une sono des jeunes, nombreux dans la manifestation.
L'austérité sans précédent appliquée par le gouvernement conservateur depuis son arrivée fin 2011 pour réduire les déficits publics et la dette de l'Espagne a donné lieu à deux grèves générales en 2012, avec des centaines de milliers de personnes dans la rue. La mobilisation s'est ensuite essoufflée, dans un pays qui connaît la récession, un chômage record et un plan d'économies de 150 milliards d'euros sur trois ans annoncé en 2012.