Comment le gouvernement allemand tente de se débarrasser des partis nationalistes

Angela Merkel discute avec son ministre des Finances Wolfgang Schäuble au Parlement allemand, le 4 décembre 2015. - Tobias Schwarz - AFP
Et si Debout la France ou le Front national se finançaient grâce à la vente d'or? Cette hypothèse, qui semble invraisemblable en France, est pourtant une réalité en Allemagne. Le parti europhobe AfD (Alternative für Deutschland), a lancé en 2014 un commerce d’or sur Internet, en vendant notamment des médailles à des prix très proches du marché. Cette pratique, déclarée légale, devrait pourtant bientôt s’arrêter. Et pourrait mettre en danger l’existence du petit parti dont le succès dans les sondages inquiète jusqu’à la grande coalition (l'alliance gauche-droite au pouvoir).
En Allemagne, le financement public des partis politiques est calculé en fonction du poids électoral, du niveau des donations et de son chiffre d'affaires généré par certaines activités commerciales. Désormais, selon le projet de loi qui doit entrer en vigueur le 1er janvier 2016, ce ne sera plus le chiffre d'affaires global du parti qui sera pris en compte pour les subventions mais seulement les bénéfices réalisés.
"En résumé: si l'AfD ne commence pas à gagner de l'argent avec son or, elle percevra beaucoup moins d'aides de l'Etat", écrit le quotidien die Frankfurter allgemeine Zeitung (FAZ).
L'AfD lance un appel au don
Si la loi est rétroactive, ce qui n'est pas encore acté, l'AfD devra rembourser une somme proche des deux millions d'euros à l'Etat, selon le parti. Sans compter ses difficultés pour l’avenir. "Ce n'est pas une loi, c'est un coup porté à l'existence même du parti", proteste Beatrix von Storch, porte-parole interrogée par ZeitOnline. Seule solution entrevue pour son parti: récupérer la somme due à l'Etat via des dons. "Sinon, c'est la faillite", menace Beatrix von Storch. Le site de l’AfD demande désormais à ses visiteurs de préférer les dons à l'achat d'or.
La FAZ relève que c'est en 2017 que l'AfD sera le plus touchée: "le rapport annuel de 2015 doit être remis en 2016, pour paiement en 2017". L'année même où ont lieu les élections fédérales. Sur Facebook, deux dirigeants du parti soulignent par ailleurs que cette loi intervient alors que leur formation bénéficie d'une "hausse dans les sondages".
Le NPD lui aussi menacé de disparition
La grande coalition d’Angela Merkel chercherait-elle à se débarrasser de l'AfD, créditée de 10,5% des suffrages dans les enquêtes? Interrogé par le quotidien économique Handelsblatt, le chef de la droite allemande ne cache pas ses craintes de voir le “petit parti” allemand propulsé à un niveau proche de celui du Front national en France. Alors que l’Allemagne devrait atteindre le million de réfugiés accueillis sur la seule année 2015, et que des tensions se font sentir dans certaines régions, les grands partis redoutent un effet dans les urnes au moment des élections.
Au même moment, c’est un autre parti qui risque de disparaître. Le parti d'extrême droite NPD, même s’il n'est représenté qu'au sein d’un Land et de quelques municipalités allemandes, ne joue qu’un rôle mineur dans la vie politique. Mais considéré comme néonazi, de nombreux politiques estiment qu’il est anticonstitutionnel. La cour constitutionnelle allemande a donc annoncé l’ouverture prochaine d’une procédure d’interdiction en mars 2016. Une procédure qui aurait des chances d'aboutir.